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LA VIOLENCE FONDAMENTALE JEAN BERGERET

PREMIÈRE PARTIE : ODIPE ET SOPHOCLE

Odipe avant Sophocle

Le caractère universel reconnu au mythe d'Odipe tiendrait .. beaucoup moins à l'universalité de la répression de l'inceste qu'à la .. réussite de l'articulation des différents mythèmes présentés, portant dans leur ensemble ..sur les radicales distinctions existant entre les dieux et les hommes. .

..travail de synthèse réalisé par D. Anzieu .il est toujours fait état dans les textes les plus anciens :

D'un double courant de sentiments régnant entre les parents et les enfants, un courant d'amour d'une part et un courant de violence d'autre part.

De la fonction structurante de ces deux courants et d'amour et de violence.

D'une conception de l'enfant qui fait de celui-ci à la fois un enfant chéri et un monstre, c'est-à-dire un objet sur lequel se trouvent condensés en même temps et des désirs voluptueux et des angoisses concernant la vie.

Le genre de rapports entre enfants et parents, ou entre humains et divinités qui domine .. est marqué .. par la violence sous toutes formes, le meurtre ne constituant qu'une forme particulière d'expression de la violence relationnelle sous-jacente. Il s'agit tout autant de violence (pouvant aller jusqu'à la mise à mort) exercée sur le père par le fils que sur le fils par le père, sur le père par la fille et sur la fille par le père, sur la mère par le fils ou la fille que sur le fils par la mère. Il est peu fait état, par contre, de scènes de meurtres effectués par la mère sur la fille. P.17

.. situations où la violence et le meurtre se présentent comme concomitants de l'inceste.

.. exprimer une situation de violence humaine primitive et universelle, sous ses aspects les plus élémentaires et les plus brutaux ; la  « faute » sexuelle n'interviendrait que secondairement pour tenter de donner un sens imaginaire plus élaboré à la violence première en même temps qu'.. une logique sociale

. le terme d'inceste ne figure pas dans les dictionnaires de grec ancien. on parlait d'union non autorisée par les dieux aux humains, ce qui revient à dire que l'inceste était réservé aux dieux, qu'il s'agissait d'un acte  « sacré ». .. « l'époux de celle dont j'étais né ».

.. la représentation de l'inceste est.. inexprimable en raison d'un refoulement lié à la réprobation. Les hellénistes .. considèrent plutôt 1'inceste comme étant, chez les grecs, une outrance de l'amour, une forme d'hubris de l'amour, réservée, comme toutes les outrances, aux dieux et exclue du droit des humains, tout comme le « Roi-soleil » jouissait, à Versailles, dans son Olympe terrestre, de la capacité de procéder très ouvertement à des actes pour lesquels le peuple était, au même moment, sanctionné avec sévérité.

Dans les antécédents prêtés .. à Odipe.. plusieurs lignées de personnages.. entrent en lutte les uns avec les autres pour des raisons apparemment diverses, mais pour un seul motif profond : la conquête du pouvoir. . P.19

.. (Théogonie d'Hésiode) .. Cronos émasculant son père Ouranos (ce qui donne naissance aux Erinyes, déesses de la vengeance).. Cronos dévorant ensuite ses enfants (pour ne pas être tué par eux) ou bien les livrant aux bêtes sauvages, puis.. Zeus qui .. tuera son père pour prendre son trône, avalera sa compagne Métis enceinte, par crainte dêtre tué par l'enfant qui doit naître, renoncera à épouser Thétis par peur de l'enfant qui naîtrait éventuellement, puis se mariera à Pélée (leur fils Achille est destiné à être tué préventivement par un mortel). Par ailleurs l'union de Zeus et de Héra sa sour donne naissance à Arès, dieu de la violence, lequel n'engendrera que des personnages violents (géants, cyclopes, amazones, Orion). De l'adultère de Zeus( ?) et Aphrodite naîtra, en outre Eros et Antéros, le dieu de la crainte (Deimos) et celui de la terreur (Phobos) et une fille, Harmonie, dont un des descendants serait Odipe lui-même, par suite de l'union d'Harmonie et de Cadmos.

Les problèmes .. portent au premier chef sur des questions de descendance.

Héra aurait aussi donné naissance de façon parthénogénétique à un fils, Héphaïstos, sans le secours de Zeus et ce dernier aurait précipité cet enfant dans la mer, d'où il serait sorti définitivement boiteux (comme Odipe) mais aurait tout de suite engendré une descendance qui, avec Thésée, régnera sur Athènes en y rencontrant la violence..  Thésée est d'autre part présenté par Sophocle comme le témoin de la mort d'Odipe, à Colone.

Qu'il s'agisse donc des origines athéniennes ou des origines thébaines, on retrouve une place essentielle tenue par une violence vitale dans la lignée de la parenté, sans scandale incestueux simultané ni culpabilité génitale. . parallèles existant entre le mythe d'Odipe et celui de Thésée : en particulier le danger présenté par la naissance d'un enfant, la mise à l'écart de cet enfant, le parricide, la malédiction exercée à l'égard de l'enfant (Polynice ou Hippolyte), les exploits violents dirigés contre des personnages symboliques. .

. Cadmos (arrière grand père de Laïos) est connu pour avoir vaincu un certain nombre de monstres ; il est lui-même figuré sur les poteries grecques anciennes sous la forme d'un génie ailé, à corps de dragon et à tête humaine annonçant la Sphinx ; .. fils d'Agenor onsidéré comme le frère du roi d'Egypte Belos.

.par la représentation animale, comme par la parenté géographique, un double rapprochement entre les Thèbes d'Egypte et de Grèce et les Sphinx d'Egypte et de Grèce.

. envisager aussi Odipe devant la Sphinx comme affrontant une représentation ancestrale d'origine paternelle. Dans la légende, toutes les traditions peuvent être comprises comme unissant leurs sens et non comme apportant de simples contradictions.

. les Erinyes représentent une violence d'origine divine destinée à venger tout spécialement les actions parenticides. ..les Erinyes de Clytemnestre rendirent Oreste fou.On peut considérer qu'il en est de même de la nécessité de venger Laïos. Mais il convient de ne pas perdre de vue qu'en Grèce l'expiation la plus courante pouvait être obtenue par le sacrifice animal ; ce n'était que dans des cas très sérieux qu'était exigée une sanction plus sévère telle que l'automutilation ; le fait qu'Odipe soit conduit à se crever les yeux peut être envisagé sous cet aspect. Dans les cas extrêmement graves enfin, le coupable était conduit jusqu'au suicide.

Les Erinyes étaient représentées avec une tête de chien, des ailes de chauve- souris et des cheveux garnis de serpents. On peut y voir quelques ressemblances avec certaines représentations de la Sphinx, rencontrée par Odipe après avoir tué Laïos. Les Erinyes ont pour fonction d'écouter les plaintes concernant les intentions violentes affichées par les jeunes à l'égard de leurs ainés ce particulièrement par les enfants à 1'égard de leurs parents. Elles sont parfois décrites comme de vieilles femmes chargées de punir le crime en poursuivant les coupables de façon implacable, sans trêve ni répit. P.21

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 Delcourt dans son étude Odipe ou la légende du conquérant divise  mythe d'Odipe en cinq mythèmes :

1)L'enfant exposé .fantasme d'infanticide. .. le parent qui se trouve à l'origine de l'exposition est condamné à mort par le simple fait de la survie éventuelle de l'enfant. .. loi de « l'un ou l'autre », sorte d'épreuve ordalique nécessaire au droit à la reconnaissance et à la survie de l'enfant. Le mythème de l'enfant exposé .. porte(r) en lui non seulement une représentation de l'infanticide dont la violence meurtrière est habilement atténuée, mais également une évocation, beaucoup plus subtile encore, d'un « parenticide » inéluctable en retour.

2)Le meurtre du père .. situations où est figurée une lutte entre le père et le fils ; .. allusion à une lutte traditionnelle entre le vieux roi et le jeune prétendant.

3)La victoire sur la Sphinx .. accès au pouvoir grâce à l'élimination violente d'un monstre.. (cf. Zeus, Persée, Héraclès, Jason ou Thésée). (cf. rêve hydre)

. les démons grecs ont essentiellement forme féminine et poursuivent toujours des hommes. (pas pour Andromède !) Ce sont des êtres femelles qui s'approchent d'un homme et s'étendent sur lui, vision que le monde latin ne pouvait supporter.. opérant un retournement de la position respective des sexes dans la démiologie.(Matriarcat -patriarcat).. le phallisme est masculin. (idem Freud). représentations graphiques ..(de) la Sphinx en position d'emprise à la fois génitale et phallique sur un une homme pour se faire ré-générer par lui. Est-ce la condition de la survie de la Sphinx ? Ne s'agit-il pas d'un être avant tout phallique ? (mythe du fils amant ; toute puissance de la grande mère)

4)Le mariage avec la princesse . Jocaste comme la Sphinx, possède l'emprise sur l'homme comme sur  cité, dans une conception matriarcale de la transmission du pouvoir. La maîtrise du pouvoir par l'homme dépend donc de la prise de possession de la princesse (si extension à l'anima, cette attitude l'a nourri de pouvoir au lieu d'éros) . ces deux maîtrises.. sont entendues.. dans un climat violent où la haine comme l'amour ne jouent pratiquement aucun rôle ; il s'agit simplement d'une conquête violente.

5)L'union avec la mère . le personnage de Jocaste peut être compris comme condensant à la fois les représentations de la Sphinx, de la princesse et de la mère. ..

« Bien des mortels ont déjà dans leur rêve partagé le lit de leur mère ; mais tenir tout cela pour rien rend la vie plus facilement supportable. »  Odipe- Roi, 981-983)..  Artémidore d'Ephèse.. considérant le rêve d'inceste avec la mère comme un signe de rivalité avec le père. P.23

. l'inceste commis entre la mère et le fils sont .. rapportés à une violence dominatrice préparant  la conquête du pouvoir (réussie ou non) beaucoup plus qu'à une faute sexuelle qu'il s'agirait d'expier en raison de la réprobation dont elle est effectivement l'objet.

Anzieu ..chaque élément de la légende d'Odipe se trouve correspondre à un des aspects fantasmatiques du complexe constituant le pivot de la conception psychanalytique de l'imaginaire humain. Le premier mythème.. correspondrait à l'angoisse persécutrice kleinienne, le second .. au fantasme parricide classique d'accession à la maturité phallique, le troisième.. à la scène primitive en même temps qu'une image phallique de la mère à laquelle l'adolescent échappe. L e quatrième.. évocation de la maturité génitale et de l'interaction des désirs des partenaires sexuels. Le cinquième.. évoquerait non seulement l'inceste mais le dépassement de la culpabilité qui s'y trouve liée. (d'où l'importance de l'Odipe dans la psychanalyse, entraîné malgré lui dans la déviance freudienne sexuelle)

.s'il est clair que l'inceste suppose le parricide, le parricide initial en soi ne peut être réduit à une téléologie incestueuse.  « Après avoir tué son père il a épousé sa mère » ne peut être restreint à  « il a tué son père pour épouser sa mère ». (ce que j'entendais quand on parlait du complexe d'Odipe)

La littérature psychanalytique a tendance à trop identifier phallique et génital. .. la puissance est un fait commun à la royauté et à la sexualité. Cette assimilation n'est possible qu'en raison de 1'ambiguïté du terme « puissance ». La puissance royale est avant tout une puissance phallique de nature narcissique ; il s'agit de la lutte pour la conquête du pouvoir . Si les « rois ».. ont tant besoin d'affirmer leur droit à la possession sexuelle, ce besoin signe en soi (tout comme le besoin de posséder des terres, des vassaux ou des droits divers) le niveau phallique du contenu imaginaire sous-jacent ; ..nécessité de la lutte comme conséquence de l'imaginaire violent qui sous-tend toute attitude phallique- narcissique.

Il ne saurait être question.. d'exclure le sexuel ni de nous contenter d'inclure le sexuel dans une problématique plus vaste dénaturant la problématique génitale. Il ne s'agit pas d'occulter la réalité universelle de l'angoisse de castration, mais il semble nécessaire de montrer comment la problématique archaïque violente est au contraire intégrée obligatoirement dans la problématique génitale, la seconde ne pouvant parvenir à son efficience.. qu'en s'étayant.. sur la première.  P.25

Position de Sophocle

.Eschyle insiste sur une sorte de  « péché originel » dont les effets seraient reportés de génération en génération en entraînant le malheur de la race coupable.

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Antigone traite de la malédiction qui pèse sur les quatre enfants d'Odipe et de Jocaste . il s'agit de décrire les conséquences de la faute des parents. Mais cette  « faute », chez Sophocle, tient plutôt à la malédiction prononcée par Odipe lui-même quand il est à la recherche du meurtrier de Laïos plus qu'à une faute sexuelle commise par les parents. . Antigone est centrée à la fois sur la violence et le maintien de l'héritage familial. Tout se joue d'abord avec la vie avec la mort, dans une sorte de ballet funèbre interprété par les personnages principaux. Seul le cour chante les pouvoirs miraculeux d'Eros (s'oppose à la puissance) capables de tirer les humains de la violence destructrice en direction d'une violence créatrice et Sophocle termine sa pièce par un appel à la sagesse.

Créon.. joue.. son sort dans une compétition avec les descendants d'Odipe ; il n'a pas encore affiché la « sagesse » de se contenter des avantages d'un second rôle.

.Odipe à Colone, est centrée sur la mort d'Odipe. Le thème est celui de la malédiction dont ont été objet les Labdacides ; des faits auxquels ils ont été mêlés, ils n'en apparaiissent pourtant pas coupables ; tout a été décidé à l'avance par des forces extérieures et qui s'imposent à eux ; leur violence spontanée n'est pas volontaire, elle est inscrite dans leur destin. . les parents d'Odipe étaient au courant de l'oracle qui destinait Odipe au parenticide et qu'en conséquence ils avaient tous deux volontairement souhaité sa mort.  .. question d'une lutte pour la maîtrise du pouvoir à Thèbes. trace d'une rivalité violente existant entre Odipe et ses fils. Sophocle demeure fixé au principe d'une violence qui règne dans les conflits entre générations, comme au sein des conflits entre frères. Les dernières dispositions d'Odipe constituent une sorte de trahison de Thèbes sa patrie, puisqu'il confie à Thésée le secret qui rendra Athènes invincible dans ses différends avec Thèbes : conserver son corps. On ne peut concevoir une plus grande violence posthume, à la fois parenticide, fratricide et infanticide.

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. 1a « peste » était vécue comme une malédiction divine que seul un sacrifice chez les grecs (puis un miracle chez les chrétiens) pouvait conjurer. P.27

Ce que nous connaissons des thèmes d'Eschyle nous montre qu'il s'agissait de la mise en scène non pas d'un conflit de générations mais d'une faute initiale dont les effets malheureux seraient simplement répétés de génération en génération.

En développant son propos autour des conflits entre générations, Sophocle évoque l'idée qu'il en est de la rivalité entre enfants et parents, entre jeunes et vieux, entre faibles et puissants, comme de la rivalité entre les humains et les dieux. Les humains sont accusés par les dieux de démesure  punis pour cette faute dès qu'ils entendent profiter d'un droit ou d'un plaisir réservé aux résidents de l'Olympe. .

. comprendre ainsi le rapprochement opéré par Sophocle entre la violence des oracles de Thèbes et la violence exercée par les parents d'Odipe à l'égard de leur fils. La violence du fils ne peut que répondre en écho à la violence des parents comme conséquence.. de l'épigénèse interactionnelle (les deux attitudes étant concomitantes et articulées). C'est en même temps qu'apparaissent les fonctions imaginaires qui, chez les parents et les enfants, mettent en scène les menaces de mort. C'est en même temps que les humains créent des représentations divines qui leur interdisent la démesure et que ces représentations sont véues comme les menaçant dès qu'ils atteignent le niveau de la démesure. Odipe, par le parricide, par l'inceste, par la victoire sur la Sphinx a vraiment pensé pouvoir égaler les dieux ; cette erreur est impardonnable. .

Première lecture d'Odipe- Roi : le discours manifeste

.Les hommes, les animaux et les plantes sont touchés par un mal qui s' attaque à la transmission de la vie. .

Seconde lecture d' Cedipe-Roi : la recherche d discours latent

Première étape

. une force divine maléfique.. se serait abattue sur Thèbes. .. divinité sous la forme d'une  «déesse porte- feu ». Ce serait donc d'emblée un personnage féminin qui se verrait mis en cause.  en Grèce tous les personnages démoniaques étaient considérés comme féminins. (féminin démonisé) . le masculin (théos) revêt souvent le sens très général de divinité, de puissance mal déterminée qu'on redoute et qu'on prie. . Jocaste personnage féminin central du drame.

Les notables et la foule implorent Odipe, leur souverain, de les sauver, une fois de plus, des forces hostiles qui les dépassent, de même qu'il avait réussi à les délivrer déjà de la Sphinx, cet être féminin redoutable. L'idée d'une puissance violente, volontiers féminine, menaçant les individus et contre laquelle on ne peut se défendre que par la violence plane tout au long de la pièce. Dans tout son théâtre.. Sophocle ne confère pas beaucoup de tendresse aux personnages féminins et les unions n'y sont jamais très heureuses. . P.31

Dans ce troisième oracle, il va être question, comme au premier et au second, de la relation de parenté et de la violence inéluctablement inhérente à cette relation. Dans le premier oracle s'annonce la nécessité d'une lutte entre l'enfant et les parent qui ne pourront coexister ; l'un des deux termes doit disparaître ; c'est l'enfant qui se voit préventivement condamné. Dans le second oracle, comme l'enfant n'est finalement pas mort, ce sont obligatoirement ses parents qui se trouvent maintenant menacés par lui. Lors du troisième oracle l'un des parents, le père, a déjà été éliminé, reste la mère, objet mais sujet aussi de l'inceste, et dont le pouvoir et la vie pourraient sans doute être sauvés encore, mais à quel prix ? Celui d'une nouvelle opération infanticide.

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Sophocle veut nous faire dire, par Jocaste. que la lutte pour le pouvoir et pour la survie, la volonté de puissance, la volonté de survie (avant toute élaboration génitale) commence à la naissance entre la mère et l'enfant et constitue l'élément le plus archaïque qui sous-tend l'aspect combien redoutable de leurs rapports.

On peut .. considérer que la conjonction de la violence, de l'instinct d'emprise et du désir incestueux se situe dans une attitude séductrice de la mère elle-même à l'égard de son enfant, attitude ressentie par l'enfant comme une épouvantable agression si elle ne s'accompagne pas aussitôt de l'apport d'éléments de pare-excitations assez efficients.

Cette forme de peur de la mère, de la violence de la mère, est bien souvent rattachée par les psychanalystes à une projection opérée par l'enfant sur la mère, de ses propres représentations imaginaires à lui. Une telle attitude projective.. ne peut à elle seule expliquer la totalité de la crainte de l'inceste ; il existe, en plus, et le plus souvent, une attitude provocatrice réellement manifestée par la mère.

Et cela fait certainement partie du péché originel redouté par l'humanité. Si la  « Vierge » chrétienne est à priori protégée de tout vécu sexuel par le dogme de l'immaculée conception, cela implique au premier chef qu'elle n'aurait eu ni à ressentir ni à exprimer de fantasme incestueux à l'égard de son fils. ..

Jocaste apparaît.. comme antivierge ; comme celle qui connaît, dès le début du drame, toutes les vérités, comme celle qui a exploité.. toutes les violences possibles, à la fois meurtrières (envers le fils mais aussi envers le père) et sexuelles (envers le père puis envers le fils). . P.39

. distinction parfaitement claire de la part de Sophocle entre les éléments génitaux évidents et les éléments violents fondamentaux qui sous-tendent le drame.

Troisième lecture d'Odipe-Roi : Le rétablissement de la chronologie P.41

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Premier épisode

Le premier épisode se rapporte à la naissance d'Odipe a Thèbes et à l'oracle initial qui a déclenché tout le drame. ..

.. Sophocle n'a pas cru nécessaire de donner un autre sens à la pensée exprimée par l'oracle que la crainte des parents pour leur propre vie. Sophocle n'a pas fait mention d'une des raisons de la colère des dieux à l'égard de Laïos : avoir séduit et enlevé Chrysippe, fils de Pélops. .

. on falsifie assez souvent le sens du premier oracle. On prétend que cet oracle annonçait que le fils de Jocaste et de Laïos tuerait son père et épouserait sa mère. ..on ne retrouve jamais cette double donnée dans les versions .. .. difficulté de traduire le premier oracle, en fonction de tous les sens possible.. « Un jour, prétendait-on, il tuerait ses parents » ou bien « Il devait tuer ses parents, à ce qu'on dit ». Or l'habitude actuelle est de faire dire au premier oracle qu'Odipe devait tuer (seulement) son père.

.. il ne semble pas s'agir d'un « on dit » mais de la sentence elle-même puisque Logos correspond tout autant à une sentence, une révélation divine, un ordre, une raison divine, que d'une façon plus générale à un simple propos. .. le psychanalyste considère que le  « on dit » surmoïque est toujours une sentence prononcée par un dieu-père. .. L'importance et l'intérêt de ce vers se situent dans son double sens .. double sens qu'on retrouve en général dans les oracles, et en général aussi dans les rêves.

.. un mot à mot rigoureux.. : « avoir l'intention de tuer, lui, les parents, telle était la sentence. » 

La grammaire grecque en effet, ne permet pas de départager qui sera l'auteur ou la victime de la violence meurtrière .. proposition infinitive utilisant le double accusatif, il devient impossible de déterminer qui correspond au sujet du verbe tuer, pas plus qu'on ne peut savoir qui correspond au complément d'objet direct.

Il s'agit potentiellement tout autant pour l'enfant de tuer ses parents que pour les parents de mettre à mort l'enfant. P.43

. le verbe tuer se trouve utilisé ici à l'infinitif futur, forme qui correspond à la fois à l'infinitif considéré comme absolu et à l'emploi  « d'intention ».

Le premier oracle ne fait encore aucune allusion ni directe, ni indirecte à l'inceste. Seul le second oracle aborde ce sujet. Le premier oracle ne porte que sur l'intention et sur la violence. Il n'y est question ni d'amour ni, non pus, de haine, mais essentiellement au contraire de la simple loi du survie et du devenir tout à fait primaires : lui ou eux, eux ou lui ; dans le sens du code informatif . zéro ou un, rien ou 1'unité ..

.. l'élaboration triangulaire (dite « oedipienne » ..)  ..où il ne peut être seulement question de la seule bipolarité zéro/un. Mais nous n'en sommes pas là encore aux premiers moments de la vie. (lien à la physique quantique)

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Deuxième épisode

.Odipe doit être tué pour éviter qu'il ne tue ses parents. ..

.. faut-il entendre : Odipe a tué son père et épousé sa mère, ou bien : Odipe a tué son père pour épouser sa mère ? Ce problème est l'objet d'un débat dont l'enjeu est sérieux. P.45

. c'est Jocaste qui a remis elle-même l'enfant au serviteur..  « Dans quelle intention ? » .. « Pour que je le tue. » . l'infanticide était banal en Grèce.. courant aussi dans des temps plus récents en France.. Cependant .. il y a lieu de distinguer ce qui relève du désir vécu comme un désir et ce qui appartient au registre du désir réalisé.

.. mise en évidence du fondement violent de la légende. mise en acte d'un désir aussi inacceptable .. sous le couvert de la sentence des dieux, l'aspect non maîtrisable et inéluctable de la réalisation finale du besoin instinctuel violent. .

.. liens symboliques qui unissaient le Cithéron et les représentations maternelles..

.. place prise chez Freud par les problèmes liés à l'exhibition. L'épisode du Cithéron peut être en effet entendu comme une construction onirique, analogue aux récits des rêves de nudité et de mort. P. 47 (cf. liens entre exhibitionnisme et Odipe et violence archaïque chez Marc D.C.)

Chez Sophocle l'infanticide décidé par le père est mis en avant en premier lieu. Cette violence infanticide est vite reprise au compte de la rivalité génitale dans les interprétations données par les psychanalystes, et, ce sens, elle paraît plus tolérable à la censure du public et de l'inconscient. Mais chez Sophocle l'infanticide d'origine maternelle est tout de même clairement, quoique tardivement, évoqué. .

Troisième épisode

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Cet épisode peut être entendu comme une transformation du vécu dramatique en pensées latentes sous la forme d'une sorte de roman familial. . Cette transformation en pensées latentes serait destinée à déplacer la situation traumatisante, à l'éviter au niveau des vécus ainsi qu'à cliver la relation familiale en  « bons » et  « méchants » parents.

La fixation sur le contenu manifeste permet pour un temps de conserver une bonne relation avec les deux   « bons » parents adoptifs, idéaux et royaux, pris, de plus les vrais parents. Avec ces cibles parentales, idéales et sans conflit, la violence peut disparaître du champ représentatif ; seule la tendresse rencontre une liberté d'expression. Cependant.. il ne semble pas que l'investissement de la tendresse soit très profond et que la violence fondamentale ait pu se voir très substantiellement intégrée au sein de la relation familiale d'alors. Il semble s'être plutôt agi, sous le couvert du  « roman familial », d'une couverture contre la violence beaucoup plus que d'une élaboration affective positive de la violence.

Quatrième épisode

. In vino veritas.

Pour la première fois Odipe va s'adresser lui-même à l'oracle. Il s'agit de la deuxième consultation qui le concerne, donc du deuxième oracle ; et c'est seulement ce deuxième oracle.. qui pour la première fois va clairement génitaliser le problème : Odipe est reconnu comme devant  « s'unir à la mère » et  « devenir (à l'optatif futur) le meurtrier du père qui l'a engendré. » P.49

. coutume de citer le contenu de l'oracle dans le sens inverse .. Le premier terme concerne bien l'union à la mère et le second le meurtre du père. .. dans une telle énumération des forfaits, surtout au théâtre, l'effet doit se présenter comme progressif et que le dernier forfait cité est celui qui est logiquement considéré comme le plus réprouvé par le surmoi socioculturel de l'époque.

Cinquième épisode

. la deuxième sentence ayant été prononcée, l'expression du fantasme parricide concerne la réalisation des deux premiers oracles à la fois, c'est à dire l'aspect parricide de l'un et l'autre oracle, et l'aspect de rivalité génitale du second. C'est tout autant le père rival sur le registre de la violence première que le père génital (rival en tant qu'époux de la mère) qu'il s'agit d'éliminer. Et dans les deux cas, la violence apparaît comme bilatérale.

. un combat qui aurait été déclenché par le père : « Le vieillard cherche à repousser le jeune homme pour 1'écarter de sa route. »

. Il s'agit d'une réaction très élémentaire, de l'ordre des processus primaires : il faut conserver la place, la seule place possible, toute cette place, tout de suite, n'importe comment, à n'importe quel prix. (cf. le tigre dans les rêves)

Ce fantasme est bilatéral. On semble l'oublier trop souvent et le limiter l'imaginaire de l'enfant. Or.. ce fantasme existe chez le fils car il existe d'abord chez le père. On ne peut réaliser une élaboration fantasmatique vraiment oedipienne si le père se présente comme trop permissif, comme trop inconsistant ; il est nécessaire qu'il s'oppose, qu'il se mette en travers de la route pour que l'enfant  « oedipien » devienne victorieux de ses anciens comportements de dépendance, retournement secondaire de la violence primitive. Les pères dont on ne parvient pas à triompher préparent des enfants dont la violence n'aura pas pu être intégrée dans une victoire négociée auprès de la femme ; ce sont d'éternels sujets en révolte. Mais les pères qui ne s'opposent pas laissent les enfants sans possibilité d'utilisation de leur potentiel relationnel violent ; ce sont des dépressifs souvent instructurables et ne pouvant finalement retourner leur violence que contre eux-mêmes. Est-ce mieux pour les individus et pour la société ? Il y aurait certainement lieu de tenir compte de cette hypothèse dans nos réflexions à propos des toxicomanies ou des exactions bruyantes commises par des bandes de jeunes astructurés.

Sixième épisode

.. épisode de la Sphinx. ..rapprochement possible entre le personnage de la Sphinx et celui de Jocaste. ..Pour M. Fain la Sphinx pourrait correspondre à la partie femelle de Jocaste éjectée au moment de la naissance d'Odipe et le retrouvant. P.51

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Il semble que la représentation du matricide constitue le plus abominable, le plus innommable des fantasmes.

.. difficultés d'expression dans un climat marqué par de tels antagonismes est très courant au théâtre : il s'agit du clivage entre deux figurations. .. cette attitude séparatrice dans la prise en compte descriptive était universelle et propre au langage humain. Sophocle a donc tout simplement suivi la démarche habituelle aux humains pour exprimer, d'une façon acceptable grâce au clivage, la violence de l'intention matricide contenue dans le mythe oedipien. Une partie de la représentation matricide est contenue dans ce sixième épisode. Odipe s'y voit affronté à l'image féline- féminine et phallique de la mère. Il va en triompher par la disparition, la réduction du néant de l'adversaire,

.. nous nous trouvons au cour du dynamisme violent fondamental, et non pas agressif, et encore moins dans un dynamisme prenant en compte la dimension incestueuse. La Sphinx n'éprouve aucune haine pour Odipe, pas davantage que pour les autres enfants qu'elle a mis à mort avant de le rencontrer. De son côté, Odipe n'éprouve aucune haine pour la Sphinx. L'enjeu des questions posées par la Sphinx, l'enjeu du dialogue avec Odipe, c'est qu'il est impossible que les personnages de la scène puissent l'un et l'autre survivre à la rencontre. L'un ou l'autre doit disparaître après la confrontation. C'est elle ou lui, lui ou elle.

. Nous nous retrouvons à nouveau dans le leitmotiv qui sous-tend tout le drame, celui du premier oracle, l'oracle fondamental : il n'y a pas de place, dans l'imaginaire, à la fois pour les parents et pour l'enfant.

Divers procédés fantasmatiques vont essayer de contourner cet obstacle.. P.53

 . Le fameux précepte  « L'homme quittera son père et sa mère et s'attachera à sa femme »  présente, quant à lui, un double avantage : celui de conjurer le risque matricide/infanticide en déplaçant sur une autre femme le fantasme violent fondamental et celui de tenter d'intégrer (si un écho imaginaire positif est renvoyé en retour) le dynamisme violent au sein du dynamisme génital (appelé « oedipien »..) .. l'aspect le plus dramatique, exprimé par le mythe d'Odipe c'est la démonstration de l'aspect défensif (et finalement vain dans le cas du héros thébain) de la tentative de clivage ; c'est le retour, malgré tout, au primitif instinct violent fondamental. L'Odipe du mythe exprimerait somme toute l'échec de  « l'Odipe » freudien, la mère et la partenaire redevenant visiblement réunies sans clivage, ni confusion, ni refoulement possible. La faute sexuelle viendrait donner un sens plus élaboré et plus socialisé au tout, en incluant les doubles liens érotiques et violents, parallèlement établis aussi avec le père.

.. une caricature des aléas oedipiens (au sens freudien) concernant les trajets affectifs et relationnels du garçon : clivage de l'imago féminine entre la mère et l'épouse, donc mariage exogamique, puis, en fonction des échecs plus ou moins importants de ce clivage, on assiste à une réunification des deux éléments clivés, d'où la lutte conjugale pour l'emprise, le fameux  « démon du midi », le divorce, parfois même le crime dit « passionnel », ou encore le suicide. Il en est de même pour le trajet imaginaire féminin en face du sort réservé à l'imago masculine.

Septième épisode

..arrivée d'Odipe à Thèbes, son accès au trône et à la couche royale.. Il s'agit du triomphe classique du héros récompensé par la cité. .. pourquoi le titre de la tragédie de Sophocle se trouve être.. en français.. Odipe- Roi .. Quelle différence existe-t-il entre un Turannos et un Basileus ? Le premier n'est pas forcément un « tyran » .. le Turannos possède tous les attributs légitimes du pouvoir mais il ne tient pas ce pouvoir par voie héréditaire contrairement au Basileus.

.. le peuple thébain a lui-même choisi Odipe comme « roi ». .. ironie du sort qui fait d'Odipe chef d'état seulement élu sur le plan manifeste, un chef d'état héréditaire pour des raisons que (sauf Jocaste peut-être) tout le monde ignore.

.. aucune des apparentes incohérences du texte n'est fortuite.. ironie tragique du sort d'un héros représenté comme ayant atteint une toute-puissance affirmée comme doublement absolue (et par vote et par hérédité) au moment où justement il va perdre tout pouvoir sur les autres et sur lui-même.

.. cet « Odipe tout-puissant » ..peut.. être rapproché aussi de cet autre tyran domestique.. sous l'appellation très parallèle de his majesty the baby, le despotisme en cause demeurant à la fois d'ordre instinctuel (violence fondamentale) et pulsionnel (érotisme incestueux).

.. Finalement, au prix de la scotomisation (ne plus voir) et d'un deuxième éloignement de la cité, Odipe aura pu éliminer ses deux parents tout en conservant la vie et une gloire qui, via Colone et l'amour de ses filles, le conduira à rejoindre les dieux, dans cette sorte d'ascension magique habituellement réservée aux dieux.

Le propre d'Odipe c'est d'avoir, dès sa naissance, dès le Cithéron, mené  une existence de héros ; d'avoir de façon constante frôlé l'Hubris (la démesure), et d'avoir franchi, à plusieurs reprises, la limite des attitudes réservées aux dieux. P.55

.. limites imposables aux pulsions humaines, montre ce qu'est la démesure dans la façon de vivre la violence primitive, sans aucune limitation, sans aucune médiation, sans aucune intégration vraiment relationnelle. L'inceste apparaît pour beaucoup comme une simple démesure amoureuse, logique chez les dieux, impensable chez les humains. .. Seule la mort d'Odipe comportera une « démesure » autorisée par les dieux ; en effet la forme même revêtue par la mort d'Odipe correspond à une des façons qu'ont les dieux de s'échapper après un séjour sur la terre. (cf. à 6 ans et transformation du corps en lumière)

Huitième épisode

.la peste, ses conséquences, et surtout ses origines.

.. sens à donner à cette peste. tout fléau contagieux, comme, au Moyen Age encore, on dénommait  « peste » toute épidémie d'origine mal définie et contre laquelle la science du moment se trouvait impuissante.

La « peste », dans la pièce, apparaît comme un symptôme médical, comme le signe manifeste de la maladie qui s'étend peu à peu dans la cité. Comme on le ferait en médecine psychosomatique, il y a lieu de chercher quel peut être le sens de ce symptôme et à quelle transformation économique d'un imaginaire non négociable mentalement la peste peut correspondre. (cf. RAA à la naissance de Sophie, lien à la mort d'Edouard ?)

.. bien écouter le rapport du malade.. : le prêtre décrit le symptôme comme une stérilité qui touche les plantes tout autant que les animaux et les hommes. C'est la fécondation qui est arrêtée. La mort va s'étendre sur la cité non pas simplement en tuant les plantes ou les êtres vivants mais en les empêchant de se reproduire. Bien entendu, le symptôme est à interpréter comme la punition exercée à l'égard de la relation incestueuse dont les conséquences secondes ne pourront qu'être stériles. ..

On ne peut éviter de considérer aussi le symptôme peste, en tant que stérilité, comme entrant dans la ligne associative la plus profonde et la plus puissante du mythe d'Odipe, celle du premier oracle : contre la mort qui résultera obligatoirement de la lutte primaire entre parents et enfants la plus élémentaire parade serait de cesser d'avoir des enfants. .. La peste serait.. l'expression du fantasme profond sur lequel repose toute la pièce, celui de la violence fondamentale, non intégrée dans une érotisation légitimable.

L'épisode de la peste correspond, à plusieurs niveaux, à l'anamnèse du passif occulté, au retour du refoulé, et primitif et secondaire ; les représentations libérées, parce que déplacées, ne portent pas seulement sur le génital mais sur toute la violence sous-jacente, violence sur laquelle le génital était psychogénétiquement étayé et duquel il avait essayé en vain, de se détacher. . analyser le sens de la peste comme .. un symptôme en psychosomatique et aussi comme on rechercherait le contenu latent d'un rêve, en s'attachant à repérer avec le plus de précisions possibles les différents niveaux d'élaboration du symptôme ou du rêve.

Neuvième épisode

.. découverte des origines de la formation du symptôme, de l'élaboration du rêve. P.57 La tradition va considérer Odipe comme un monstre pour avoir assassiné son père et fécondé sa mère. . comme si elle ignorait que jamais Odipe n'a eu connaissance de sa véritable identité.. De plus.. c'est Laïos qui l'a provoqué et .. c'est la cité elle-même qui l'a placé dans le lit de Jocaste.  Le parricide et l'inceste ne constituent pas l'origine première du drame. La source la plus profonde et la plus primitive du drame se retrouve dans le premier oracle et dans l'attitude de violence préventive exercée par les parents à l'encontre d'Odipe qui n'aurait pas dû naître et qui ne saurait vivre ; c'est pourquoi on l'a conduit à la mort sur le Cithéron.

Le parricide correspond à la punition du père qui, une seconde fois, s'était opposé au droit à la vie de son fils. Le neuvième épisode, celui de la découverte de l'identité d'Odipe ne peut s'achever que sur la punition de Jocaste. .L'irreprésentable matricide semble.. avoir été clivé en deux épisodes, le sixième épisode où Odipe met fin à l'existence de la Sphinx mère phallique et dévoratrice et le neuvième où il apparaît comme ayant lui-même, pu éliminer la mère génitale. Or, pour Euripide, Jocaste qui est mère avant d'être épouse, ne s'est point tuée. Le matricide réalisée par le fils (et ses conséquences) se trouve clairement présent dans l'Orestie d'Eschyle.

On peut donc penser que ce neuvième épisode se termine sur le meurtre de Jocaste camouflé en suicide. .

. Sophocle nous décrit Odipe comme se : « précipitant sur les deux vantaux de la porte dont il fait fléchir le verrou et sauter la gâche, en se ruant au milieu de l'espace. »

Le dernier terme.. comporte une remarquable ambiguïté puisqu'il eut désigner tout espace refermé comme une chambre ou un tombeau ; mais l'espace refermé qui se trouve en association directe avec les visées violentes d'Odipe conduisent vers une évocation plus génitale, en même temps que violente. L'amour et la mort apparaissent comme intimement mêlées et leur base fondamentalement commune et fondamentalement violente ne semble faire aucun doute dans l'intensité émotionnelle de cette scène.

La mort de Jocaste au neuvième épisode peut être entendue comme une duplication de la mort de la Sphinx ; au sixième épisode.. c'est dans le cadre de la relation, non pas génitale mais violente et exacerbée entre Odipe et la Sphinx, que se joue cette mort obligatoire pour l'un ou l'autre des deux personnages qui s'affrontent. Il en est de même au neuvième épisode ; peu importe la forme pratique de la mise à mort.. Sur le fond Odipe demeure l'agent de la mort de Jocaste.

L'allusion.. à une pendaison de Jocaste ne peut que nous rappeler la pendaison d' Antigone et tout le halo d'ambiguïté qui entoure cette mort .. P.59

.Comme dans l'épisode du parricicide, Odipe demeure un agent innocent de l'action ; l'initiative de cette action ne saurait lui incomber. La part qui lui revient dans le matricide.. repose.. sur la violence dénoncée dans le premier oracle.

Dixième épisode

.. reprendre ici la tradition mythique dans ce qu'elle représente de génial en tant que connaissance des processus imaginaires ; les recherches psychosomatiques contemporaines nous ont appris que quand le refoulement ne parvient plus à assurer mentalement la défense nécessaire à l'égard du retour des représentations insoutenables, l'appareil psychique s'adresse à d'autres modes de défenses en direction des manifestations corporelles ou comportementales.

C'est dans ce double registre qu'Odipe, ne pouvant plus lutter maintenant contre l'expression de la vérité, s'aveugle physiquement, et met ainsi un terme, au moins formel, à son désir de voir, de savoir. .

.Les derniers vers .. nous mettent en garde avec une certaine solennité contre la naïveté de croire qu'une vie peut être heureuse avant d'être certain qu'elle ne se sera pas terminée dans le malheur.  .

Diverses versions de la mort d'Odipe ont été proposées, et aucune de celles-ci ne fait allusion à une mort d'Odipe survenue sur-le-champ, comme punition des crimes dont il est accusé. . Les formes en varient mais c' est toujours à la violence de la lutte pour la vie que régresse l'action, devant l'échec de l'élaboration amoureuse.

Odipe à Colone

. Ce message porte essentiellement sur la violence : le parricide, la lutte entre le père et les fils, la lutte entre frères, la lutte entre beaux-frères ; toujours la lutte pour le pouvoir et, de façon plus fondamentale, la lutte pour la survie, la lutte entre générations, la colère des dieux envers les hommes.

Quelle faute ont donc commis les hommes ? .. c'est toujours l'Hubris, la démesure. Cet aspect  « quantitatif », cette exagération des droits que s'accordent certains humains semblent beaucoup plus désagréables aux dieux que l'aspect  « qualitatif » de tel ou tel acte, aussi peu recommandable que cet acte puisse être en soi. Nous nous trouvons tout près de cette notion psychodynamique des aberrations mentales consécutives au débordement , d'un quantum d'affects intolérables pour le Surmoi et entraînant la malédiction du Moi. Dans  le drame d'Odipe, il ne s'agit pas seulement de l'excès pulsionnel libidinal mais d'un débordement surtout de l'instinct violent fondamental encore beaucoup plus indifférencié. L'échec de la libidinisation augmente automatiquement la force du déferlement violent des conflits entre générations (entre parents et enfant) et des conflits entre natures différentes des êtres, c'est-à-dire entre les dieux et les hommes.

La sévérité des oracles divins, des sentences divines apparaît comme en relation directe avec les outrages réalisés par la famille des Labdacides qui va s'éteindre avec Odipe, apaisant ainsi la colère divine au moment de la mort du dernier représentant de la lignée maudite. P.63  . comprendre la  « faute » de l'homme comme étant, avant tout, à l'instar du mythe judéo- chrétien du  « péché originel », un péché d'orgueil commis par l'homme qui dans sa démesure se croit capable d'accéder lui-même aux avantages et aux droits réservés aux divinités. La violence exercée envers les autres humains n'est coupable que si elle constitue une violence, une lutte pour la puissance, exercée en égalité avec les dieux ; elle devient alors comprise comme une compétition avec ces dieux et par voie de conséquence comme une violence à leur encontre, comme une façon inadmissible pour eux de voir l'homme tourner vers eux sa violence fondamentale d'emprise.

. Odipe tient véritablement le rôle du bouc émissaire, du pharmakos.

.. apparaissent, à la place de l'Eros, les trois notions beaucoup plus archaïques de Philia, d'Hubris et de Phtonos.

Phtonos vient du radical.. amoindrir, détruire. Phtonos c'est la rivalité pouvant conduire à l'élimination. L'Hubris c'est la violence personnifiée, portée à l'état de démesure, de puissance divine (donc  puissance instinctuelle). (pole IR des archétypes) Le terme dérive de. ; hyper qui indique que cette violence dépasse toute mesure dans son expression, mais aussi, du point de vue de l'économie psychique, qu'elle dépasse toute possibilité contention humaine consciente et volontaire. L'Hubris apparaît.. comme se rapportant tout autant à la violence en général qu'aux violences exercées sur une femme ou sur un enfant, ce qui semble net dans le cas d'Odipe (Cithéron, la Sphinx, Jocaste, les enfants d'Odipe) et ne peut être confondu avec la violence découlant de la dynamique érotique. Cette distinction apparaît aussi dans la différence de sens entre Eros et Philia, le dernier terme traduisant une relation d'amitié, de confiance, de bienveillance, de similitude d'intérêts, sans érotisation. Il faut noter enfin que, quand on peut traduire Philia par  « amour », il s'agit exclusivement, en grec, de l'amour du pouvoir et de l'intérêt.

Le terme d'Hubris revient à deux reprises dans la bouche du chour.. expose très clairement la nature de cette démesure dans la violence qui va perdre Odipe : Odipe a lutté essentiellement pour lui, pour sa propre identité, pour sa propre survie. Si certaines de ses luttes ont grandement servi la cité, ce n'était que par conjonction accidentelle. Il apparaît maintenant que la lutte d'Odipe ne peut plus concorder avec les luttes que doit mener la cité. La violence d'Odipe est essentielle et personnelle, la violence collective touche à des intérêts qui dépassent le point de vue de la simple survie et touchent à des élaborations imaginaires plus complexes, elle atteint et inquiète les dieux. . moment où les routes se séparent : d'un côté la violence fondamentale instinctuelle, de l'autre la façon dont la société des hommes est conduite à traiter ses différents niveaux de pulsions avec l'aide des mécanismes adaptatifs et défensifs. lois de la censure surmoïque considérée comme d'essence divine et des dangers encourus par ceux qui n'ont pu faire entrer dans leur mode de fonctionnement mental cette dimension intégrative « raisonnable ».

. Odipe à Colone se termine par l'apothéose du même héros qui pu dépasser la démesure de la seule violence narcissique primaire, l'Hubris, au profit d'une tendresse relationnelle humaine, d'une Philia, dirigée vers ses filles ou vers Thésée tout en conservant une rivalité (discrètement perceptible comme érotisée) à l'égard de Créon ou des fils, en référence aux représentations féminines (Jocaste et les filles) qui apportent la dimension de la triangulation.

. période de la secondarisation possible, de l'intégration dans une dynamique de tendresse des données instinctuelles contradictoires qui l'ont toujours agité mais avec une nécessité fatale alors de négociation immédiate et sans restriction. A Colone, Odipe est capable de vivre des tendances contradictoires, des représentations antagonistes : Erinnyes/Euménides, Malheur/Bonheur, Honte/Gloire, Haine/Tendresse. Il ne demeure plus, comme à Thèbes, au simple registre de la démesure tyrannique ne pouvant rencontrer comme contrepartie que la jalousie et la colère divine. C'est de la culpabilité qu'il débat.. et sur ce nouveau registre la discussion, la justification, tout autant que le sacrifice rituel non sanglant, deviennent possibles. Les dieux sont moins outragés.

Le même conflit fondamental qui a opposé dans 1'ombre Odipe à ses parents et aux dieux, l'oppose enfin clairement à ses fils ; le même sentiment tendre qu'il n'a pu vivre dans la sérénité avec sa mère, il peut le manifester légitimement à l'égard de ses filles. .. représentation d'une triangulation qui ne coûtera plus la vie du père ; ce sont les fils qui périront. . (pas résolu ; si symbole de soi.)

DEUXIÈME PARTIE : FREUD, ODIPE ET LA VIOLENCE

De Sophocle à Freud

. Freud.. ne parle jamais de l'épisode.. qui aurait plus particulièrement concerné la conduite homosexuelle antérieure de Laïos.

.. pas tellement soucié de la diversité des problèmes posés par le mythe ; .. servi de la mise en scène.. pour illustrer une partie de ses conceptions théoriques, la plus importante partie à ses yeux, celle qui touche aux relations triangulaires et génitales de l'enfant, appelées depuis lors « oedipiennes ».

..

Sénèque.. La violence est directement exprimée comme non intégrée, comme non intégrable. Le désir sexuel n'apparaît à aucun moment, même sous la forme d'une quelconque tendresse. .. accentué fort clairement le double mouvement imaginaire primitif infanticide/parenticide subtilement évoqué par Sophocle. .P.69

.

.. L'origine du tragique n'est point décrite ici (La Thébaïde de Racine) comme de nature génitale ; elle est attribuée à une implacable lutte pour la vie qui oppose les humains.

. Oedipe serait en quelque sorte la représentation de nos  « péchés capitaux », la représentation directe des passions humaines et non un personnage destiné à figurer un être humain en proie aux conflits engendrés par les passions. Il apparaît que la passion la plus fondamentale figurée par le personnage d'Odipe est incontestablement la violence, sous son aspect universel.

Un mythe est un récit imaginaire chargé de représenter, sous une forme allégorique, la généralité de telle ou telle situation affective. Le mythe est chargé d'intégrer des données symboliques universelles au sein de l'imaginaire collectif. Il permet ainsi aux humains de récupérer un lien moins angoissant au réel, de se situer dans leur temps d'une façon solidement reliée, par une continuité exprimable, tant au passé qu'au futur. Si le mythe a le pouvoir de rassurer c'est parce qu'il réaffirme l'homme dans son appartenance à la permanence du réel.

. Le mythe est fait pour nous renvoyer des questions sur nous-mêmes, pour nous faire penser, pour nous faire associer. P.71 Le mythe recule les limites du représentable en offrant des zones d'obscurité correspondant à ce qui ne peut être dit que mythiquement. (carences pédagogiques actuelles)

La frange obscure du mythe chez Sophocle est d'ordre génital ; chez Freud, c'est la violence. zones d'obscurité  .. nécessaires, chacune à leur époque, en réaction aux mouvements socioculturels dominants ; certaines représentations devaient être réprimées et d'autres .. investies.. surinvesties..

Comme une ouvre d'art, le mythe se prête à beaucoup d'interprétations. .. chacun peut s'y reconnaître, s'y retrouver.

On peut penser que Freud a visiblement surévalué l'aspect incestueux du mythe d'Odipe, alors que les auteurs antérieurs avaient survalorisé au contraire le parricide et la lutte entre générations. Or le fond du mythe n'est il pas constitué par la prise en compte d'une violence sur laquelle s'étayent toutes les autres activités humaines plus élaborées ? . le mythe porte obligatoirement l'empreinte des structures de la société et, en retour, un de ses buts consiste à légitimer les institutions sociales du moment.

. la crise que traverse actuellement notre civilisation dans son ensemble.. correspond.. à une insuffisance des capacités d'élaboration imaginaire individuelles et collectives de type mythique.

.

Il y a beaucoup de suggestions dans le mythe d'Odipe, qui ne sont pas bonnes à vivre, mais qui apparaîtront toujours comme bonnes à penser.

.. difficultés rencontrées par l'homme de tous les temps pour intégrer sa violence naturelle au sein d'une problématique érotique. P.73

Freud, Hamlet et l'Orestie

. je ne conçois la violence fondamentale en général que comme l'un des engrenages composant les mécanismes oedipiens considérés dans leur ensemble, ensemble qui ne peut s'arrêter à l'inceste, la rivalité génitale et à la castration. Le mythe d'Odipe, et encore bien plus clairement la légende d'Hamlet, s'étaient sur la violence primitive et traduisent les difficultés de son intégration.

La face cachée de l'Odipe

. Hamlet met en scène beaucoup plus clairement qu'Odipe-Roi l'imaginaire violent prégénital. .(rêve avec Ophélie)

« Être ou ne pas naître ? »

La psychanalyse s'est attachée à faire prendre conscience aux adultes que la résolution de la crise d'adolescence entraînait automatiquement une amnésie portant sur tout ce qui avait été conflictuellement un jeu au cours de l'adolescence, de la latence et de la période oedipienne. Mais est-on allé assez loin en remontant le temps ? A-t-on pris suffisamment en considération l'amnésie portant sur les représentations et les angoisses de la toute première enfance ? Celles qui n'ont pas encore pu être élaborées génitalement ?

Pour le.. public, Hamlet c'est avant tout le spectre, le vers.. « to be or not to be » .

.. figuration de la violence et d'un désespoir né de l'incapacité de négocier cette violence en raison d'un contexte épigénétique jusment tout à fait impropre à l'intégration imaginaire, sur un mode génital, des éléments libidinaux forcément présents chez Hamlet comme chez tout jeune garçon. Faute d'une induction interactionnelle suffisante, le prince Hamlet n'a pu organiser son imaginaire sous le primat du génital comme le prince Odipe, ni sublimer les contenus imaginaires génitaux comme l'a réalisé le Petit Prince de St-Exupéry. Hamlet n'a d'autre ressource que le désespoir ; il ne sait que faire de sa violence naturelle ; il la tourne dans toutes les directions tout autant contre les autres que contre lui-même.

.. sur la tombe d'Ophélie : « I1 y a quelque chose en moi de dangereux »

M. Fain.. comment pouvait jouer une déception venant de la conjoncture, devant un échec de la sublimation de l'homosexualité lié à la présence d'un adulte (« pervers ») menaçant l'enfant.(cf. cas clinique Vincent D.M.) .. Il y a lieu de tenir compte des conditions dans lesquelles peuvent survenir l'échec social, dans un climat d'effraction affective opérant une fixation à un certain monophasisme Oedipien, c'est-à-dire, à mon sens, au temps du premier oracle d'Apollon. P.77

.

« to be or not to be (born) ? » soit : « Être ou ne pas naître ? » .. « Je pourrais m'accuser de telles choses qu'il eut été meilleur que ma mère ne m'ait pas fait naître. » .

. Shakespeare ose affronter le plus grave problème et le plus intense conflit qui aient jamais occupé l'esprit de l'homme (Jones) .. dans toutes les versions antérieures du drame il s'agissait bien d'une lutte entre un jeune homme et une image paternelle plus ou moins déplacée.

Ce que Hamlet à juré au spectre n'est pas seulement de le venger mais aussi de se souvenir et de porter témoignage. Le spectre joue.. un rôle analogue à celui de l'Oracle d'Apollon. il rappelle les vérités qui ont été jusque-là célées. . Hamlet, à l'encontre d'Odipe, ne tue pas son père. Il ne peut désirer la mort de l'oncle que quand il aura été capable de prouver la faute de cet oncle. Il lui faut justifier sa violence. .il faut que ce soit l'image paternelle, la génération ancienne qui s'oppose, sinon il n'y aura jamais d'Odipe. L'Odipe ne peut survenir qu'en s'étayant sur la violence fondamentale, sur la lutte inéluctable et indispensable entre les générations, au niveau du mple survivre primaire.

La tendance à l'élimination des représentations paternelles constatée chez les héros . P.79

certaln nombre de polnts communs : l'absence des repré- ;entations incestueuses habituelles chez Freud (c'est-à-dire du modèle fils- mère), l'absence de représentation maternelle, la prise en compte sous-jacente 'une relation équivoque fille-père, et la liaison avec la mort du père. Dans ud nous présente Hamlet comme le drame e la « relation du fils avec ses parents », de cbethrepose- ait sur le thème de <ç l' absence d'enfant ». Da Lns les deux cas il n'est point récisé de contenu (( ~dipien » au sens incestueux dans l'imaginaire sous- : jacent ; il s'agirait donc d'un registre relationnel beaucoup plus primitif.

. Le père c'est celui qui peut dans le fantasme premier donner la vie mais tout aussi bien la retirer. 

. « Toute tragédie, dit A. Green, apparaît comme le recouvrement du secret et l'élaboration d'une structure qui y fait écran. »

Le spectre.. s'avère capable de réveiller des éléments encore mal intégrés de la violence primitive ayant régné autrefois entre parents (père et mère) et enfants et que Freud éprouvait une difficulté à voir se préciser parmi les fondements biologiques, affectifs et sociaux, sur quels doit s'étayer l'Odipe classique.

L'Orestie, face cachée de Hamlet

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Dans l'Orestie comme dans Hamlet il n'existe pas de relation incestueuse évoquée directement entre la mère et le fils. Dans les deux cas le jeune est opposé aux anciens, il règne un climat de violence, de vengeance, de meurtre et d'auto-défense. . le drame demeure clairement endogamique et pourtant on n'y retrouve aucune représentation incestueuse, bien qu'aucune brutalité d'expression ne soit ménagée.

.. le rêve de Clytemnestre.. duel à mort parent - enfant (1' enfant représenté par un serpent, la mère présentant un sein sanglant - sanguinaire) . P.83

Green se demande si Oreste ne constituerait pas un modèle représentatif complémentaire du complexe d'Odipe, l'Orestie illustrant une situation qui irait bien au-delà d'une simple inversion du complexe d'Odipe. ..

.. l'Orestie constitue une forme naissante de la dialectique triangulaire et reste tributaire du mode de relation duelle. Il n'existe à la naissance, en effet, que deux forces en présence, deux fore de vie qui s'opposent, celle des parents quel qu'en soit le sexe.. et celle de l'enfant, donc deux forces de vie contradictoires et incompatibles au registre du fantasme primitif. Oreste exprime cette incompatibilité de façon très claire et très brutale.  « que je la tue ou que je meure ! » l'action se limite à l'une ou l'autre des solutions.

L'histoire des Atrides ne comporte ni inceste ni châtiment. la thèse freudienne associant inceste, culpabilité et castration. Cette histoire s'arrête pratiquement à l'oedipianisation . mais elle débute dans l'infini des temps avec le meurtre d'enfants effectué par les parents (Pelops mis à mort par son père Tantale puis Atrée, fils de Pelops mettant en pièces ses neveux, cependant qu'Agamemnon, fils d'Atrée, tue les fils de Thyeste et sacrifie sa propre fille Iphigénie) ou le meurtre des parents réalisés par les fils (Egisthe, fils de Thyeste tue son oncle Atrée et, bien sûr, Oreste tue Clytemnestre, sa mère, ainsi qu'Egisthe représentation du père dangereux). Il en est de même pour les frères entre eux.

Derrière tout cela point d'Eros, mais au contraire les Erinyes, déesses de la violence, représentations tout à fait directes de l'instinct primitif de survie. Eros n'apparaît qu'au moment où, par évolution oedipienne, les Erinyes sont devenues les Euménides. L'amour a triomphé de la violence..

Pour elle(M ; Klein), l'auteur (Eschyle) présente habilement .. sous la forme extériorisée des Erinyes, une réalité intérieure commune à tous les humains, un véritable instinct primitif violent. La transformation finale des Erinyes en Euménides me semble.. rendre compte de l'intégration de la violence primitive au sein des pulsions amoureuses. .

Moïse et le monothéisme.. de Freud. Il s'agit de défendre l'hypothèse de l'existence de deux  Moïse, de deux religions primitives, celle de Jahvé et celle d' Aton ; .. d'envisager deux étapes dans l'affrontement de ces deux problématiques, celle de Jahvé essentiellement violente et celle d'Aton empreinte de vérité, de justice et d'amour. Il s'agit aussi de considérer deux entités ethniques qui ont d'abord fusionné à partir de l'Egypte puis de deux peuples qui ont constitué une nation ;  s il s'agit de deux  « testaments » dont les promoteurs, Moïse et Jésus, ont tous deux été assassinés.

La notion de meurtre du père, de meurtre de Moïse, est placée en parallèle avec le  « péché originel » chrétien de la seconde lignée, celle du fils tué à son tour. Comme l'Orestie, le judaïsme concerne le meurtre du père , alors que le catholicisme nous rapprocherait d'Odipe dans l'élimination du fils qui avait cru pouvoir prendre la place du père. . P.85

Freud à la découverte de l'Odipe

3.1. Oedipe à Paris 

.Théodora. Il (Freud) décrit une femme étendue sur un divan (courtisane/mère/Dora) puis une nourrice  « qui semble jouir de la vie » en jouant avec un tigre (la sphinx), allant retrouver son amant en cachette ; Freud se permet de manifester une émotion sensuelle en rapportant comme Théodora-Sarah (Bernhardt) s'emploie à enjôler, implorer, étreindre, se serrer contre son partenaire, mouvoir ses membres, dans le jeu de la moindre de ses articulations.

. Paris, ville qu'il compare à une sorte de  « Sphinx gigantesque et pimpante qui dévore les étrangers incapables de résoudre ses énigmes. » .

3.2. Le complexe d'Odipe

. il a rêvé à sa fille Mathilde devenue Hella car elle fait preuve d'une véritable passion  « pour la mythologie et la Grèce antique » et  « elle considère naturellement tous les Hellènes comme des héros ». Freud conclut provisoirement. que  « ce rêve montre évidemment la réalisation de (son) désir, c'est-à-dire celui de constater que c'est bien le père qui est le promoteur de la névrose. » . l'allusion à Odipe se précise sous l'aspect de la description d'un désir de mort des parents, autrement dit sous l'aspect de la violence seulement.. cette violence menace tout autant la mère que le père et.. les pulsions émanent des fantasmes les plus anciens. (ambiguïté du sens dans lequel s'exerce cette violence.)

. Les mouvements violents ressentis par l'enfant à l'égard de ses parents sont sans rapport avec une quelconque « réalité ». Il s'agirait plutôt d'une  « prédisposition héréditaire. » . « To be in readiness » écrit Freud. Etre prêt. à quoi ? ..fin de la lettre.. « Rébecca, ôte ta robe, tu n'es plus fiancée. »

. les femmes du père, Rébecca ou sa propre mère, il les aura souvent vécues nues et nous savons que cette représentation chez Freud est liée au cadavre sur la table de dissection. (Quelle belle image de la femme !)

Le 22 décembre 1897.. Freud, à ce moment, entre dans l'économie de la violence et du manque : alcool, morphine, tabac et les autres dépendances (dont plus tard la passion du jeu) sont considérées comme des substitut du seul grand besoin primitif violent qu'il relie alors aux compulsions masturbatoires. P.89

. si l'enfant n'est pas l'enfant de ses parents il n'a plus de reproches à se faire quand il éprouve des sentiments de violence contre ses parents ni de reproches à faire aux parents s'il découvre en eux une violence dirigée contre lui. . La violence n 'est jamais absente dans les formations fantasmatiques infantiles ; il existe des rêves de désir de la mort du père et une hostilité en vers la mère ; le récit correspond aux romans de vengeance et de revanche. (cf. Magali  V. D.B.)

. lutte entre les générations pour la survie.  question de la honte d'avoir souhaité la mort des parents (il s'agit ici des deux parents et non du seul parent  « oedipien ») et d'avoir éprouvé une envie de vengeance à leur égard. Vengeance de quoi ? Aucun élément du contexte ne fait allusion à la situation génitale triangulaire. Freud parle d'un  « coin vraiment inconnu du psychisme ».

La grande époque

. Freud s'intéresse aux doubles réactions de tendresse et de haine existant très précocément entre parents et enfants. L'énoncé de l'action commence par une erreur : selon Freud l'oracle d'Apollon annonçait qu'Odipe tuerait son père (et non ses parents). Puis Freud montre que la pièce ne constitue qu'une progressive révélation de vérités cachées jusque-là comme ce qui se passe au cours d'une analyse. Odipe-Roi, dit Freud constitue une tragédie du destin, opposant la toute-puissance divine aux vains efforts de l'homme.

.. l'émotion .. provient de la similitude des malédictions qui ont entouré notre propre naissance tout comme celle d'Odipe et il commet alors une seconde erreur en situant comme contenu dans l'oracle initial la double obligation de tuer le père et d'épouser la mère. . P.91

I1 poursuit en comparant le mythe d'Odipe à une sorte de rêve archaïque figurant la perturbation des relations existant entre parents et enfants qu'il situe d'emblée dans le cadre des premières impulsions sexuelles..(ma résistance)

Freud a certainement tout à fait raison de montrer comment le rêve d'inceste complète le rêve de meurtre du parent. Il nous renvoie à ce propos au conte d'Andersen, les Habits neufs de l'empereur, et aux rêves de nudité en tant que rêves d'exhibition. (rapport ?)

. Ce que Freud appelle l'égoïsme de l'enfant semble justement correspondre à la dialectique primaire « un ou rien », « moi ou lui », « moi ou rien », qui implique tout autant chez l'enfant un fantasme parenticide que chez les parents un fantasme infanticide. A ce niveau très élémentaire de l'épigénèse imaginaire interactionnelle la production fantasmatique violente ne peut fonctionner que dans les deux sens de la communication interpersonnelle. 

.. le cas Dora. Il y est question du double courant épigénétique d'échanges affectifs et représentatifs existant entre parents et enfants, mais ce courant est envisagé ici par Freud seulement sur le registre de l'excitation sexuelle.

. le sens qu'il donne à l'énigme de la Sphinx : d'où viennent les enfants ? Il signale aussi l'aspect perturbateur, donc violent, représenté par toute naissance. Et à propos de la légende de la cigogne, quand il recherche la base la plus profonde de ce qui constitue le complexe nucléaire de l'imaginaire névrotique, Freud semble insister sur une hypothèse violente qui opposerait le corps de la mère au corps de l'enfant. (Accentué par le rhésus)

. la vision de l'enfant conférant un  « pénis » à la mère (..il parlera de « phallus ») il prend soin de nous dire que la distinction entre les sexes (donc la sexualisation, du latin secare, couper) n'est pas encore établie. Ce  « pénis » n'a donc pas encore de sens génital oedipien différencié. Il s'agit encore d'un phallus entraînant la rivalité avec les deux parents, aussi bien la mère que le père ; .à propos du fantasme primitif qui figure les enfants comme expulsés dès leur naissance par la mère tout comme  « des excréments, des selles », nous ramène encore à une violence relationnelle au sein de laquelle un nouveau-né se voit menacé par ses deux parents, rivaux narcissiques- phalliques . P.93

. on retrouve tout autant des sentiments d'hostilité que de tendresse à l'origine du complexe central de toute névrose. .. fantasmes infantiles de lutte qui précèderaient les prises en compte imaginaires génitales. . besoin de réparer par l'amour les attaques fantasmatiques antérieures dont ont été victimes les images parentales ; il est bien sûr  surtout question ici de représentations maternelles. .

On s'est souvent demandé pourquoi Freud n'avait pas pu suivre Jung,  sinon dans le sens donné à ses théories, du moins dans l'intérêt porté à la mythologie grecque.. et pourquoi Freud s'est orienté vers des civilisations plus lointaines et plus primitives où l'animal prenait une importance particulière. .. c'est le contenu latent très violent (analyse du petit Hans) à l'égard des deux parents derrière la représentation animale qui avait retenu l'attention de Freud. P.95

.Totem et Tabou représente en effet une prise en compte très nette non seulement de la position parricide mais de l'opposition  « à mort » existant entre le père et les fils dans la  « société primitive », c'est-à-dire du point de vue psychologique dans les fantasmes les plus primitifs de l'enfant, puisque.. toute « préhistoire » correspond avant tout à une « préhistoire » personnelle psychogénétique. (intérêt des enfants pour la préhistoire, les dynosaures) .

. s'est constitué.. le grand tabou sychanalytique, celui auquel il ne conviendra jamais de toucher : le tabou du tabou de l'inceste. . contre quelle représentation violente plus fondamentale ce tabou du tabou assure une défense d'autant plus efficace que le tabou de l'inceste constitue, en soi, en tant que valeur conceptuelle, un roc tout à fait légitime.. il (Freud) développe.. les racines violentes de l'élaboration  oedipienne et le sens des rites destinés à protéger la vie contre les fantasmes violents les plus primitifs. .. rôle joué par le héros dans la tragédie grecque ainsi que les conditions dans lesquelles s'établissent les représentations donnant naissance aux religions, à la morale, à l'organisation sociale et aux réalisations artistiques. ..l'imago maternelle apparaît comme exclue. . dilemme de la Jviolence entre la vie et la mort. (les trois coffrets) .

. derrière le complexe d'Odipe.. le concept. emprunté à Jung de complexe parental. Toute idée de  « complexe » suppose une dualité de sentiments, d'attitudes. Or Freud ne nous parle que de la formation réactionnelle secondaire de tendresse, de réparation, à l'égard des images parentales, donnant naissance au fantasme de protéger les parents d'un danger menaçant leur vie. De qui viendrait donc cette menace, sinon de l'enfant lui-même ? .

. Freud accuse Jung  « d'éliminer ce qu'il y a de choquant dans les complexes familiaux » (et lui quid de la violence fondamentale?) et d'avoir remplacé la libido par une notion abstraite réduisant le complexe d'Odipe à une signification symbolique. Il est facile de comprendre la position de Freud mais il n'est pas impossible, sans tomber dans la difficulté à laquelle aboutit la conception de Jung, de concevoir que la situation oedipienne

s'appuie sur une situation, non pas concomitante mais plus archaïque, où le père doit se trouver effectivement en position de victime potentielle d'un meurtre nécessaire non seulement à l'émancipation de l'enfant mais à sa simple survie. La  « tâche vitale » ne s'opposerait donc pas à libido mais lui préparerait au contraire des bases énergétiques et conflictuelles.

. un désir de meurtre des parents existant chez l'enfant. De telles dispositions instinctuelles ne manqueront pas d'être réactivées au moment de la mort réelle d'un père ou d'une mère. P.97

.

.compréhension du cheminement imaginaire de l'enfant tel que le conçoit Freud :  « en fait, c'est l'égoïsme qui lui enseigne l'amour ». .. l'articula ion de la diachronie, de l'étayage de l'amour oedipien sur la violence primitive. Freud nous montre en effet que « toutes les fois que quelqu'un nous barre le chemin de la vie », l'imaginaire « se montre prêt à supprimer ce quelqu'un, fut-il le père, la mère, un frère ou une sour, un époux ou une épouse. Cette méchanceté de la nature humaine - poursuit- il - nous avait étonné et nous n'étions pas disposés à l'admettre sans réserves.

. cas de « l'Homme aux loups ».. Freud confirme l'existence de plusieurs niveaux de schémas phylogéniques apportés par l'enfant à la naissance et constituant des organisateurs des vécus successivement rencontrés. Ces schémas constitueraient des précipités de l'histoire de la civilisation humaine. (cf. archétypes) Il ne seraient donc pas simplement libidinaux. Le complexe d'Odipe est simplement mentionné comme étant l'un d'eux et l'exemple le mieux connu. Il ne semble nullement considéré comme le seul schéma envisageable.. Freud émet la fameuse hypothèse.. d'un instinct primitif animal.

. l'imaginaire infantile .. jusqu'au fantasme archaïque où l'enfant se demande s'il va être finalement mis à mort par l'imago parentale impressionnante avec laquelle il se voit brutalement mis en contact, aux tout premiers moments de sa vie. Les motifs qui lui font retourner sur lui-même la violence primitivement dirigée sur les objets menaçants est analysée, chez l'enfant déjà plus âgé, sous l'angle du masochisme d'une part, c'est-à-dire après secondarisation et intégration de fragments libidinaux et d' autre part, dans une téléologie.

La violence et la mort

. troisième théorie des pulsions.. Freud semble beaucoup hésiter sur la nature et l'origine des mouvements violents primitifs. q

..il rejoint l'opinion de K. Abraham sur l'existence de pensées violentes précoces dirigées contre l'objet et il omet de rappeler qu'il s'était autrefois opposé à de telles hypothèses en soutenant, que les mouvements violents à l'égard de l'objet ne débutaient que plus tardivement chez l'enfant, au cours de la phase anale seulement. P.99 Freud admet la présence d'une tendance très précoce centrée sur la destruction de l'objet. Cette tendance serait détachée des instincts de conservation du Moi et dirigée sur l'objet.

.. causes possibles de telles poussées violentes ; il s'agirait de réactions contre une angoisse, une frayeur devant un vécu de danger extérieur qui constituerait une menace pour la vie du sujet. .. jeu de la bobine.. se voit envisagé comme une des premières mises en scène chez l'enfant, secondairement élaborée au registre ludique, de la pulsion d'emprise sur l'objet en réponse aux vécus menaçants dont le sujet s'estime lui-même la cible.(voir dans la relation amoureuse) ..les premières conséquences directes de la procréation se traduiraient dans un mouvement essentiellement violent et que, d'autre part, c'est l'intégration de la violence au sein du mouvement de sexualisation qui permettrait d'assurer dans l'imaginaire relationnel une possibilité de survie et concernant le sujet et concernant l'objet.

. désirs primitifs présents chez chaque individu, de supprimer tous ceux qui s'opposent.  « aucun doute quant à la fréquence et la signification des souhaits de mort inconsciente. » . « après la mort de l'un de nous deux, je viendrait habiter Paris. » .

S'il est facile.. de reconnaître Eros sous ses multiples détours, il demeure plus compliqué de détecter les racines de la pulsion de mort. La haine est comprise comme un sentiment frayant le chemin à la pulsion de mort. Or il est très clairement exprimé dans ce texte (Moi et le ça) que la haine précède l'amour. .. précisions sur ce qu'il entend par  « organisation prégénitale », en opposant le primat du phallus au primat du génital ; pour lui le complexe de castration ne peut se fonder que sur un état préalable et indispensable de primat du phallus. .. C'est de la rivalité phallique- narcissique dont il va s'agir maintenant avant qu'intervienne la génitalisation oedipienne et les fantasmes d'inceste et de castration. P.101

.du  ça, c'est-à-dire du réservoir.. des pulsions ; du fond de ce réservoir on risque en effet de trouver la source énergétique première, l'instinct fondamental .

3.2. La notion de « pulsion »

. la notion de  « pulsion » comme un concept limite entre le psychisme et le somatique P.187.. il existe pour Freud deux types de Reize selon l'origine interne ou externe des excitations, utilisant respectivement les systèmes  « psi » et  « phi » de neurones, cependant qu'un troisième système, le système « oméga » est chargé de transformer une énergie quantitative en énergie qualitative. C'est le système « oméga » qui va contribuer à donner au Moi la possibilité de constituer une « réalité psychique » en fixant une téléologie objectale (qualitative) au dynamisme brutal des perceptions reçues selon les systèmes. une intégration mentale progressive des excitations primitives doit s'effectuer dans un sens élaboratif déterminé. .. la théorie de la libido semble s'établir autour d'un concept de pulsion prvilégiée mais spécifique (contrairement à l'unicité non spécifique propre proposée par Jung) ; le dynamisme quantitatif indifférencié. correspondrait d'avantage à la notion.. d' « instinct ».

L'intégration instinctuelle primitive. apportent. tout leur potentiel énergétique. ..

. l'existence d'un dynamisme indifférencié (qu'il semble préférable de définir comme « instinctuel »).

3.3. Le Bemachtigungstrieb

. Freud avait parlé d'une cruauté instinctuelle primitive présente tout autant chez le petit enfant que chez l'homme sauvage (l'homme tout court !); .. sans coloration affective de haine ou d'amour. Freud nous décrit cette cruauté comme intimement unie par la suite à la libido, mais il la situe d'abord comme indépendante de l'activité sexuelle et centrée sur un besoin de possession qui ne tient aucun compte encore la douleur d'autrui ; la pitié ou la haine ne se développeront que plus tardivement.

.. on ne peut comprendre certains symptômes morbides sans tenir compte de cet instinct de cruauté.. qu'il relie aux pulsions partielles consistant à dénuder l'autre ou à être dénudé par lui, de même qu'il rapproche plus loin ce même instinct de cruauté des activités partielles prégénitales de mode cannibalisme d'une part, et agressif- anal de l'autre.

. il est essentiel de distinguer ce caractère qualitatif de la libido du caractère quantitatif de « l'énergie qu'il faut supposer à la base de tous les processus psychiques » .. La libido n'utiliserait que la part intégrée.. de cette énergie instinctuelle primitive de base. Une telle intégration s'effectuerait progressivement en fonction des inductions amoureuses environnementales, et maternelles en particulier. (par l'éros en général.. rejoint la tradition de la guérison par l'amour). P.189

.

. « instinct animal ».  .. cette tendance, doit s'unir plus tard à la sexualité, son but original et premier demeure une nécessité de dominer l'objet par la force.P.191 « .. le mouvement de cruauté.. provient de la pulsion d' emprise ».(cf. rêves d'analité) .. époque où la génitalité n'est pas encore à même de jouer le rôle que nous lui connaissons par la suite.

L'instinct de type « animal »

. distinguer les notions de pulsion et d'instinct. . déterminer ce qui chez l'homme constituerait une structure innée analogue à l'instinct des animaux. . l'existence de formations psychiques primitives qui constitueraient le noyau de l'inconscient, c'est-à-dire l'inconscient primaire, correspondant justement à l'ancrage des chaînes associatives.

. explications au niveau imaginaire à certaines angoisses primitives dans une attitude congénitale de préparation à la lutte, analogue à ce qui apparaît comme particulièrement développé chez les animaux. Il existerait chez le tout jeune enfant des exigences instinctuelles allant exactement dans le même sens.

. grande variété dans les modes de satisfaction pulsionnelle alors que le mode de satisfaction instinctuelle apparaît beaucoup moins objectalisé et comme beaucoup moins variable en raison justement de sa primitivité, de son archaïsme imaginaire et de son peu d'élaboration. Un second caractère distinctif apparaît dans le rôle joué par l'objet dans la problématique instinctuelle d'un côté et dans la problématique pulsionnelle de l'autre. .. l'objet instinctuelle bénéficie d'un statut beaucoup plus réduit, beaucoup plus flou, beaucoup moins spécifique que l'objet pulsionnel. Dans le premier cas l'élaboration du statut de l'objet interne se trouve beaucoup moins poussée. L'objet de l'instinct violent primitif demeure assez indifférencié alors que l'objet de la pulsion libidinale.. correspond toujours à une représentation interne déterminée par sa signification conflictuelle originale.

. l'objet instinctuel se limite à un statut  «objectif » alors que l'objet pulsionnel atteint un statut.. « objectal ». .. le sort de l'objet visé par la violence fondamentale. . le statut de l'objet de l'instinct violent demeurait à la fois un statut d'authenticité et un statut d'imprécision. Il s'agirait non seulement d'une imprécision portant sur l'identité secondaire donc génitale de l'objet (pas encore de précision sur la différence anatomique entre les sexes) mais d'une imprécision encore plus grande, portant sur une sorte d'absence d'établissement complet de l'identité primaire de cet objet.

Ce besoin de penser, .. en termes de dialectique binaire : « zéro ou un », c'est-à-dire « moi ou rien », « l'autre ou moi », rapproche l'autre du statut zéro. P.193 Un seul a le droit de survivre au niveau des instincts d'autoconservation. « L'autre » existe certes dans une position objective mais la violence seule, quand elle n'est pas déjà à l'Eros, ne confère pas à l'objet un authentique statut « objectal » c'est-à-dire triangulaire, oedipien, névrotique.

3.5. L 'étayage pulsionnel

.un mode de relation d'objet qui correspond à une dépendance existant entre l'objet et le sujet (et probablement dans les deux sens).la libido s'appuie sur l'énergie apportée par ce qu'il appelle alors les pulsions d'autoconservation. . prise en compte libidinale par le sujet de l'objet ancien visé par la tendance à l'autoconservation, c'est-à-dire un objet archaïque avec lequel les liens !es plus ambigus continuent à se voir entretenus dans une dépendance réciproque de nature narcissique certes, mais qui conserve encore des traces non intégrées des tendances destructives et des angoisses de destruction archaïques non reprises encore dans des mouvements réellement sadiques ou masochistes. (chercher l'instinct animal fondamental face au sado maso ?)

.schéma en trois étapes où.. 1a libido se voit opposée à une autre « pulsion »  conçue dans une dynamique à la fois antagoniste et synchrone. On oppose successivement la libido aux « pulsions » de conservation, aux « pulsions » du Moi, puis à la « pulsion » de mort.

.

.. la « pulsion du Moi » se situant, à quelques différences topiques près, dans le même cadre essentiellement défensif que les « pulsions » d'autoconservation. (cf. rêve omniscience) C' est dans ce cadre même, et à son origine, dès les premiers moments de la vie, que je situe l'instinct de violence dont Freud me semble avoir décrit les manifestations plus tardives sous la forme de « pulsions » de conservation ou de « pulsions » du Moi. Le dynamisme de tout ce groupe instinctuel archaïque constituerait la base dynamique alors mal différenciée objectalement sur laquelle s'établirait l'étayage de la libido, qui.. y puiserait largement (sinon totalement) l'énergie propre à sa vectorisation téléologique tout à fait spécifique, en direction de l'objectalité authentique, de l'échange amoureux et de la créativité.

. « Un mouvement qui dévie l'instinct, qui métaphorise son but, qui déplace et intériorise son objet, qui concentre enfin sa source sur une zone ». avant l'étayage, « le premier temps actif dirigé vers l'objet extérieur (.) désigné par Freud comme sadique de façon impropre ou par extension » n'est qu'un temps non sexuel chargé de violence et de potentiel destructeur : la sexualisation.. n'apparaîtrait qu'avec le retournement ultérieur, donc avec le masochisme, « de sorte que, dans le champ de la sexualité, le masochisme est considéré comme « primaire » et P.195 il n'est pas question, au sujet de la violence primitive, d'une satisfaction éprouvée à infliger une douleur à l'objet.

. quand une partie de la violence ne se trouve pas intégrée dans le mouvement élaboratif de libidinisation . ..L' excès de violence dans l'alliage(violence et libido) conduit à la réaction psychotique et l'insuffisance d'intégration de la violence d'autre part ne permet pas l'élaboration libidinale, le sujet se voyant limité au registre des inhibitions.

3.6.La « pulsion de mort » chez Freud

.La libido devient « pulsion de vie » alors qu'on pouvait considérer jusque-là que le groupe des « pulsions » de conservation et du Moi dans leur dynamisme violent défensif, étaient avant tout placées au service du maintien de la vie. Le clivage pulsionnel est situé à un tout autre niveau puisqu'« au-delà » d'un certain plaisir existe la mort.

On oppose donc à cette nouvelle forme libidinale appelée « Pulsion de vie », une « Pulsion de mort » .. plusieurs sens..  liés à la compulsion de répétition jusqu'à un sens nettement extramétapsychologique. Il ne saurait être question de confondre cette « pulsion de mort » avec le dynamisme violent fondamental qui n'a comme but premier que la survie et nullement la mort. L'acte qui consiste à tuer l'objet et découlant éventuellement de la violence fondamentale ne se présente que comme une obligation secondaire (dans tous les sens du terme) de la nécessité de survie.

. Freud.. récuse alors l'opinion de C.G. Jung considérant la libido elle-même comme « énergie instinctive en général » . on ne peut « négliger d'accorder la place qu'elles méritent dans l'interprétation des phénomènes de la vie ».. à des formes de violence « non érotisées », qui représentaient une « tendance native (..) à la cruauté ». Freud évoque ici l'image de la violence de Dieu judéo-chrétien et de la transformation en diable d'une partie de cette violence afin de disculper Dieu et de l'exempter secondairement d'une tendance cruelle naturelle chez les hommes lancés à la conquête de leur place dans le monde. (Job)

.importance des capacités de symbolisation et de sublimation de l'enfant au cours de la constante modification qualitative apportée par la spécificité libiditalc sur le dynamisme instinctuel quantitativement plus « brut » .

.. rapports entre les origines somatiques et l'élaboration psychique de tout dynamisme qu'il soit dit « instinctuel » ou « pulsionnel ». (Cf. R.A.A) P.197

3. 7. La violence prégénitale chez K. Abraham

. doutes sur le sens profond de l'angoisses primitives de l'enfant ; leur nature ne peuvent être purement sexuelle. représentations de la divinité du feu correspondant au fonctionnement violent imaginaire de « l'époque préhistorique du sujet ». rapports existant entre les dynamismes destinés à protéger la survie de l'individu (violence) et ceux destinés à la survie de l'espèce, (sexualité) les seconds devant parvenir à subordonner les premiers à leur « principe supérieur ».

. rôle joué par le refoulement et le contre-investissement des composantes « cruelles » exercées à l'égard de la mère et le souhait de mort dirigée contre elle. .. caractère purement « égoïste » des premiers mouvements instinctuels de l'enfant, empreints de « souhaits de mort », retournés secondairement en exaltation de la maternité. .. Sergantini.. ayant développé le fantasme de ne pouvoir survivre qu'après avoir soustrait à sa mère les forces vitales de celle-ci. Cette position imaginaire primaire se rencontrerait, de façon très fréquente chez les névrosés tant à l'égard de la mère qu'à l'égard du père. L'amour filial prendrait ses premières racines sur un besoin de « contrepoids destiné à compenser les élans infantiles hostiles ou cruels » .. résultats créatifs de la sublimation des représentations liées aux primitifs désirs de mort, à côté du « premier amour ». Mère, père, patrie et nature sont considérés comme formant un tout aux origines violentes de la vie imaginaire et le premier moment de recul par rapport à cette violence se manifesterait dans une « tendance à la mélancolie ».. avant-goût de la fameuse position « dépressive » kleinienne. . conception articulant « vie et mort » dans l'intégration élaborative des forces de la seconde au sein du sens de la première. . racines économiques premières des états dépressifs et mélancoliques, en liaison en particulier avec la réalisation (imaginaire) des souhaits de voir disparaître les parents. (lien avec la déprime, anorexie, maladie de Marie à 4 ans, la mort de grandMinou et le désir de mort de la mère ?). la  « violence » de tels affects est surtout dirigée vers la mère .

.. un stade instinctuel primitif où «aucune inhibition ne freine la destruction des objets » ; « l'égoïsme est le seul maître » à ce stade ; n'existe que la différence entre ce qui profite ou ne profite pas à la vue du sujet. Tout objet est soupçonné de vouloir prendre la place du sujet. Tous les objets (père, mère ou étranger) seraient alors équivalents. Il s'agit seulement d'exercer sur ces objets une maîtrise protectrice. C'est sur ce besoin de toute-puissance narcissique que peut s'étayer le développement de la sexualité infantile et de l'évolution oedipienne. ..évolution de la vie mentale.. analyser radicalement les déterminantes instinctuelles primitives.

L'angoisse primitive devant la représentation de la mère infanticide est particulièrement évoquée dans l'article sur « l'araignée »  les contre- investissements des fantasmes parenticides sont abordés dans le travail sur « sauvetage et meurtre du père ».. P.199

.névroses de guerre .. sur le dilemme essentiellement narcissique entre « mourir ou tuer », à un niveau « où la zone génitale a perdu sa primauté » ; .. doutes sur 1'innocence des rêves de mort des parents : si ces rêves ne consistaient qu'en un retournement de la sollicitude, pourquoi s'accompagneraient-ils d'un tel sentiment de culpabilité chez leurs auteurs ?(rêve de Magali et arrêt de ses études) L'enfant sera dominé, au début de la vie, par des instincts violents amoraux visant la destruction des objets qui menacent sa vie. Les gros animaux prennent souvent chez le petit enfant la place des parents inquiétants. (CF. rêves) (occultation du pole parenticide ?)

.. certains aspects de la période  « orale », situ(e)ant la tendance « à mordre » à un stade primitif où, aucune inhibition ne freine la destruction des objets ». L'organisation orale est considérée selon le modèle cannibalique, qui vise non seulement l'incorporation de l'objet mais, de façon plus primitive encore, sa destruction.

.rapproche(er) les fantasmes de cette époque et les délires de métamorphose en un animal sauvage qui dévore les hommes. On peut, de même, dans de tels mouvements imaginaires, voir une identification à l'agresseur dont le modèle le plus courant est le loup-garou ; ce loup-garou représenterait tout aussi bien l'enfant qui lutte pour sa vie que l'un et l'autre des parents, sans qu'il existe encore de différenciation sexuelle assez nette. (sens de la culotte dans le rêve avec le loup ?)

.. la tendance violente comme une pulsion partielle aspirant à la destruction ou à la domination de l'objet, la seconde attitude opérant lorsque la première a pu être dépassée. Les tendances violentes, destinées à écarter et à détruire l'objet se trouvent réactivées dans diverses conditions cliniques. La relation de l'individu au monde objectal subirait un radical renversement au moment où la tendance à conserver l'objet va l'emporter sur la violence destructrice ; ce serait à ce moment seulement qu'on pourrait parler d'amour objectal. (cf. rêve de la tour du 1-1-01)

..l'intégration des tendances violentes primitives est directement possible, sans le recours au refoulement, comme cela se produit avec le sadisme anal. Du même coup, il ne paraît pas nécessaire de procéder à une transformation en traits de caractère réactionnels ou sublimatoires comme cela se produit à partir des composantes anales. . le renforcement des traits de caractère sadiques anaux s'effectue dès que la violence primitive a été contrariée dans son intégration, ce qui fait que le caractère tout entier demeure soumis à l'influence de la négociation de la violence primitive. (cf. Vincent D.M.) Les différences les plus significatives constatées entre les individus, au niveau du caractère, se déduiraient de la date (précoce ou non) où les tendances violentes auraient pu être récupérées par la libido. La notion de « sadisme oral », très controversée par Freud, ne peut.. être placée en parallèle absolu avec le concept .. de « sadisme anal » où il est vraiment question de récupération par les tendances violentes fondamentales d'une partie de l'érotisme imaginaire latent, non assez efficient encore pour procéder au mouvement intégratif inverse (récupération de la violence par la libido). (cf. ibidem)

3.8. L'erreur de A. Adler et la prudence de M. Klein

. P.201

M. Klein a situé l'apogée des poussées imaginaires violentes au stade le plus primitif du développement affectif, le « stade cannibalique». Le stade anal classique demeurerait celui d'un « sadisme » plus élaboré.

Toutes les représentations parentales (ou grand-parentales) sont l'objet, dans les conceptions de M. Klein, de dynamismes imaginaires violents.

. l'attaque primaire de l'objet n'est pas « délibérément cruelle » : il existe, dès l'origine, un dynamisme de vie lié à la poussée violente de l'imaginaire infantile. .. ce qu'on appelle alors « agressivité » ne peut être réduit à un élan destructeur ; le but essentiel demeure celui de vivre en cherchant seulement à obtenir  « la plus grande sécurité possible. » . « instinct d'agression » est avant tout destiné à  « se défendre ». (cf. l'ours dans Neige-Blanche et Rose-Rouge) Ces formations instinctuelles constituent un élément « primitif et fondamental » purement « égoïste ». Le rôle d'un tel instinct demeure « considérable dans la lutte pour l'existence ». .cette poussée instinctuelle archaïque se réveille chez des sujets adultes dont les moyens d'existence sont considérés comme menacés. .Pourquoi avons-nous tant besoin, à . opérer une aussi vive dénégation de cette violence première ? Avons-nous tellement peur de la voir surgir à nouveau ? De ne pouvoir la maîtriser ? (ce qui tiendrait à un souci quantitatif) ou bien, plus simplement, est-ce l'aspect qualitatif, l'identité même des protagonistes initiaux qui nous inspire une telle angoisse ? .

Les premiers mouvements violents tournés vers l'objet dépendent, selon M. Klein d'un vif sentiment de persécution qu'il s'agit de maîtriser ; cet effort de maîtrise se trouve favorisé ou entravé par les réponses environnementales .. essentiellement aux attitudes maternelles, sans prendre en compte peut-être de façon plus précise, dans quelle mesure la mère constitue à la fois un personnage symbolique plus général de la puissance phallique-narcissique adulte (donc écho de la socio-culture) et un personnage-relais de ses données affectives originales et acquises (écho de ses propres relations familiales).

.. toujours représenter en parallèle chez le tout jeune enfant une attitude violente à l'égard des diverses cibles parentales rencontrées et une angoisse d'être attaqué par ces mêmes représentations parentales. . P.203

« plus le Moi parvient à intégrer les pulsions destructrices, plus il s'enrichit ». (Cf. ombre chez Jung) Cette intégration dépendrait du degré de prépondérance accordée à la pulsion de vie c'est-à-dire, en fin de compte, à l'acceptation de l'énergie apportée par les formations instinctuelles violentes (.. que  M. Klein continue à dénommer « pulsions de mort »).

..

Pour une théorie de la violence

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. Avant que l'enfant puisse accepter de reconnaître ses objets comme vraiment  « autres » et coexistants dans une ambivalence incluant la frustration, il devra se dérouler un processus long et compliqué.

.. on retrouve toujours, à un moment ou à un autre de la cure psychanalytique, le réveil, plus ou moins pur, de ce « pôle de passion aveugle sur lequel la vertu scientifique fait silence ». (A. Green) . mise en scène des actes de vengeance, des orages passionnels avec leurs avalanches de conséquences. .. violence des affects .. hurlements concernant les angoisses d'anéantissement et le besoin narcissique fondamental de survie du Moi seul. P.207

. « dynamismes narcissiques où aucune différenciation n'est possible entre Moi et objet, là où amour et destructivité affectent d'un même souffle le Moi et l'objet ». cette part  « psychotique » de la personnalité conjurable seulement par l'investissement érotique ou cette angoisse d'intrusion . « Sommes-nous si éloignés, ..de la Violence fondamentale ? ».

.l'apparition, au cours de la cure, d'un épisode de rage narcissique peut être utilisé dans le sens d'un progrès dans le travail analytique. Seul serait à redouter le passage à l'acte agressif dans le comportement, dans la mesure où la négociation imaginaire s'avèrerait irréalisable. . P.209 XXX

4.2. Points de vue parallèles

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.. repères différentiels.. pour distinguer « violence » et « agressivité ».

1)L'agressivité concerne un objet défini au registre de l'identification secondaire ; il s'agit donc d'un objet sexuel et oedipien, même quand ce caractère se trouve sensiblement oblitéré par les différents systèmes défensifs mis en jeu. La violence fondamentale se centre au contraire sur un effort d'édification d'une identité primaire narcissique dont le principal « objet » demeure le sujet lui-même, l'objet  « extérieur » n'étant encore qu'en cour d'individualisation ; le statut et le sort de l'objet extérieur ne revêtent qu'une importance secondaire dans la démarche violente primitive.

2) L'agressivité vise à nuire de façon très spécifique à l'objet, éventuellement à le détruire, surtout à le faire souffrir. La violence fondamentale, quant à elle, s'intéresse avant tout au sujet, à sa conservation. Le sort réservé par voie de conséquence à l'objet demeure assez indifférent au sujet.

3)L'agressivité est envisagée, dans l'optique freudienne, avant tout comme concernant les aléas de l'union et de la désunion des pulsions amoureuses avec les tendances hostiles. Il s'agit somme toute de voir dans 1'agressivité ainsi définie une des composantes de 1'ambivalence affective. La violence fondamentale en revanche ne peut prendre encore en compte une quelconque ambivalence affective ; elle ne saurait connoter ni l'amour, ni son renversement en haine ; elle se situe dans une démarche imaginaire préambivalente, de l'ordre des fantasmes primitifs, les premiers à se voir réactivés dans la relation à l'environnement.  

4).. l'agressivité (sous ses différentes formes) est considérée.. comme découlant de la pulsion de mort, alors que la violence fondamentale, telle que je la conçois, demeure du cadre élémentaire et narcissique des instincts de vie, dans leur sens prégénital ne mettant pas en question encore un quelconque instinct de reproduction.

5)L'agressivité ne peut être saisie.. dans son articula- ? ? ? La violence fondamentale est envisagée comme assurant, au contraire, un étayage dynamique au profit de la sexualité..

6) L'agressivité peut être considérée comme récupérant sous son primat et à son profit des éléments libidinaux. Or la violence fondamentale perd logiquement son primat archaïque dans une intégration sous le primat de la libido et dans le cadre des modifications relationnelles qui accompagnent la mise en activité normale des inscriptions imaginaires oedipiennes.

.rapports existant entre la « violence fondamentale » et 1'« ambivalence affective ». Telle que Freud l'a définie, l'ambivalence consiste en une capacité d'aimer et de haïr en même temps un même objet. . différence de niveau qui existe entre 1'ambivalence affective et la notion de violence primitive, non sexualisée encore, et ne comportant ni connotation de haine ni connotation d'amour.

Violence fondamentale semble trouver sa place du côté du groupe de « pulsions » dites d'autoconservation P.217mais sans se voir rangée pour autant parmi les antagonistes des pulsions sexuelles, le « dualisme » pulsionnel devenant ainsi.. diachronique et non plus synchronique, du fait de l'hypothèse de l'étayage.

l'ambivalence concerne un objet vraiment constitué  parfaitement identifié en échos à des identifications primaires et secondaires bien établies, alors que la violence s'adresse à un objet encore bien moins spécifiquement défini : au niveau de la violence il n'est point besoin de refouler un autre aspect de la relation très élémentaire vécu au niveau archaïque et il n'est point besoin non plus de la justification ou du concours apportés par une quelconque formation réactionnelle, comme on le constate dans le cadre de 1'ambivalence affective.

. importance des conditions d'intégration du dynamisme violent pour la constitution d'un narcissisme primaire suffisant conditionnant lui-même la solidité de la relation objectale. .

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5.Essai de synthèse

.insister sur la continuité de tous les mécanismes psychiques, leur progressivité, la lente secondarisation des processus mentaux au cours des crises successivement traversées dans la toute petite enfance, puis à l'étape oedipienne, et enfin au cours des radicales et totales remises en question de la période d'adolescence. (faite à 40 ans)

. problèmes posés par l'intégration, au registre oedipien, de la violence fondamentale.. conditions imaginaires de passage des processus primaires aux processus secondaire. (la V. F.)  en amont de l'organisation imaginaire du fantasme de castration. montrer comment les angoisses originelles liées à la violence primitive se trouvent intégrées au sein de l'angoisse ultérieure de castration.

. le rôle et le sort de la violence fondamentale au sein du double mouvement simultané de pare-excitation P.221 contre le développement isolé des fantasmes violents, et d'excitation (c'est-à-dire de mise en efficience) de l'imaginaire libidinal intégratif qui doit s'opérer .. à partir des modèles fantasmatiques environnemantaux.

..un nourrisson qu'il n'est plus question de considérer comme tabula rasa affective, ni même comme un simple récepteur passif, mais dont les recherches contemporaines ont mis en évidence le rôle de récepteur créatif et de véritable émetteur aussi de messages adressés à l'imaginaire parentale. Les premières proto-représentations objectales ne peuvent concerner exclusivement, ni d'emblée, un objet sexuel ou sexuellement rival ; le premier objet est fondamentalement rival au sens narcissique le plus primitif ; impose la loi du « lui ou moi ». C'est la vie même qui est en question et non encore l'amour.

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L'hypothèse centrale.. postule l'existence d'une violence fondamentale considérée comme un « instinct » de type animal et non comme une « pulsion » au statut économique et relationnel plus élaboré. rapports existant entre la violence instinctuelle primitive.. et le mode archaïque de fonctionnement mental qu'on considère classiquement comme celui où dominent les processus primaire.

.. rôle avant tout vectoriel de l'aspect économique de la libido. Le dynamisme fondamental serait donc, à mon sens, d'ordre violent. L'évolution affective heureuse placerait ce dynamisme violent au service de la libido dans un mouvement intégratif d'étayage de la libido sur l'instinct violent qui mettrait ainsi en valeur les fonctions de liaison, d'unification, d'objectalisation et la capacité d'organiser les échanges conduisant au plaisir, qui ont été, à toutes les époques de ses élaborations, les fonctions.. attribuer avant tout à la libido.

.la relation existant entre violence primaire et libido perd tout aspect originellement antagoniste, du fait qu'il ne s'agit plus que d'une différence qualitative concernant l'entrée en jeu (ou non) de l'originalité objectale. La relation entre violence et libido ne représente plus a priori un antagonisme synchronique.. articulation de deux conflits successifs, d'une part, le conflit violent limité à une lutte pour la vie avec le proto-objet, d'autre part, le conflit libidinal opposant le désir sexuel et tout ce qui peut aller à l'encontre d'un tel désir, c'est-à-dire opposant ]es forces d'intégration et de liaison aux forces de déliaison et de désintégration.

..notion de « conflit psychique » et le conflit archaïque . un conflit entre deux antagonismes pulsionnels de même génération mais plutôt un conflit créé entre deux générations de conflits, les conflits violents et les conflits œdipiens.

structure la plus profonde du mythe d'Oedipe, que présenter un conflit entre parents et enfant, plutôt.. qu'un conflit entre frères comme ce conflit est représenté dans la suite de l'histoire des enfants d'Œdipe.

La clinique nous montre que le conflit avec les frères, qu'il se manifeste comme d'ordre individuel ou d'ordre collectif, ne peut être conçu, dans son essence ou dans sa chronologie, comme d'ordre ni primaire, ni primitif. Le conflit avec les frères .. résulte d'un déplacement de la querelle avec les parents d'un point de vue descriptif, et du point de vue de l'économie imaginaire profonde, il succède à une réactivation et chez l'enfant et chez les parents des représentations liées à l'instinct violent fondamental, à l'occasion de la naissance d'un nouvel enfant, naissance entrant logiquement dans une prob i