LE SACRIFICE fondateur de civilisation et d'individuation Pierre Solié

PREMIERE PARTIE Sacrifices où la victime sacrificielle était dévorée en entier

I. L'orgiasme, l'orgasme, la possession

L'ORGIASME ET L'ORGASME. L'INCESTE ET L'UN. L'AMOUR PASSION.

Notre humaine condition est une tragédie sacrificielle. . Devoir détruire la vie. pour vivre ! Devoir tuer le « prochain » et même le « proche » pour survivre. Devoir le détruire et devoir le tuer. tout en l'aimant ! « Car l'amour et la mort est une même chose » (Ronsard, « A. Hélène » ).
Devoir se détruire tout en s'aimant. .. Tel est le chour tragique. ..
C'est que chaque pulsion - et compulsion - humaine porte en elle-même sa propre inhibition - et même compassion. Elle est à elle-même auto régulatrice, et porte en sa démesure (hubris) l'amorce de son propre renversement (inversion-réversion) et de sa métamorphose en son contraire. A tout instant l'esclave peut devenir le maître et le maître l'esclave. .
. à l'ouvre la pulsion orale déchaînée dans les phénomènes de diasparagmos ( dévorer la chair crue à même la victime vivante) et d'ômophagie (boire son sang chaud) du cannibalisme primaire ( « sauvage » ) P.41 passer peu à peu au cannibalisme rituel ( « civilisé » ) qui atteindra, dans la transsubstantiation du sacrifice de Jésus, un sommet de métamorphose spirituelle absolument exemplaire.
Ce sera là l'ouvre de l'orgiasme c'est-à-dire de l'affect « érotique » oral ( cannibale ), que nous ne pourrons pas radicalement dissocier de l'affect « érotique » anal (esclavagiste) qui n'en est qu'un sous-produit.. pas plus que de l'affect « érotique » génital (possessif) qui, de son côté, inaugure l'assomption d'un sujet individuel dans ce qui n'était jusque-là que collectif. Au niveau génital l'orgiasme ( « prégénital » ) se muera en orgasme.
Le sacrifice se centrera donc sur le noyau sacrificiel originel : l'endocannibalisme « diasparagmique » et « ômophagique» (orgiasmique) et l'endogamie (orgasmique). (Il n'est d'orgiasme, d'orgasme et donc de jouissance qu'incestueux. Ceci est à savoir aussi, qu'on ne jouit que de l'UN - même si c'est dans l' AUTRE !)
. l'orgiasme .. est le cour même du sacrifice. .. le versant « pulsionnel » de la pulsion orale cannibalique : « Tu devras tuer pour vivre ! » inclut - implicitement du moins - son versant « spirituel » : « Et pourtant tu ne tueras point ! » (Double bind, double impasse, double contrainte. nouvelle étiologie (cause) de la schizophrénie. Elle est d'autant plus vraie qu'elle n'est que l'amplification d'un phénomène naturel : la mutation sapiens-sapiens. ..) A la fois le « Tu ne tueras point ! » de l'interdit social (le « surmoi » de Freud), et celui de l'interdit individuel - et même collectif, mais inhérent à la pulsion elle-même - dicté par le « Je t'aime ! » (l' « idéal du moi » de Freud) et le « Je m'aime ! » (le « moi-idéal » de Freud).
Même si ce « Je t'aime ! » passe par le « Je m'aime en toi ! » implicite ; ou le : « Je t'aime parce que tu m'aimes ! » Ce « Je t'aime ! » institue le versant « spirituel » - opposé au « pulsionnel » - de la pulsion, ici orale cannibale. « Je t'aime tant que je te mange ! » . « Je t'aime tant que de toi je fais moi ; moi radicalement et absolument ! Je t'aime donc d'un amour radical et absolu », qui est l'amour oral cannibale. « Hors de moi tu n'existes pas ; comme hors de toi je n'existe pas ! . » Qui, le premier, à l'autre, portera le coup de dent mortel ? Qui survivra ? Et l'un survivra-t-il à l'autre ? » 0 sadisme ! 0 masochisme ! qui, très tôt, viennent « adoucir » . pour pouvoir les supporter, tout simplement, ces sauvages relations dentées. qui te mor/cellent et me mor/cellent à l'envi.. qui te brûlent et me brûlent au feu de l'amour le plus ar/dent qui se puisse concevoir . Pour en moins souffrir, prenons le parti d'en jouir. Et pour les mieux nourrir, le parti d'en mourir. « Car je meurs de ne pas mourir » (Saint Jean de la Croix). .
L'orgiasme (l'orgie dans la possession) . le nombre de femmes dépasse généralement celui hommes, en ces rituels orgiasmiques. L'éros, .. 1'« érogène », est .. davantage le propre de la femme et du féminin de l'homme (mâle) que de l'homme et du masculin de la femme.
L'orgie, l'orgiasme et l'orgasme sont un retour à la Mère Nature édénique (cf. club échangistes) .. originelle. Un retour à la béatitude inconsciente, innocente et béate de l'Age d'or, . P.43
Retour au temps du mythe qui est éternité, immortalité, dans l'omnijouissance (orgiasmique, orgasmique), dans l'omniprésence (ubiquité), dans l'omnipotence et dans l'omniscience. Retour à l'Un. en lequel tout se fond et se confond. et se mor/fond ! Lieu suprême de la béatitude et de la jouissance comme aussi des tortures et des pires souffrances : Ciel et Enfer réunis en un même lieu - sans lieu : atopique ( et utopique) ; en un même temps - sans temps : achronique ( et anachronique.)
Ce lieu, diasparagmique et hiérogamique, où se mêlent endocannibalisme et endogamie (l'Un retrouvé) est à la fois le lieu où ils tentent désespérément de se démêler : le lieu sacrificiel ! Notre chiasma (cf. p.19).
Autrement dit, fusion confusion (endocannibalisme et endogamie), séparation (sacrificielle de disjonction) et conjonction (sacrificielle de reliaison), sont le trépied du sacrifice.
. cf. Joël.. lorsque la séparation ne peut se faire par voie sacrificielle substituée (exo-sacrificielle) : sur un autre homme, un animal, un végétal, un minéral ; ou par voie auto-sacrificielle (endosacrifice) qui ne parviendra pas, en ce cas catastrophique, à séparer l'Imaginaire préréflexif de sa « réalité physique » (son corps et son sang) pour la transformer en Imaginal transréflexif (corps et sang de « Résurrection ») allant se relier à sa « réalité psychique » fondamentale .
La voie sacrificielle substituée (exosacrifice) renvoie aux « processus primaires » de l'inconscient décrits par Freud : figuration (mise en image ), dramatisation (par affect et érotisation), condensation ( de plusieurs images « affectées » en une seule ), déplacement (d'une de ces images sur une autre à l'intérieur de la psyché ou à l'extérieur : projection). Ce processus joue un rôle important dans le « refoulement » ou, si l'on préfère, dans l'évolution du sacrifice vers l'endosacrifice, autosacrificiel.
.distinguer :
1. Un endosacrifice mutilant - ou mortel ! - dans la psychopathologie en rapport avec une fixation incestueuse (endocannibale ou endogame) trop archaïque et donc trop prégnante. Par rapport à celui-ci, l'exosacrifice (de l' « autre » ) est un progrès.
2. Un endosacrifice qui va au-delà de cet exosacrifice : Retourner à l'Un est aussi retour au Chaos, à l'indifférencié, à l'anarchie, au vide .. à l'abîme, à l'impersonnel, à la confusion, à l'Enfer, en un mot, corrélatif du Ciel paradisiaque. Néanmoins, en cette indifférenciation anarchique, tout est redevenu possible, comme dans l'ouf embryonnaire commençant sa nidation .
Comment donc, l'éros, l'érogène, l'orgiasme, l'orgasme. ne seraient-ils pas d'abord l'apanage de la femme - et du féminin en général ? (Y compris .. celui de l'homme (mâle) (anima) : (son « complémentaire » ), fondant le versant homosexuel inévitable de toute relation amoureuse.) . la « Mère nature » « sauvage ».
.. dès lors, ce qui va tenter de les limiter, de les différencier, de les hiérarchiser, de les ordonner, de les étatiser en « pyramides », esclavagistes d'abord, c'est l'homme, et le masculin en général (cf. l'animus). le « Père culture » « barbare » avant de tendre à en faire des « pyramides » démocratiques . P.45
Pour ce Père« culture » - qui peut être une femme..- l'expression de l'érogène « orgiasmique » et « orgasmique » sera toujours suspecte. Non seulement suspecte, mais réglementée, balisée, ritualisée, légalisée, justement, à travers l'évolution des sacrifices .
. nous interroger sur ce registre de l'image en nous, précédant celui de la parole et de l'écrit.

LA POSSESSION.

. Mécanisme passionnel que l'on trouve encore mis en acte, de nos jours.

La folie (Lyssa) d'Héraclès possédé par Lyssa
La possession. le premier coup mortel.. porté à l'animal par le « meneur ». Le sang qui jaillira de cette première blessure sera le signal qui viendra baigner l'assemblée et la portera aussitôt en un autre monde, celui de la transe « hypnotique » ( org(i)asmique), d'où toute raison sera chassée.
.. les Grecs antiques.. la nommaient mania. . « manie » pour désigner, en psychiatrie, un état paradoxalement euphorique, ludique, mégalomane, omnipotent, omniscient, « omnijouissant », omniprésent, tous attributs de Dieu, contrastant avec un fond de « mélancolie » profonde que, justement, cet état maniaque combat, pour ne pas en mourir.
.. Héraclès.. saisi d'une possession par Lyssa (poussée par Héra, aidée par Iris) (Trois femmes - ou plutôt : trois « féminins » en lui.) . va sauvagement assassiner ses trois enfants et leur mère. P.47 .
Le héros reste exo-sacrificiel jusqu'au bout. sauf, peut-être, devant sa mort dans la tunique de Nessos. Alors il ira seul au bûcher.
.Thésée.. : « L'ami contre l'ami n'appelle point l'enfer. » .faire appel aux monstres féminins de la vengeance, les Erinyes, habitant les enfers, contre un meurtrier. Thésée eût pu lancer cet appel et, lui-même possédé, venger le meurtre. (Schéma classique de la vendetta. Noter que c'est le « meurtre des innocents» (enfants et épouse d'Héraclès) qui interrompit celle-ci. C'est là le principe du « bouc-victime-émissaire ». ) Mais à l'inverse, il rompt le cercle vicieux de la haine en invoquant le cycle de l'amitié et de l'amour. .
En notre langage psychanalytique nous dirions qu'Héraclès a été possédé par l' « ombre » de son « complémentaire féminin » - c'est-à-dire l' « ombre » de son anima) ici nommée Lyssa.
. les femmes .. dans le « ménadisme » ou les « bacchanales ». En langage psychanalytique, nous dirions qu'elles étaient possédées par l' « ombre » de leur « complémentaire masculin »» - c'est-à-dire l' « ombre »» de leur animus, ici nommée Dionysos.
L ' « ombre » (le « refoulé », le « forclos » ) du « complémentaire féminin » (anima) d'Héraclès suscitait celle de son « double masculin » : le fou meurtrier. L' « ombre » du « complémentaire masculin » (animus) des Ménades suscitait celle de leur « double féminin » : la folle meurtrière Agavé.

La folie (mania) d'Agavé possédée par Dionysos
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Et Dionysos.. de dire : « Vous avez ouvert les yeux quand il était trop tard. Alors qu'il était temps vous êtes demeurés aveugles. »
. si nous savions les taureaux, les lions et les autres panthères et tigresses qui sommeillent au fond de nous. Si nous avions su en 1933.. ou en 39 Pourtant il ne se priva pas de nous prévenir, le Dionysos de cette époque. (Mein Kampf.) Mais nous restâmes aussi aveugles que Penthée, aussi aveugles et sourds qu'Agavé.
. Penthée, à force de le dénier ( « forclore » ), se fait « posséder » par l' « ombre » de son « double masculin », son cousin Dionysos . La vengeance terrifiante de ce « double négatif » va opérer par le truchement de l' « ombre » de son « complémentaire féminin », c'est-à-dire, de sa propre mère, Agavé.
Les deux frères rivaux célestes (Apollon et Dionysos) s'affrontent en l'âme terrestre de Penthée. L'on peut donc dire qu'Apollon est la « lumière » du « double masculin » de ce dernier par rapport à Dionysos qui en est l' « ombre ». Notons que Dionysos est aussi un bâtard par rapport à son demi-frère Apollon. La rivalité fratricide commence donc aux « Cieux », si elle se poursuit et même éclate sur la Terre. C'est le drame d'Osiris et Seth,.. Rémus et Romulus,.. Castor et Pollux, ..Caïn et Abel ; celui, en général, de la rivalité « paranoïaque » (persécuteur - persécuté) des frères en conflit pour la possession de l' « importance » auprès de la mère, et de la « puissance» auprès du père. (Ce schéma, de l'importance et de la puissance, peut s'inverser..)
Son féminin à lui (son anima), en fait, se trouve encore fusionné au féminoïde éphèbe de son Dionysos (refoulé). .. en position d'homosexualité « pédérastique ». (Car il y a aussi une homosexualité « lesbienne » de l'homme (mâle).)
P.55 son « double masculin » lumineux (positif) n'apparaîtra, comme de lui que lorsque ayant « marché vers les choses terribles », il aura acquis « la gloire qui porte jusqu'au ciel ».11 lui faut subir le sacrifice total ( « diasparagrnique » et « ômohagique » ) pour que Dionysos - et non plus Apollon apparaisse dans sa gloire céleste, en lui ! M
L'on nomme .. en psychanalyse, cette fusion-confusion du masculin-féminin, une « syzygie originaire » (Jung) ou bien, chez Freud, une « scène primirive, ou bien, chez Mélanie Klein, des « parents combinés » ; avec quelques nuances d'un concept à l'autre. Leur fond commun est une Image de l'Un.

II. Quand le cannibalisme n'est plus ce qu'il était

DEUXIEME PARTIE Sacrifices où la victime sacrificielle était brûlée en entier (Holocaustes)

I. Les holocaustes grec et hébreu

FONCTIONS MÈRE ET PÈRE

Holocauste signifie, étymologiquement, « brûlé en entier » , « entièrement brûlé ». . c'est généralement avec l'avènement de la conscience.. du Père-« culture » que s'instituent ces sacrifices par crémation totale, s'opposant aux sacrifices précédents (par dévoration totale) en rapport plus direct avec la Mère-« nature ».
Mais ceci ne signifie pas, que dans les formes sacrificielles « ômophagiques ».. le Père-« nature » ne jouait aucun rôle. Il suffit de rappeler Ouranos et Kronos. Et ceci ne signifie pas plus que, .. par crémation totale, la Mère-« culture » ne jouera aucun rôle. .
.. à toute épiphanie (apparition à la conscience) d'une Image de la Mère, correspond, corrélativement, une épiphanie de l'Image du Père. (Il en est de même pour les Images de l'homme et de la femme que nous nommons « doubles» et « complémentaires ».) . la phylo-psycho-genèse (l'évolution des civilisations), reproduite brièvement par la vie d'un seul homme ( onto-psycho-génèse) P.79 nous contraint à constater un décalage d'apparition de ces images corrélatives nouvelles du Père et de la Mère. C'est la Mère qui commence puisqu'elle est - en conscience, au moins préréflexive - toujours déjà là. A l'avènement (à la conscience) du Père, la Mère va conserver son avance, prenant peu à peu.. un retard. ... retard qu'elle n'a pas encore rattrapé aujourd'hui. . le Père - et les pères - ont tout fait pour semer derrière eux leur chemin d'embûches tant ils ont . peur de cette toute-puissance de la Mère primitive, de laquelle ils ne sont pas encore totalement distincts (différenciés et a fortiori individués).
Avec l'apparition des religions du Père, l'Un primitif .. se casse. C'est le premier grand clivage du Sujet humain.. C'est la fin du Paradis terrestre, la fin de l'Âge d'or. . ne .. pas confondre.. cette fonction du Père avec « papa » qui est censé le représenter. à l'ouvre dans la mutation.. Elle est un principe de séparation - qui deviendra symbolique sacrificiel chez nous -, à l'ouvre, en nous, depuis les débuts de l'évolution de la vie, et même, à mon sens, de notre univers (fusion et fission atomiques ). . La fonction Mère est principe d'unification (vers l'Un). Elle est aussi aux origines de la vie et, à mon sens, de l'univers en son ensemble. Elle est fusion-confusion . La conjonction (On retrouve le trépied sacrificiel : fusion, séparation, conjonction.) des deux fonctions.. apparaîtra, dans les sacrifices où la victime sera partie mangée, partie brûlée, dans la convivialité des agapes terrestres en rapport direct avec les agapes mystiques des dieux. .

L'HOLOCAUSTE GREC CHEZ HOMÈRE

. tous les gestes quotidiens un tant soit peu importants étaient ritualisés et donc sacrificiels, tant ritualisation et sacrifice sont proches, sinon synonymes. L'intimité avec les dieux est partout. . les rapports aux dieux sont sacrificiels. Mais les rapports importants entre les hommes aussi, individuellement et collectivement. Et encore, les relations entre hommes et bêtes, entre hommes et choses en général.
. nous retrouvons les trois sum-bolès (symboles) : sum-bolaïon : engagement, contrat, alliance ; sum-bolè : réunion, rencontre, sum-bolon : du contrat au symbole, à l'allégorie et au signe linguistique.
. les Grecs distinguaient trois sortes de sacrifices : ceux réservés aux divinités olympiennes, célestes, où.. l'incinération, la crémation, jouaient le plus grand rôle : la fumée - et le fumet - monte vers le ciel ; ceux réservés aux divinités chthoniennes, souterraines, où.. l'enterrement et l'immersion avaient le premier rôle ; enfin ceux des religions à mystères ( d'Éleusis..) où l'on assistait à une heureuse dialectique du terrestre, du céleste et du souterrain. P.81
. cf. Homère : Patrocle et Achille.
.
En fait, l'incinération reste surtout une affaire d'hommes, là où l'enterrement est surtout affaire de femmes. Le ciel est généralement masculin ; la terre - et l'eau même - généralement féminine. Sauf exception.. chez les anciens Hébreux, l'incinération (=Schéol-Géhenne) évite le pourrissement lent, et mène directement le corps à l'ancestralité et à l'immortalisation divine : l'on y passe, en direct, de l'Imaginaire de la réalité physique, à l'Imaginal de la réalité psychique, en y affirmant ses qualités de mâle guerrier.
. Achille, qui ne pense plus qu'à rejoindre son ami Patrocle en Hadès dès qu'il l'aura vengé, se divinise déjà en incinérant de la sorte son « double masculin », et en y joignant, en sacrifice, outre les animaux, les douze guerriers troyens « magnanimes ».

L'HOLOCAUSTE HÉBREU ARCHAÏQUE : LA 'OLAH

Les textes
La 'olah (holocauste) est, chez les Hébreux anciens, la forme la plus solennelle de l'adoration de l'Éternel Jahvé.
. cf. le Lévitique.. « ..un mâle sans défaut.. c'est une 'olah (holocauste), un sacrifice par feu, une odeur agréable à l'Éternel. . ». . (gros bétail.. menu bétail.. oiseaux.. offrande de gâteau sans levain et sans miel (minchah) cru ou cuit ou fait avec les premiers fruits. .. toute la nuit jusqu'au matin. »
.
Chez les Grecs, l'holocauste demeurait un rite d'aversion ou au mieux, de conciliation ; quand chez les Hébreux, il était l'expression la plus extrême de l'adoration.

Hécatombes et potlatch aujourd'hui
Ce qu'il y a de commun.. c'est que rien, absolument rien, ne devait être mangé de ce sacrifice. L'interdit oral cannibale était ici total. Et c'est ce qui le rapproche des hécatombes et potlatch.
Chez les Diola.lors de cérémonies collectives, les sacrifices bovins sont de véritables hécatombes ( « sacrifice de cent boufs » ..) En 1979.. six cents boufs sacrifiés aux cérémonies de circoncision de Kartiak. (cf. bûcher fièvre aphteuse mars 2001)
. potlatch amérindiens, où l'hécatombe ruine familles et tribus, souvent pour plusieurs années, les condamnant à mort par disette et famine. J. Bataille parle de « part maudite » à ce propos. Comme si le trop-plein des greniers et des étables brûlait les doigts des hommes, comme si le trop-plein d'énergie de vie ( libido, éros ) conduisait à la mort (thanatos) en se retournant sur lui-même en trop-plein d'énergie destructrice, et contre les sujets que celle-ci dévore - je dis bien : « qu'elle dévore ! ».
Lors des funérailles des Diola.. l'idéal serait de sacrifier tout, absolument tout ce qui appartenait au défunt. P.87

Libido. Eros. Thanatos
. sacrifice et consommation collective restent les meilleurs moyens de résoudre les tensions et conflits, tant individuels que collectifs - s'ils sont consentis.
De là à la guerre et à ses holocaustes, il n'y a qu'un pas.. De n'être plus protégés par les sacrifices familiaux et tribaux, nous courons aux potlatch nazis, staliniens et. autres !
« Les forces qui sont en action, si elles ne se dirigent pas exactement dans le sens prescrit, échappent au sacrifiant et au prêtre et elles se retournent contre eux, terribles. »
. ce problème de la « force vitale » ( que nous nommons libido ou éros) véhiculée avec le sang, et que la plupart des ethnologues.. confondirent avec les notions de souillure et d'impur. En fait, elle montre que cette souillure et cet impur ne viennent pas de l'extérieur mais de la fuite vers l'extérieur de cette « force vitale » intérieure. A l'extérieur, cette « force » se retourne contre le sujet - individuel et/ ou collectif - pour le - ou les - détruire. Mais cette « hémorragie » de la « force vitale » est due à la rupture d'un interdit.
L'interdit (la Loi), en somme, est vécu comme un vaisseau sanguin. Si on le rompt, le sang s'écoule, jusqu'à ce que mort s'ensuive éventuellement. .
. On compense, chez les Dogons, cette « hémorragie » de « force vitale » ( « hémorragie libidinale »..) par le sang qui coule du sacrifice, et que l'on absorbe, plus ou moins « ômophagiquement ».
. ce n'est pas de faim de sang ou de viande (besoin) dont il s'agit, mais de « force vitale » ( libido, désir ; éros) amour et de Caritas et Agapè) que sont censés véhiculer le sang et la chair : « Ceci est mon corps, ceci est mon sang. » . Quand sentirons nous que ce Royaume (imaginal) n'est pas de ce monde? De ce monde physique nous aliénant en Imaginaire.

L'amour oral entre Soi et Autre
. se faire pardonner le fait de devoir manger la vie pour vivre - et survivre. Les dieux aussi avaient - et ont encore - faim ; il fallait - et il faut - les nourrir comme de vieux parents. . l'amour « oral » est la forme la plus significative de l'adoration. Lorsque nous adorons quelqu'un.. circulent toutes nos pulsions orales cannibales. Certes, sur leur versant idéal - « spirituel » - de la « Communion des Saints », de la Cène, de l'amour « cosmique », universel. Mais aussi que c'est là l'amour le plus cannibale sur son versant « pulsionnel », c'est-à-dire l'amour le plus fusionnel et confusionnel : celui dont meurent Tristan et Iseult, Roméo et Juliette et tous les amants dont la mort de l'un entraîne celle de l'autre. ce qui en dit long sur l'extrême dépendance des amants l'un par rapport à l'autre, et sur le narcissisme fondamental de ces amants. . Néanmoins, ne nous laissons pas prendre à ce mot de narcissisme pour dévaloriser définitivement cette forme d'amour. . hors de lui, il n'est pas d'amour. II est le fondement même des formes qui suivent : « anal-Caritas » et « génital-Éros». Il est surtout ce sans quoi on ne comprendra jamais le Royaume de Jésus. « Ceci est mon corps, ceci est mon sang », à travers le pain et le Vin ; et renvoyant à ce Royaume qui n'est ni dans son corps ni dans son sang ; ni dans le pain ni dans le vin, mais « ailleurs », « au-delà » de cet espace-temps - et qui fonde celui-ci ; P.89 même si Jésus le nomme celui du Père. . C'était là son problème fondamental, c'est-à-dire son manque fondamental : Marie, sa mère, l'avait conçu du Saint-Esprit du Père, en excluant radicalement Joseph, son époux terrestre. Ce que nous nommons aujourd'hui une « forclusion du Nom du Père ». C'est dans ce vide symbolique - et réel - du père que Jésus construisait l'Imaginaire de celui-ci ; et, plus tard, par son sacrifice ( Symbolique ), l'Imaginal de celui-ci.
. nous sommes tous, peu ou prou, des frères de Jésus. Le Royaume du Père, en notre monde, est encore attendu.
Les « pères » que nous avons eus jusqu'ici ne sont guère que des « exécutants » de la Mère. Des « Fils-amants » de celle-ci, à la manière d'Héraclès par rapport à Héra - dont il est la « gloire » et. la victime !
Et c'est pourquoi le « narcissisme originaire » de cet amour oral cannibale est le pire et le meilleur. Sans lui - la conscience de celui-ci, et donc son sacrifice -, pas de métamorphose de l'endo-cannibalisme et de l'endogamie en exocannibalisme et en exogamie.. pas de possible Imaginal de cette oralité cannibale, pas de narcissisme « terminaI » ( « eschatologique » que l'on nomme le Soi ou l'Un ou l'Atman ou le Brahman en .Inde - qui peut être vécu comme un « autisme » ou.. un « solipsisme », s'il reste en deçà du sacrifice oral. C'est-à-dire s'il ne s'ouvre pas à l'Être-Autre à partir de l'Être-Soi.
Et c'est pourquoi à l'oralité j'ai conjugué l'Agapè ; mais celle-ci ne survient pas, sans le sacrifice de l'oralité cannibale, originelle ; . cette Agapè demeurera généralement le petit point blanc dans le grand noir du Taï-ghi-tou taoïste : un potentiel « spirituel » dans l'actuel « pulsionnel ». .

Le rituel de la 'Olah
Le moment fort de ce rituel est celui où le sacrifiant (pas le sacrificateur) s'identifie totalement à l'animal. .
Le dépeçage (morcellement) a aussi une importance majeure, dans le chamanisme et dans nos fantasmes individuels oraux-cannibales ( « schizo-paranoïdes » ).
La lustration des entrailles et des jambes insiste sur la « digestivité » (oralité et analité) et la « génitalité ». .
Le sacrifice du premier-né, équivalant du sacrifice des prémices végétales. Les « prémices » de toutes sortes étaient dues aux dieux. Mais. les Ouranos et Kronos grecs sacrifiaient leurs enfants - par cannibalisme - avant tout parce qu'ils craignaient pour leur pouvoir et leur puissance.
Les kohen (prêtres sacrificateurs) cananéens. étaient, outre des sacrificateurs, des devins. Et c'est contre cela, entre autres, que les Hébreux s'insurgèrent. La « parole oraculaire » passa dès lors, chez eux, des prêtres aux prophètes.
Le kohanin (singulier de kohen) ne conserva le droit que d'officier au temple. Et encore, prenait-il grand soin de brûler, avec le reste de l'animal, la partie du foie qui servait.. à y lire les oracles.
On mesure là l'importance de cette séparation pour le développement de la pensée rationnelle - par rapport à l'irrationnel, porté par les prophètes.. Le temps linéaire de l'Histoire va remplacer peu à peu le temps « circulaire » de l'éternel retour du même. les deux temps vont plus ou moins cohabiter.
S'amputer de ce pouvoir oraculaire dut être pour ces prêtres .. un important sacrifice...
La peau de l'animal posa aussi un sérieux problème. À qui revenait-elle, au sacrifiant ou au sacrificateur ? .pour les Aztèques, le prêtre devait la porter quinze jours sur lui-même (une peau humaine, ici) à la recherche de celui qui voudrait bien la lui prendre - sa « croix » puante.
.. l'importance des vêtements de lin pour recueillir les cendres. .. à la fête de Yom Kippur (le Grand Pardon) .. on brûlait aussi, et entièrement, un animal sacrificiel, mais. hors de l'autel et du sanctuaire. P.93 C'est que cet animal représentait le fameux « bouc émissaire » envoyé au diable Azazel dans le désert, à la place d'un homme.
. derrière le sacrifice animal - et même en lui, à travers lui - se profile toujours le sacrifice humain fondamental .
. même s'il convient, dans la Bible, de relativiser ces chiffres, ces 'oloth devaient être de véritables hécatombes, grevant les troupeaux d'un peuple qui survivait dans la difficulté, et pour lesquelles on ne cesse, ici ou ailleurs, de s'interroger. (cf. la relation à l'argent de M.D.C.) . En renouvelant les liens d'« alliance » (sum-bolaïon) avec le sacré (l'Eternel, le Tout-Autre), l'on renouvelle aussi ceux avec les « petits autres » ( Il y a deux sens à ces « petits autres » : 1. Tout autre que moi - qui suis un « autre » pour l'autre - en tant que parcelle (créature) du « grand Autre » (Éternel) ; 2. Mon « manque à l'Unité» (Lacan) qui crée désir (de l'Autre) et que je tente de combler par des objets de toutes sortes : du plus infime gadget à la plus belle femme (ou au plus bel homme) du monde.)de la tribu ou des tribus voisines ou des cité-Etats (sum-bolé). En outre, l'exhibition périodique des richesses et leur destruction sont également un moyen de réduire les inégalités économiques et sociales, et de les nier, en dilapidant les produits d'une thésaurisation (capitalisation). Tout ceci est vrai qui réduit par là les tensions socio-économiques collectives et même individuelles. Mais le fait que les plus pauvres participaient à ces hécatombes suffit à nous dire que ces raisons socio-économiques sont insuffisantes à expliquer un phénomène de dilapidation aussi considérable. L'on en revient à l'hémorragie du « principe vital » véhiculé par le sang et qui doit être compensé par une quantité de sang équivalente, versée sacrificiellement. L'on en revient à la « part maudite » de G. Bataille, à savoir, au processus de « monstruisation - divinisation » inaugurant l'Homme. P.95

L'amour oral : l'Un entre Autre et Soi
« Cette bête est à moi, est moi ! », prononce le sacrifiant.
Je Te le sacrifie sous la forme du taureau, du bélier et de l'agneau, participant de la « réalité physique objective » à laquelle est lié mon Imaginaire « pulsionnel » ; en espérant que ce sacrifice les transmuera en ton Royaume de « réalité psychique objective » par l'Imaginal « spirituel » qui me relie à Lui. Je Te sacrifie le taureau.. objets imaginaires « pulsionnels » (0') de ma pulsion orale que, pour Toi, je prive d'eux. Je ne les mange plus en corps et en sang. Je me prive de cette nourriture physique, que je Te sacrifie. Je Te dis qu'elle est à moi et même qu'elle est moi. Je me sacrifie donc à Toi. Je te brûle en entier ce corps et ce sang, afin que de leur fumée et de leur fumet, Tu fasses, à travers le sacrifice, Corps et Sang de Résurrection. .. le dieu- Taureau, le dieu- Bélier, le dieu- Agneau : objets (0) imaginaux de métamorphose « spirituelle » (Agapè) de ma pulsion orale cannibale, dans le creuset de l'autel brûlant toute la nuit. .
J'ai faim de cette nourriture que pourtant je Te sacrifie. . Je fais là sacrifice de mon besoin (faim) à elle identifié (Imaginaire). En brûlant jusqu'au bout pour Toi cette nourriture vitale, les objets « pulsionnels » de mon besoin (faim) deviennent objets de désir (amour), détachés de l'objet physique concret (taureau, bélier, agneau) qui les incluait en les confondant jusque-là. Les objets de désir libérés des objets physiques concrets ( que désormais je perçois et engramme en moi.) existent.. en eux-mêmes. Ces objets de désir (dieu- Taureau ..) sont les intermédiaires entre « moi- Sujet » et la « réalité psychique objective » dont le terme ultime, chez les Hébreux se nommait.. Yahvé. Yahvé, objet suprême de mon adoration - et de mon idolâtrie, jusqu'à mourir pour Lui ! -, que l'on peut alors nommer objet d'amour : Agapè.
Ainsi j'ai distingué entre mon besoin (faim physiologique ), mon désir (faim d'amour) et mon Amour (Faim d'Eternité..) !
. Qui que Tu sois ; quoi que Tu sois ; où que Tu sois. peu m'importe ! Je sais seulement, et cela me suffit, que sans Toi, Je ne suis pas. Que sans Toi, n'est pas Moi. Que sans Toi, je ne suis que ce taureau.. que je Te supplie d'accepter en sacrifice (sum-bolaïon : contrat, alliance) pour qu'ai lieu notre Rencontre ( sum-bolè : rencontre, symbole imaginal) et qu'à travers elle, advienne la Parole (sum-bolon : signe, linguistique notamment). Que de ce taureau, ce bélier et cet agneau que je Te sacrifie, j'advienne comme Sujet humain. Comme Sujet du Verbe : de son Annonciation, de son Enonciation et de son énoncé enfin. Même si derrière cet énoncé, les Sujets de l'Annonciation et de l'Enonciation doivent me demeurer à jamais voilés. P.97
Les Hébreux séparèrent.. prêtres et prophètes. Le sacrifice resta aux mains des prêtres.
La justice.. 1'équité.., la connaissance de l'Éternel.., l'obéissance à sa volonté.., le repentir enfin.. furent vécus comme plus importants que les sacrifices sanglants.
Le judaïsme rabbinique, substitua l'étude de la Torah.
Mais attention, alors, au retour en masse du « refoulé collectif » de la violence exacerbée de la pulsion orale cannibale ! . distinguer.. le « refoulé individuel » de Freud du « refoulé collectif » de Jung, que Lacan nomme de son côté une « forclusion ».

II. Aux sources de la « cuisine sacrificielle» grecque et hébraïque

RETOUR A DIONYSOS

Firmicus Maternus. adresse une espèce de supplique au fils de 1'empereur.. pour dénoncer l'usage crétois . consistant à déchirer à belles et pleines dents un taureau vivant et à sucer avidement le sang coulant des plaies ainsi créées ( diasparagmos et ômophagie typiques ).
. relier ce rite sauvage sanglant à celui de Dionyos.. invitant ses fidèles à manger crue la chair du taureau sacrificiel - quand ce n'est pas celle du fils d'Agavé ;. il ne va pas hésiter à se demander si ce rite « ômophagique » et « diasparagmique » ne serait pas à rapprocher de celui de Jésus offrant son corps et son sang, apparemment, en pâture à ses disciples et fidèles. En ce rapprochement.. (il)opère une identification de Dionysos et du Christ, mais à deux niveaux « psycho-archéologiques » différents. . P.99
. une de ses principales manifestations (épiphanie) est le taureau. Le taureau - comme le bouc, autre manifestation du dieu - est parmi les principales victimes « diasparagmiques » et « ômophagiques » des Ménades en état de possession orgiastique. C'est là que l'on voit l'Imaginaire à l'ouvre, confondant en la bête.. le dieu lui-même : l'objet imaginaire de la pulsion orale cannibale. . c'est par le sacrifice jde la bête (concrète, physique) que l'objet imaginaire pouvait se transmuer en objet imaginal passant de la « réalité physique objective » à la « réalité psychique objective » : par le sacrifice, qui est assimilation de la bête et du dieu, retour à l'Un (possession) en un premier temps, puis en un deuxième temps, séparation de cet Un, suivie enfin, en un troisième temps, d'une conjonction imaginal - imaginaire (O et O') :nouvelle forme d'être.
. pour fidèles. Des hommes aussi, appelés boukoloï, c'est-à-dire bouviers . qui, à l'instar des Ménades femelles s'enfiévraient. Possédés par ce dieu, bourreau et victime à la fois. (L'on voit, s'ajoutant à la relation orale cannibalique, la relation anale esclavagiste. Le difficile étant de pouvoir conjoindre « oralité-Agapè» et « analité-Caritas». )
. ce dieu.. comme celui venant. d'« ailleurs ». Mais cet « ailleurs », il convient d'abord de le découvrir sur place : là même où se produisent les phénomènes de possession du dieu. Et cet « ailleurs » est l' « ombre » même des douze grands olympiens, Zeus et Apollon en tête. L'épiphanie « là-maintenant » du « refoulé collectif» (archétypique) de cette civilisation créatrice de la Raison, de la Science et de la Technique - de la Démocratie aussi. (cf. rêve G. E. 12/3/01)
. Chaque vague de civilisation refoule la précédente - qui donc la fonde, par définition. .
Dionysos, le « Retentissant », est l'épiphanie du « retour de ce refoulé » .. primitif et achéen, à la conscience de ces peuples devenus par trop « raisonnables ». Il est l'irrationnel qui fonde ce rationnel naissant et s'érigeant peu à peu en science et technique.
. Il exigeait d'être reçu par son cousin Penthée, roi régnant de Thèbes. Lui seul eût pu, en le recevant, imposer son culte parmi les siens, y équilibrant la « raison » apollinienne et la « folie » dionysienne. Mais les siens ne l'ont pas reçu. et l'on sait ce qu'il leur en coûta. . P.101
. chez les « orphiques » .. les Titans .. ennemis du dieu des dieux, père de Dionysos, et qui les a vaincus, décident de se venger du père sur le fils. Ils jouent avec l'enfant-dieu. Et pendant que celui-ci contemple son visage.. le frappent à mort, découpent son corps en morceaux qu'ils placent dans un chaudron ( « bouillir » ) et font ensuite rôtir « à la pointe du feu ». . tranquillement, les dévorent, en commun, totalement, sauf. sauf le cour !. Athéna qui veillait porte le cour à Zeus qui, à partir de là, le ressuscitera, le faisant ainsi naître une troisième fois. Et Zeus, en courroux, lancera sur les Titans cannibales sa foudre meurtrière qui les réduira en cendres d'où surgira. l'espèce humaine. (comme Yahvé avec Job, Zeus laisse faire.. sauf que les Titans seront détruits., pas Satan)
. si nous autres humains, sommes des petits-fils de Zeus par le corps de Dionysos interposé, nous sommes aussi des enfants des monstres titanesques cannibales. .

LE ZAGREUS CRÉTOIS ET LE ZEUS INDO-EUROPÉEN

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Ce Dionysos Zagreus crétois était un dieu- taureau, tel le Minotaure.. - hypothétiquement - (:) le taureau amant de la reine.. Pasiphaé, épouse du roi Minos, devient le monstre Minotaure qui, en son labyrinthe crétois, exige annuellement la dévoration des sept jeunes hommes (sept couroï) et des sept jeunes filles (sept coraï) d'Athènes (d'où l'expédition de Thésée). L'on pourrait donc, hypothétiquement, dire que ce monstre cannibale est le produit du « refoulement » du dieu- taureau Dionysos- Zagreus crétois par les Doriens.. imposant leur Zeus olympien. Leur Zeus céleste surimposé à un Zagreus très terrestre, fils et amant de la Terre- Mère originelle, qui, par « refoulement », de la Terre passe en Enfer (Tartare de Gaïa) où il devient, en sa prison labyrinthique, le Minotaure (monstruisation par « refoulement » et « forclusion » ).

LE RETOUR DU CANNIBALISME SAUVAGE

Dès lors, d'un cannibalisme naturellement ritualisé, nous passons à un cannibalisme qui, interdit, ne se manifeste que par bouffées - quasi délirantes. La pression pulsionnelle des dieux terrestres et souterrains ( chthoniens ) refoulés par les dieux célestes (olympiens, indo-européens) est si forte qu'elle ne peut se manifester que par « regorgement » régurgitation.
D'où les épisodes encore ritualisés du Minotaure et ceux, imprévisibles, des Titans, des Ménades. ou des Hitler, Staline ou Pol Pot, « ensauvagés ».
Zagreus terrestre et chthonien, primitif, reste derrière - ou au-dessous - de Zeus céleste.
.mais surtout, au-dessous d'Apollon, son frère « préféré ». à Delphes, à une époque, Apollon habitait l'été et Dionysos l'hiver.
. en Palestine.. le jahwisme céleste du Père hébreu aura à chasser et maîtriser le culte du dieu archaïque du lieu : Baal, accompagné de sa mère et amante Anat - ou Astarté. Ces cultes de la Terre- Mère (souvent allégorisée sous forme de vache) et de leur dieu fils et amant (souvent allégorisé sous la forme du taureau) comportaient l'orgiasme.. et même son orgasme, avec la prostitution sacrée. Orgiasme et orgasme étaient au centre du phénomène fusionnel du « mariage sacré » (hiéros-gamos). ..au long de l'histoire des Hébreux ces cultes terrestres et chthoniens (souterrains) réapparaître périodiquement ( « retour du refoulé » collectif : « forclusion » ), sous Moïse, qui en cassera les Tables de la Loi du Père, sous Jézabel que combattra Elie .. et même. ne celui qui l'on nomme le Christ (Kristos, l'oint ; comme les autres Fils-amants ..)
.
rien ne sert de le nier, réprimer, refouler, forclore. il réapparaîtra tôt ou tard. P.105 Le mieux serait de nous y faire, afin de le mieux contrôler ; ..de le moins réprimer et « forclore » afin de ne pas en accroître la virulence par le retour à l'état sauvage (préritualisé) que nous lui imposons par là ; et d'éviter son « retour » forcené dans l'hallucination et le « passage à l'acte» dans le réel physique.
. dans le « Tu ne tueras point ! » est incluse, en sa totalité, la vie végétale. Alors, puisque nous ne pouvons vivre sans tuer la vie, faisons-le avec tout le respect, avec toute l'éthique, avec toute la bonté, avec tout l'amour qu'attachaient à cet acte les anciens. qui.. avaient ritualisé le sacrifice sanglant et « imaginalisé » le sacrifice humain en sacrifice divin et . animal. Même si, pour nous, leur Imaginal n'est plus qu'Imaginaire. Là-dessus pouvaient advenir les Dieux-Pères .
En ces anciens cultes mystiques.. de la Terre-Mère.. et de son Fils-amant.. l'essentiel était la communion fusionnelle au dieu-Fils (Fusion qui, si elle demeure imaginaire, créera toute la pathologie que l'on nomme en psychanalyse aujourd'hui « pré-génitale» ou « pré-odipienne » (voir rêve de V. D.M.) (d'avant l'intervention de la fonction du Père, séparatrice). Cette pathologie est psychotique ou border-line ( « états limites » entre psychoses et névroses dont les toxicomanes.. jusqu'à l'overdose mortelle : ils trouvent ce qu'ils cherchent : l' Éternité !), qui, dans le sein même de la Terre-Mère, mourait (tué), se morcelait dans la putréfaction, se reconstituait (.. Mère également rajeunie et régénérée..) renaissait régénéré, prêt à recommencer un cycle ( « temps circulaire » ). (mouvement régression et progression de la libido ; régénération par la plongée dans l'inconscient dans le processus d'individuation)
Fusionner à l'Un retrouvé en s'identifiant à ce dieu-Fils amant de la Terre-Mère.. c'était, outre .. féconder la terre, les végétaux et les troupeaux, y acquérir, comme lui, « dieu-Grain », l'immortalité.
C'est de ces cultes, en effet, que naîtront les croyances et idées - en l'immortalité d'un « corps de résurrection» (. « double » ou « âme » ). Ces croyances et idées ne mourront pas avec la surimposition des croyances et idées des Dieux -Pères. Dans l'ombre, outre les « retours du refoulé» collectif ( archérypique de la Mère et de son dieu- Fils) .. s'élaboreront les religions à mystères, plus ou moins tolérées par les fidèles du Dieu-Père . des systèmes mytho-philosophiques.. ésotéristes..
. valeurs peuvent radicalement s'inverser. L'on assiste alors à une « solarisation » des Déesses-Mères .. en Égypte où le ciel est féminin, la déesse Nout.. et à une « lunarisanon » des Dieux-Pères. Ouranos ( Ciel étoilé) et le Kronos grec.. avant l'apparition du Zeus parfaitement olympien (céleste, solaire).
.. à l'aide de cette dialectique binaire simple.. rendre compte du fonctionnement fondamental de la psyché humaine, tant collective qu'individuelle, centrée sur le noyau sacrificiel originel : l'endo-cannibalisme « diasparagmique » et « ômophagique » ( orgiasmique ) et l'endogamie « orgasmique ». P.107
Pâque des anciens Hébreux, 1( .nserver le sens profond du rituel « diasparagmique )), « ômophagique ) et' rhiéogamique » primitif ; mais déjà métamorphosé à un point tel qu'il en était oublié (méconnu, refoulé, voire « forclos » ). Ltce qu'il ne se déroulait plus en fusion :onfusion avec la Mère primitive, mais en communion avec e Père - si primitif fût-il lui-même (Zeus et Jahvé ar(
Dans ces conditions, de la Mère originelle, subsistait, seul, e versant négatif (ombre, Enfer) : mortel, morcelant, répulif, souillant. En somme, ne subsistaient à son propos que les représailles du tabou transgressé de l'endo-cannibalisme t de l'endogamie (l'inversion-réversion de sa fascination : sa terreur ).
Tout son versant positif (solaire, céleste) autrefois porté Jar la forme rajeunie et régénérée de la Mère, devenue Fille 1 descendant en enfer reconstituer et ressusciter son Fils-amant, sera désormais versé au compte du Père céleste.
.
Même le christianisme, reprenant pourtant à son propre compte les Passions des dieux Fils-amants de la Mère primitive, ne verra plus le rachat - la rédemption - qu'à travers Père céleste.
L'eschatologie « matricentrique » y cédait le pas à l'eschatologie « patricentrique ». . ce terme eschatologique réunit les deux parents et les deux sexes en une «syzygie ». L'on peut « re-naître » dans le « ventre » de la Mère de Résurrection ; l'on y peut « res-susciter » dans le « ventre » (anima ,du Père de Re-naissance). Ces « ventres » peuvent être refécondés par la semence (Logos, Verbe) tant du Logos hystéricos ( « double » ) de la Mère que du Logos sperrnaticos ( « double ») du Père. .
.pas perdre de vue que la « syzygie eschatologique » ( des Fins dernières) a lieu dans la conscience imaginale (trans-réflexive), quand la « syzygie cosrnogonique» ( des Commencements) a lieu dans la conscience imaginaire (pré-réflexive et au mieux réflexive).

TROISIÈME PARTIE Sacrifices où la victime sacrificielle était dévorée en partie et brûlée en partie

1 La thysia grecque et le zevach hébreu

LA CONVIVIALITÉ DES HOMMES ET DES DIEUX

LA THYSIA GRECQUE

LE ZEVACH HÉBREU ARCHAÏQUE

II Le sacrifice fondateur en Grèce d'après Hésiode : différenciation et individuation

LA DIFFÉRENCIATION DE LA PREMIÈRE PARTIE DE LA VIE

.. le rituel de castration des prêtres et fidèles de la Grande- Déesse Cybèle de Phrygie par rapport à son Fils-amant Attis. choix d'un mythe où la castration « génitale » s'opère avec le père, Zeus en l'occurrence. ..rite d'Abraham et d'Isaac, remplaçant le sacrifice total du Fils par celui du bélier et instituant alors la circoncision ( castration « génitale » ) à la naissance (huit jours) à la place du rituel de circoncision pubertaire. .
nous avons choisi le mythe grec de Prométhée, Épiméthée et Pandora.. sur cette épiphanie de la féminité (Pandora, 1'anima de Jung, notre « contraire féminin » ) en l'homme (mâle). Nous en inférerons l'épiphanie de la masculinité (Épiméthée, l'animus de Jung, notre « complémentaire masculin » ) en la femme (femelle).
Après les sacrifices « pré-génitaux » ( oral et anal) nous atteignons ici les sommets de la castration « génitale ». P.125
. cel1e-ci est d'autant plus difficile et pathologique que les sacrifices antérieurs (pré-génitaux) n'ont point suffisamment opéré : c'est-à-dire le sevrage oral et le dressage sphinctérien anal (cloacal). (Et c'est toujours le dur combat de Jacob que nous devons livrer et soutenir. On le sait, il nous laissera boiteux (castrés).) La « pulsion génitale » inaugurant le Sujet individuel (à sexes séparés) n'est que le résultat des pulsions antérieures : orale et anale. La « possessivité » qui la caractérise est d'autant plus virulente, et donc plus difficile à « castrer », que les vestiges de l' « esclavagisme anal » et du « cannibalisme oral » y sont plus importants. )ir en cette pulsion génitale le summum de la différenciation humaine, comme l'a fait Freud, est exagéré.
La « génitalité » en soi n'existe pas. Elle est, comme intrication des trois grandes pulsions fondamentales de l'être humain, plus ou moins « inversées- réversées » en leur contraire et corrélat « spirituel » (Eros, Caritas, Agapè). Néanmoins, l'importance de cette « position » (génitale) tient à la différenciation des sexes qui s'y opère et, à travers celle-ci, à l'épiphanie d'un Sujet individuel ( « Je- moi » ) qui y prend corps.. s'opposant au corps- « à corps », souvent - de l'autre sexe ; et tout autant du même sexe, dans la rivalité - du fils avec le père et/ou le frère - de la fille avec la mère et/ou la sour.
C'est ici que s'institue véritablement la dialectique quadrangulaire.. entre le Sujet individuel, le père et la mère, le « double » et le « complémentaire ». Ces deux derniers personnages se différencient - avant de s'individuer - des personnages du père et de la mère : le Sujet masculin, par exemple, prenant pour « idéal du moi » (son « complémentaire féminin » ) la mère, et pour « moi idéal » (son « double masculin » ) le Père. Plus tard, Jour ce même sujet (s Jn « complémentaire féminin » sera représenté par la - ou les - fernrne(s) de sa vie) tandis qu'il identifiera son Moi au « double masculin », corrélatif de son « complémentaire féminin ». Différencier la « femme de sa vie » ( concrète) de son « complémentaire féminin » appartenant en propre au Sujet sera !'ouvre j'une grande partie de sa vie - sinon de toute la vie 6. , « complémentaires » et ces « doubles » ql lle Lacan ommede )bjets ( « petits autres » ) destinés à combler, pour un « Sujet clivé », le « manque à l'Unité », reformant le « grand Autre ». (Ou le « grand Soi ». l'Un primordial. L'Être-Soi est différent de l'« étant-moi », et en ce sens, est aussi Être-Autre. Être-Soi et Être-Autre se rejoignent en formant une bande de Möbius.)
. Pandora.. n'est pas la femme concrète (gynos..). Elle est le « féminin » de l'homme (mâle), son « complémentaire» (anima de Jung). La parthénos, la « vierge », est donc surtout une histoire d'hommes (mâles) . En fait, les deux phénomènes se corrèlent.
. Kronos institua l' Âge d'or (paradis), ses enfants le payèrent de leur dévoration par ce Père. .. un progrès par rapport à Ouranos qui se contentait.. de renvoyer ces derniers dans le ventre le plus infernal de leur mère Gaïa, le Tartare : l'enfer le plus cannibale et esclavagiste. Pour un père, dévorer ses enfants, c'est déjà les séparer de leur mère fusionnelle et confusionnelle . Zeus.. chasse, à son tour, son père Kronos. (Le châtre, nous dit une version du mythe et, en tous cas, l'expédie dans le Tartare de Gaia, en lequel il opérera une rédemption. ) .. pour prendre purement et simplement sa place, en épousant sa sour Héra (On voit que l'on n'échappe pas encore à l'inceste (endogamie). L'on sait déjà quelle féroce jalousie (possessivité) habitera Héra quant au « donjuanisme» de Zeus, son frère-amant. Plus est important l'inceste plus est importante la fusion, donc la dépendance, donc la possessivité - et l'esclavagisme et le cannibalisme sauvages. )
L'un des premiers gestes de Zeus .. sera de décréter la fin de l'Âge d'or . assister à une dégradation des « races » . de l'or nous passerons à l'argent ; de l'argent au bronze ; du bronze aux héros ; - des héros enfin au fer, où les hommes, toujours possédés de démesure (hubris) seront promis à une totale destruction par Zeus . P.127
. Zeus a détruit cette unité fusionnelle sans cesse jouissante ; la remplaçant par une division ( clivage) créant le manque perpétuel et la « conscience malheureuse » , sans cesse à la recherche de son Unité perdue - de son Graal -. Que d'hécatombes, d'holocaustes, d'apocalypses. dus à la démesure (hubris) impénitente issue de notre « manque à l'Unité ». Mais aussi .. que de plaisirs, de jouissances.. à la mesure même de la démesure de notre «manque à l'Unité » retrouvé. Un retrouvé. le temps d'une amitié, le temps d'une affection. le temps d'un grand Amour ! D'un grand Amour dont nous devrons aussi subir la démesure, sacrificiellement et passionnellement, pour y prendre mesure du pouvoir d'illusion (Maya...) dont nous devrons mourir.
. comment l'âme (le « manque à l'Unité » ) naquit à nos ancêtres grecs. .. cette âme « génitale » (sexuée), Pandora, est encore enfouie dans la boue cloacale de la gaster (estomac) et de l'entera (intestin), c'est-à-dire dans l'oralité et l'analité. . le sacrifice fondateur de la convivialité communielle entre Zeus et les hommes, par Prométhée interposé. nous amènera Pandora.

LA DIALECTIQUE « GÉNITAL- ÉROS », L'INDIVIDUATION DE LA DEUXIÈME PARTIE DE LA VIE

. version d'Hésiode.
. Gaïa, la Terre-Mère, (l'origine est la « matière », prima materia) émergea du Chaos (grand Abîme). S'ennuyant sans doute, elle détacha une partie de son immense corps pour en faire un amant : Ouranos, « Ciel étoilé ». Avec lui elle s'unissait sans cesse.. elle eut de nombreux enfants, dont les Titans.. Kronos, qui châtra son père Ouranos, pour se saisir de sa puissance. .. un autre Titan .. Japet.. a épousé Klyméné, une Océanide, qui va lui donner quatre magnifiques garçons : Atlas.. ; Ménotios.. père de Patrocle.. ; Prométhée, le Prévoyant, souple et subtil, mais aux « pensées fourbes », comme son oncle Kronos ; Épiméthée enfin, l'étourdi, le maladroit, « celui qui pense après » qui, par ses défauts, fera le malheur des hommes. . P.129
Prométhée, .. avait su se mettre du côté de Zeus lors de son titanesque combat contre les monstres - dont les Titans .
. problème épineux du partage du monde.. le Ciel revint à Zeus, la Mer à Poséidon et les enfers à Hadès. Quant à la Terre. on ne sait trop ; mais les hommes, chassés par Zeus de l'Âge d'or de son père Kronos, ne savaient que devenir sur leur planète inhospitalière, ayant perdu leur commensalité permanente avec les dieux, sans femmes. Sous Kronos, 1'homme n'existait qu'au masculin. Il n'y avait pas encore de sexuation ( « génitalité » ) chez ceux-ci. Simplement, à longueur de journée, ils festoyaient ( C'est-à-dire banquetaient (oralité). L'on peut donc en inférer qu'ils déféquaient et urinaient (analité).) dans les cortèges des dieux, et comme eux, immortels - ou presque.
.. Prométhée, qui s'est mêlé à eux et.. va devenir leur « député » auprès de Zeus.
« Concluons une alliance. avec cette espèce bizarre, qui nous ressemble en certains aspects, mais qui est tellement au-dessous de nous. Certes, très inférieure à nous, mais qui ne manque pas de côtés attachants, ne serait ce que par les marques de fidélité, de dévotion et d'adoration qu'elle semble prête à nous témoigner. demandons-lui de nous nourrir, et elle le fera, tellement elle est prête à tout pour nous! » (Pensez à la dialectique maître-esclave de Hegel.)
Prométhée.. va lui proposer un marché de dupes.. à partir du sum-bolaïon : contrat sacrificiel, portant sur le bouf de la thysia. Prométhée pour le partage de cet animal entre Zeus et les hommes, avait mis sous la peau de l'énorme animal qu'il avait sacrifié en exemple - en « archétype » - , puis dépecé et partagé : « chairs et entrailles lourdes de graisse en recouvrant le tout du ventre (gaster) repoussant de l'animal. Pour l'autre part, il avait, par ruse perfide, disposé en un tas les os nus de la bête, puis recouvert le tout de graisse blanche ».
Deux parts absolument inégales.. chez les Grecs, le ventre (gaster) était aussi répugnant que le sang et les graisses chez les Hébreux.
. Zeus .. choisit la meilleure part apparente - et donc la mauvaise !
C'est pour cette ruse fourbe que Prométhée fut condamné à la dévoration permanente de son foie par l'Aigle de Zeus. Et c'est aussi ce qui décida ce dernier à tenter d'en finir avec tte race de mortels.
La première rétorsion qu'il envoya aux hommes fut de leur enlever le « feu infatigable », afin de les condamner au cru « cannibalique » .
Mais le brave fils du Titan Japet.. sut le tromper encore, et lui dérober ce feu « au creux d'une férule ».
La deuxième rétorsion pour les punir de ce rapt fut de créer le « beau mal » (Kalon Kakon) la Femme, qu'il nomma Pandora (le don de tous les dieux).
. trois phases de lutte entre hubris (violence démesurée de Zeus) et éris (ruse fourbe de Prométhée). (Pas loin d'éros, homonymiquement.)
. aux dieux la graisse et les os ; aux hommes le reste, dissimulé sous l'estomac (gaster) et sous la peau non appétissants. P.131 La peau revient aux hommes ou au prêtre (cf. dans les rêves les peaux d'animaux qui recouvrent l'humain). L'estomac (gaster) est repoussant ; il est une vraie malédiction ; l'homme est esclave de lui.
Mais ce partage inégal se paie de la perte du feu, donc de la régression au diasparagmos et à l'ômophagie cannibales.
Le mythe de Pandora est significatif du malheur des hommes (mâles), amené par la Femme. Avant la création de ce « pire des maux », Zeus, afin d'en finir avec cette race dégénérée, lui avait enterré ( caché) ce qui lui permettait de vivre (manger) jusque-là sans travailler : le grain spontané de Rhea et Gaïa. comme Prométhée avait caché la plus mauvaise part sous l'apparence la plus alléchante, Zeus cache, sous la terre.. la nourriture végétale que les hommes devront extraire désormais, « à la sueur de leur front ». Par là, il leur impose sans ménagement l'agriculture. Et le pain lui-même ne pourra désormais être consommé que selon un rituel précis.
D'autre part, le pain - produit de « culture ».. - ne sera jamais offert en nourriture aux dieux sinon sans levain chez les Hébreux - et il ne se donne pas à manger aux bêtes.
Le pain est donc à la plante sauvage de la « cueillette » ce que l'animal sauvage, de la « chasse », est au bouf domestique - et sacrificiel.
. Chaque brin de conscience (Sujet) ne peut se faire que contre l'hubris orgiasmique et orgasmique qui fusionne et « confusionne » toute chose.
. Le forgeron, Héphaïstos, va la (Pandora) fabriquer à la demande de Zeus, à partir d'eau et de terre, c'est-à-dire de boue. Et le Dieu Père la lui demande « féminine » à l'excès : parthénos, vierge. Ni petite fille, ni mère, mais Femme. . L'hyperféminin sans la moindre trace de masculinité surtout !.
« La Femme, ça n'existe pas ! » (Lacan).. Mais certainement. ! La Femme que Zeus demande au forgeron Héphaïstos, « ça n'existe pas » !
I1 ne s'agit là que du « complémentaire féminin » ( anima de Jung) des hommes (mâles, andros) : une « illusion» (Maya).
. l'homme originel des Grecs (l'Anthropos) n'était avant cela ni masculin ni féminin.
C'est maintenant, pour son malheur, qu'il va posséder un sexe ; ce qui va cliver cet Anthropos en : aner-(andros).. le mâle, le masculin, d'un côté ; parthénos, la femelle, le féminin, de l'autre côté (.. la vraie femme de chair (gyné) n'est pas là.); chez le même individu ! Son « double » et son « complémentaire ».
Et cette part féminine (parthénos) « complémentaire féminin» ) va apporter à l'Anthropos (homme a-sexué) « faim, fatigue, labeur, maladies, vieillesse et. mort » !
Cette Pandora n'est pas tout à fait de la boue ; elle n'est tout à fait un animal (gaster, le fameux estomac qui dévore tout) ; elle n'est pas tout à fait une femme (gyné, gynaicos) ; elle n'est pas tout à fait Anthropos (Homo) ; elle n'est pas tout à fait une déesse. Elle est quoi alors ?
Elle est Pandora, l'Ève grecque ! Et dans l'image (eîdos) de son visage de déesse, va se prendre au piège le désir des hommes (andros) et pas Anthropos. (Lacan dirait qu'elle est le « petit autre » ( « objet a» ) que l'on prend pour le « grand» ; Imaginaire que l'on prend, en son visage, pour l'Imaginal. Mais c'est là tout le problème de la Transfiguration.)
Mais en son dedans, nous dit Hésiode, à peine misogyne par rapport à son « féminin », c'est de la boue, c'est une chienne.. exprimant une foncière bestialité et, notamment, une bestialité de la gaster, de l'estomac, de la dévoration.
Et le ventre digestif va interférer sans cesse chez les Grecs - comme chez les Hébreux- (comme encore chez nous) avec le ventre sexuel : l'endocannibalisme avec l'endogamie. Gaster, c'est 1'estomac, mais aussi la matrice, le « sein » où l'enfant est nourri. P.133
Le digestif ( « oral » et « anal » ) n'est pas distingué du « génital » : « Epouser et manger, c'est tout un. »
.. la part.. pour les hommes, la meilleure, était malheureusement cachée sous la gaster - et même à l'intérieur de celle-ci. Cela implique donc que l'on garde, avec nous, humains, cette fameuse gaster insatiable (cette « faim » !).
Malédiction redoublée par Pandora, elle-même gaster. Commençons donc par différencier endo-cannibalisme et exo-cannibalisme ; ensuite, peut-être pourrons-nous différencier endogamie et exogamie.
.. à l'instar des quatre pôles.. de l'Un et du Multiple d'une part, et du Devenir d'autre part ; les quatre pôles cruciformes de l'endo-cannibalisme et de l'endogamie d'une part, de l'exo-cannibalisme et de l'exogamie d'autre part fonctionnent dialectiquement tout au long de notre vie. (Freud a défini la névrose - obsessionnelle notamment - comme l'envers de la perversion. L'on pourrait définir la psychose comme une caricature de perversion. Tout symptôme pathologique inclut en lui la transgression de la Loi et son contraire. Le sacrifice lui-même est une transgression et son contraire.)
Au-delà de l'incorporation, le cannibalisme est une logique (sauvage) de la filiation. La prohibition de l'inceste génital ne peut se comprendre en négligeant celle de l'inceste alimentaire (oral) : « Dis-moi qui tu manges. »
Le diasparagmos et l'ômophagie de Dionysos .. perpétrés par les Titans, placent le dieu-enfant ..au centre de cette croix originaire de la condition humaine.
Les « Ceci est mon corps » et « Ceci est mon sang » de Jésus .. placent le jeune « Homme- Dieu » au même centre de cette croix fondant l'humaine condition.
La croix dionysienne nous exprime la sauvagerie pulsionnelle démesurée « hubris » des origines (Ouranos, Titans et le Tatare-enfer de Gaïa) : l'oralité cannibalique.
Tandis que la croix chrétienne nous exprime la même sauvagerie démesurée : oralité cannibalique et son Imaginaire, métamorphosée, par l'auto-sacrifice, en ImaginaI .
Mais les deux croix fonctionnent dialectiquement. . l'aspect diachronique vertical.. de la dialectique Imaginaire-Imaginai. .. l'aspect synchronique (horizontal). Cf. schéma P.135
. Au niveau imaginal ce sont les mêmes objets mais différenciés et individués des deux réalités physique et psychique objectives.
L'exo-sacrifice portera sur l'objet physique extérieur (taureau par exemple) et sur l'objet psychique intérieur (0') qui le représente en nous, sujet individuel.
L'endo-sacrifice portera sur l'objet psychique extériorisé (dieu-taureau par exemple) et, concurremment, sur l'objet psychique intérieur (O) qui le représente en nous, sujet individuel.
L'auto-sacrifice portera à la fois sur les deux premières formes sacrificielles : Dionysos .. reste exo-sacrificiel et endo-sacrificiel. Il n'est pas auto-sacrificiel (le sacrifice lui est imposé par les Titans). Jésus et Shiva le seront, chacun à leur manière.
L'Imaginal diachronique (et non pas synchronique) n'est pleinement possible qu'à travers l'auto-sacrifice. « C'est une dure loi mais une loi suprême. » Ne confondons pas auto-sacrifice et suicide pathologique. Ne confondons pas auto-sacrifice passant à l'acte concret et auto-sacrifice « mental ».
Entre ces deux croix extrêmes (oralité et Agapè) se situent les deux croix moyennes de l'analité-Charité d'une part et de la génitalité-Éros d'autre part.
Autrement dit, entre l' « amour dévorant » et l' « amour universel », se situent l' « amour esclavagiste » conjugué à l'« amour du prochain », et l'« amour possessif» conjugué à 1'« amour du proche ».
Et c'est pourquoi diaspagamos ( « amour » oral meurtrier) et hiérosgamos (amour incestueux génital) sont inséparables. nous crucifiant dans les huit pôles de cet espace imaginaire-imaginal que l'on a volontiers nommé l'âme. L'âme réunissant dialectiquement notre corps, celui de Dionysos- Jésus .. et celui de l'univers.
L' « âme du monde » est.. : la réalité psychique individuelle unie à la réalité psychique objective, réunissant la réalité physique individuelle elle-même unie à la réalité physique objective.
. L'Eros, de la dialectique « génital-Éros » est un témoignage de la métamorphose de l'hubris primitive (Titan) en simple éris (discorde de Prométhée-Zeus ). Eros et éris se donnent la main. L'éris ( discorde, rivalité, querelle) est un intermédiaire entre l'hubris (orale et anale) et l'Eros génital. L'Eros génital, 1'« amour du proche », est le lieu de l'incarnation individuelle des deux grandes réalités : physique et psychique objectives. La Caritas et 1'Agapè sont et restent dans le collectif (amour du «prochain», qui est ce ?) et dans le cosmique (amour « universel », qu'est ce ?). L'Eros génital répond à ces deux questions : c'est Un Tel et Une Telle. Là, est le lieu de l'Incarnation. .. du pré-génital, anal et oral, comme du « post -génital », Caritas et Agapè. Mère Théresa, en son cloaque (anal) de Calcultta, connaît-elle l'amour du proche : Éros ? Qui peut le plus ici ne peut pas, forcément, le moins. P.137
.
La leçon majeure de l'arrivée de Pandora - ou d'Ève parmi nous (les « mâles » ), c'est que nous y prenons un sexe : masculin (aner, andros) par rapport au féminin (parthénos, puis gyné) qui nous « envahit ». Qui nous envahit. de son manque (clivage encore) qu'aussitôt nous remplissons d'« images» afin d'en souffrir moins. Images (eidos)qui vont tout à coup surgir (épiphanie, « apparition » ) en une femme ( concrète) avec laquelle, un moment en tout cas, nous retrouverons l'Un perdu de l'Âge d'or de Kronos. C'est là que nous serons en Imaginaire, pris au piège de Pandora. II ne faudra pas moins de. toute une vie. pour séparer notre Pandora (Parthénos) de la femme concrète (gyné) en laquelle elle nous est « apparue », et d'Imaginaire en faire Imaginal. (Ce schéma est symétrique pour la femme : son aner (le mâle en la femme) se nommera Épiméthée ou Adam.)
C'est avec Pandora que le sacrifice devient « génital ».
Avec le bouf et le feu, nous sommes encore dans « le cru et le cuit » du digestif (oral, anal) ; de l'endo et de l'exocannibalisme.
. C'est en tuant et en mangeant la bête et le végétal sacrificiels selon les rites ( qui font Loi) que la « bête humaine » se fait homme, en séparant dieux (fous) et démons (pervers ).
. en « faisant l'amour » et en engendrant selon les rites (Loi).
Se fait homme, à mi-chemin de la « bête » en lui ( que son « ange » lui fait « infernaliser » ) et de son « ange » ( que sa « bête » lui fait diviniser).
Imaginaire dans les deux cas, tant qu'il n'a pas conscience claire que cette « bête infernale » (infra-humaine) et cet « ange divin » (supra-humain, son devenir) P.139 ne sont que les effets trompeurs ( semblance, eidos) en son âme - et chez les « autres »..- de cette « réalité psychique objective » qui le possède en l'aliénant - mais en le faisant être pourtant.
. C'est bien pourquoi le sacrifice porte, à la fois, sur la bête (concrète et intérieure), sur Satan (Ou tout autre démon. )qui lui est attaché, sur l'ange, et sur Dieu qui lui est également attaché, afin que de ces quatre sacrifices en un, le Sujet humain advienne. ni tout à fait bête, ni tout à fait démon, ni tout à fait ange, ni tout à fait dieu. Humain, simplement humain !
Renoncer à l'Age d'or de Kronos, à la fusion endo-cannibalique dans la félicité divine éternelle, pour accepter sa condition de simple mortel déchiré, n'est pas chose facile.
Renoncer à l'omnipotence et à l'omniscience mâles pour accepter sa blessure féminine (parthénos) n'est pas chose facile. (C.f. rêve avec l'omniscience entrainée dans la mort pour se renouveller.)
Renoncer à l'omniprésence et à l'omnijouissance femelles pour accepter sa blessure masculine (Épiméthée : « Celui qui pense après » ), n'est pas chose facile.
C'est aussi tout cela qui se joue dans le sacrifice.
. trois phases en cet épisode sacrificiel.
Première séparation : des dieux et des hommes. . ouvre de Zeus, qui chasse les hommes de l'Âge d'or. Pour renouer avec Zeus et les dieux, le sacrifice du bouf ( sum-bolaïon : alliance) est institué par Prométhée. Zeus .. lésé.. se venge en nous confisquant le feu ; nous imposant une « régression » au « cannibalisme cru », c'est -à- dire à l'endo-cannibalisme.
Prométhée nous récupère le feu ; nous permettant par là le « cuit » et l'exo-cannibalisme, remettant en vigueur le traité d'alliance sacrificiel avec Zeus.
Ces trois stades de cette première séparation oscillent sans cesse du ventre maternel : Age d'or, avec tout ce qu'il véhicule de la grande Mémoire de l'espèce et de la vie (mémoires acashiques), au sein maternel, par l'étroit défilé de la naissance. De ce sein généreux, nous oscillons, des Cieux, à son Tartare cloacal, par l'étroit défilé des sphincters.
Les trois stades se situent dans la ritualisation sacrificielle (Loi) des pulsions orales cannibaliques et anales esclavagistes ( Dans le cannibalisme, l'autre n'existe pas ; il doit devenir moi - et réciproquement, pour moi, par rapport à lui. Dans l'esclavagisme, l'autre- esclave existe par rapport à l'autre- maître. Certes dans une relation totalement sado- masochiste, mais avec une certaine distance entre l'autre et moi : celle de la «chaîne».)
Deuxième séparation : masculin-féminin. Due à la deuxième vengeance de Zeus après le rapt du feu et consistant en Pandora.
L'Anthropos total, plein, asexué, se casse en deux .
Le mâle ne peut plus ignorer l'autre sexe, qui va même sans cesse le tourmenter, à travers sa. blessure.
. la femelle de son côté.. nantie de son Épiméthée, « qui ne pense qu'après », son « complémentaire masculin », son animus.
Le tourment va venir notamment de ce que la parthénos (féminin du « mâle » ) ne se satisfait jamais de la gynos (femme concrète) ; pas plus que 1'« Epiméthée » (le couros..) ne se satisfait de l'aner (homme concret). Et pourtant, l'homme (mâle) voudra sans arrêt faire coïncider sa parthénos (son féminin) avec une femme concrète ; et, réciproquement, la femme voudra sans arrêt identifier son couros (son masculin) avec un homme concret.
De temps en temps, cette coïncidence fulgurante aura lieu. Ce sera le coup de foudre amoureux, qui pourra même.. entrer dans l'Éternité - par la mort (cf. Tristan et Iseult)! (voir métanalyse et Narcisse ; Eros et Psyché) Comment y entrer autrement. ? L'important est qu'elle demeure symbolique.
Mais la plupart du temps les coups de foudre passent aussi vite que. l'éclair ! Alors commence la guerre d'usure des sexes. Et ce sera la :
Troisième séparation. : des « doubles » et « complémentaires » en chacun des deux sexes : l'individuation.
. Elle consiste, non seulement à prendre conscience (sacrificiellement : deuil) que la parthénos de l'homme (mâle) (Son « complémentaire féminin » positif et négatif.) n'est pas la gynos.. mais aussi que le partenaire masculin de cette parthénos en nous (homme mâle) n'est pas nous. . mais un être masculin plus ou moins idéal, plus ou moins satanique aussi (Son « double masculin » positif et négatif.) .. qu'il convient de mettre à distance de notre « moi-sujet ».
.. ces êtres psychiques (parthénos « complémentaire » et couros «double ») différentiés - et par rapport auxquels je suis alors « individué »- . Imaginaux. Avant cette différenciation- individuation, ils n'étaient qu'imaginaires : confondus à l'être physique de l'autre et de moi-même.
Pour la femme, le phénomène est strictement identique. Il consiste en ce qu'elle prenne conscience, sacrificiellement (par un deuil : une dépression), que le couros (le Prince Charmant) ( Son « complémentaire masculin » positif et négatif.) qui l'habite n'est pas l'aner (homme mâle concret), mais aussi, corrélativement, que le partenaire féminin, en elle (Son « double féminin » positif et négatif.) - de ce couros - n'est pas elle. .. mais un être féminin plus ou moins idéal, plus ou moins « Méduse » qu'il convient de mettre à distance de son « moi-sujet ».
Alors, elle aussi aura transformé en Imaginal ( « réalité psychique objective » ) ce qui, jusque-là n'était qu'Imaginaire : « réalité psychique objective » confondue avec la « réalité physique objective » moi et objet confondus sans un Sujet individué qui les différencie.
A cette troisième séparation sacrificielle, l'on passe généralement toute sa vie. Cf. schéma quaternaire .. P.143
.
La Femme et l'Homme idéaux (Parthénos et Couros) n'existent sans doute pas, mais ils nous font exister ! (La théorie de l' « archétype » de Jung est très proche de celle de l'«Autre » de Lacan. Mais pour Jung l'image archétypique demeure (Imaginale), au-delà de l'Imaginaire. Pour Lacan elle n'est que « semblant » s'abolissant dans le Symbolique.)

III sacrifice aztèque ou la régression esclavagiste et cannibalique

SACRIFICE AZTÈQUE ET SACRIFICE DANS L'INDE ANCIENNE

. Les Aztèques .. régression cannibale et esclavagiste, passant à l'acte du sacrifice humain d'une manière jamais rencontrée dans l'histoire de l'âme des hommes. Sauf à inclure dans cette histoire le nazisme et le stalinisme. Alors, les Aztèques sont loin derrière nous en matière de raffinement sado-masochiste sacrificiel.
. les démons et les dieux fous à l'ouvre, le sado-masochisme humain à son paroxysme sous la pression incontinente de ces démons et dieux pervertis. .. sacrifice humain dans sa forme exo-sacrificielle totale.
Et pourtant. nous y verrons constamment pointer la forme endo-sacrificielle et auto-sacrificielle, sous les espèces d'un Sauveur Serpent-Oiseau, Quetzalcoatl, dont on attendra désespérément le retour ! . P.145
. les deux faces de Dieu : dieu-sauveur et démon, ange et bête. La « Bête humaine » et Dieu sont une même chose..

LE MYTHE AZTÈQUE

. son.. Serpent, fondateur de l'Age d'or toltèque, celui de Tula (ou Tolla) : Quetzal, l'oiseau à plumes soyeuses, vertes, poudrées d'or et Coatl, le Serpent à sonnettes, le crotale.
Quelquefois l'on voit apparaître sur cet Oiseau-Serpent des membres humains, ou bien, en sa gueule ouverte, audessus de sa langue fourchue, un visage humain, dont il accouche.
Oiseau-Serpe nt-Hom me-Dieu ; tel est Quetzalcoatl, le Sauveur.
. vagues successives des barbares.. Déjà les Toltèques étaient venus du nord, mais ils avaient fait refleurir le Sauveur Quetzalcoatl. Il n'en sera pas exactement de même des suivants. .. transformer, devenir la Vénus du soir et celle du matin, sous forme humaine, coiffé d'un chapeau conique, le « Joyau du vent », portant un double bec. Son « double », son jumeau, à tête de chien, c'est le dieu des enfers, Xolotl. . énantiodromie .
.. Quetzalcoatl reste le garant de l'éducation des nouveaux occupants, guerriers archaïques, venant juste d'abandonner leur ancêtre chef de tribu, la magicienne Malinalxochitl, au profit de son frère, sanguinaire, le dieu de la guerre. P.147
Cette tribu qui sort à peine de la toute-puissance de la Grande-Mère archaïque - et la refuse ! - se nomme Aztèque. .
Mais la « Magicienne » ne va pas les laisser s'en aller sans réagir. Ils auront beau adopter la tradition nahuatl des Toltèques . Cela ne suffira pas à enrayer l'énantiodromie (le renversement polaire) qui se prépare. Quetzalcoatl reste.. garant des collèges d'éducation. Mais à côté, se trouve un autre système éducatif, celui de Tezcatlipoca, « Miroir fumant », le dieu du Ciel nocturne (un Ouranos par conséquent), patronnant un système d'éducation guerrier, barbare, esclavagiste et ..cannibalique. Une fois par an les deux formes d'éducation s'affrontent sur la place publique en la personne des étudiants, qui « se heurtent dans de vives échauffourées et s'infligent des brimades rituelles » : le Quetzalcoatl de lumière affronte son vrai « double » lunaire, le Tezcatlipoca de l'ombre.
. c'est lui qui régnera en fait, dieu de l'exo-sacrifice humain (des autres), dans l'attente, souvent désespérée, du Sauveur Quetzalcoatl, dieu de l'endo-sacrifice et de l'auto-sacrifice humain (de soi-même ). .
Que cette « Ombre » soit reconnue sous le nom de Huitzilopotchli, dieu de la guerre, ou sous celui de Tezcatlipoca, le chef des magiciens, en son « Miroir fumant d'obsidienne» - et renvoyant à la magicienne Malinalxochitl - ou sous le nom, encore, du dieu Soleil Tonatiuh, exigeant pour se lever, se mouvoir et se coucher, un nombre effrayant de sang humain.
. les Aztèques se trouvent, face aux dieux, dans la position des hommes, auxquels Zeus vient d'enlever le feu - la « lumière » de Quetzalcoatl - et qui sont tenus de retourner à l'endo-cannibalisme « diasparagmique » et « ômophagique », des sacrifices humains ici. Dans le ventre dévorant de la Magicienne archaïque dont le masculin (le Serpent - Phallus) est justement du type Huitzilopotchli, : dieu-guerrier ; Tezcatlipoca, dieu-magicien ; Tonatiuh, Soleil dévorant. Ouranos et Kronos démesurés. . P.149
. il n'y avait même pas privilège de classe gouvernante. .. elle-même ne vivait qu'en état d' « orgiasme » permanent - de possession par les dieux sombres .
.

Les Aztèques, finalement, paient pour la « pureté » des Toltèques et sans doute des ancêtres de Teotihuacan comme les nazis paient - et font payer chèrement la « pureté » chrétienne.
. nous ne pouvons nous en tenir à des causes politiques et économiques, « Les causes, dites « archétypiques » et « pulsionnelles », sont, dans ces cas, beaucoup plus importantes, même si c'est l'économique qui est à la source de la régression archétypo-pulsionnelle.
.
Du temps immobile - « suspendu », circulaire - naissait le temps « qui coule » (linéaire). .. dévorant ( « en tropique »..)
Il allait exiger, pour continuer sa marche, son tribut journalier de sang frais sacrifié, qu'il nommait « eau précieuse ». Le sang des hommes, désormais, remplacerait celui des dieux. . P.153

Quetzalcoatl, en sa forme « lumineuse » .. restait le garant d'une « énantiodromie » .. possible. Mais pas plus que le petit point blanc dans le grand noir du Taï-ghi-tou taoïste chinois. . P.155

LE RITUEL SACRIFICIEL

IV Le sacrifice dans l'Inde ancienne

QUATRIÈME PARTIE Retour aux Sources sacrificielles judéo-chrétiennes

I Les heurs et malheurs du refoulé hébreu et Juif

. dans l'âme des Hébreux. L'interdit du sang chaud et fumant était radical (cascher) comme celui des graisses et de la chair crue, non seulement « sauvage », mais aussi domestique hors du rituel sacrificiel.
Non seulement le sang ne pouvait être bu par les mortels mais l'Éternel lui-même le refusait. Il était l'élément qui servait à délimiter l'autel, c'est-à-dire le sacré du profane. .
. Jésus réintroduit .. ômophagie et diasparagmos mais sous la forme du vin et du pain ( sum-bolès ).
Le pain sans levain .. évoquer l'abstinence sexuelle. . Elle nous renvoie donc à la règle de prohibition de l'endogamie, doublant celle de prohibition de 1'endocannibalisme.
. les dialectiques « analité- Caritas » et « oralité- Agapè » . demeurent dans le collectif. Seule la dialectique « génital-Éros» crée de l'individuel : du Sujet individuel. .
Le peuple d'Israël va fonder sa nation sur Canaan qu'il envahit.. P.189
. Epouser les épouses survivantes, à l'instar des Aztèques épousant - ou prenant pour « gouvernantes » de leurs enfants les femmes survivantes des Toltèques -, n'est pas .. si simple. L'on épouse.. les cultes qu'elles véhiculent.
. les « douze tribus » fondaient leur souveraineté monothéiste jahwiste contre le culte polythéiste de la Grande- Mère Anat - ou Astarté - et son Fils-amant Baal, le « Terrible ».
Voilà, campé, le « refoulé » de cette nouvelle civilisation ,s'installant sur ces terres cananéennes à l'époque de la guerre de Troie des Grecs. Le « refoulé », c'est peu dire. Car ce peuple obstiné ne va plus avoir d'autre but, une fois faim et « amour » assouvis, que d'éradiquer ( « forclore » ) ce culte archaïque d'Anat-Baal, des lieux.
Eradiquer un culte aussi archaïque de l'âme d'un peuple que l'on prétend « assimiler » n'est pas chose facile. A différents moments, il fait « retour », cataclysmiquement. .
Anat, la déesse-Mère et Baal, le dieu-Fils, sont malheureusement aussi jaloux que le Dieu de Moïse. Aussi ne manqueront-ils pas de surgir périodiquement, sauvagement, tout au long de l'histoire d'Israël qui tente de les réprimer jusqu'à ce que mort s'ensuive. Mais les dieux et déesses sont immortels. Même si aujourd'hui l'on tente de les dédramatiser en les nommant « archétypes », « complexes » ou « image » ou.
. le sacrifice humain de l'enfant mâle premier-né était aussi nécessaire à ces dieux sémites archaïques que celui des prémices des récoltes. Le Patriarche.. Abraham .. nous montre .. P.191 comment son Dieu l'autorise, in extremis, à remplacer celui-ci (Isaac) par un bélier.
Et c'est alors que le Patriarche.. institue la circoncision, non plus à la puberté (rite de passage), mais à la naissance (rite de baptême). .. le sacrifice cannibalique (oral) renvoie toujours à un sacrifice hiérogamique (génital) relatif à la Mère. Mais ce dernier, remplaçant le sacrifice en entier du Fils, se réduit à une mutilation partielle. Certes, encore sanglante dans son archaïsme, mais mineure : en majeure partie « mentalisée », « symbolisée », «imaginalisée ». . P.193
.Dans ce qui deviendra plus tard la « Terre d'Israël » se trouvait un peuple de vieille civilisation agricole, sédentaire, urbaine même.. Ce peuple ressemblait.. à celui .. rencontré dans le monde créto-égéen minoen et mycénien d'avant les invasions indo-européennes doriennes. Leur culte était donc celui d'une Déesse-Mère et Terre, accompagnée de son « petit dieu Grain », son Fils amant, qui y tenait donc lieu et de Fils et d'Epoux et de Père. .. si la fonction Mère est naturelle par « nature » celle du Père ne l'est que par « culture ». Elle n'est pas évidente. Il n'y a de Père que si Mère le veut.
.. se produire.. en cette terre cananéenne, le même phénomène que .. en Grèce minoenne et mycénienne. .. l'effraction violente du Père dans la fusion Mère- Fils. . P.195
. ce panthéon cananéen précédant l'arrivée des Hébreux en Canaan .. par opposition radicale, va devenir l'ennemi juré de leur Dieu et, par « assimilation », constituer leur « refoulé » collectif « forclos » qui, périodiquement, fera « retour » sous .. formes violentes. ce choc et cette assimilation n'ont pu se produire entre ces deux formes de civilisation, que, parce que, Canaan - et son culte d'Anat-Baal. constituait déjà le « refoulé » collectif du peuple hébreu sous le joug du Dieu Père unique et exclusif . Le « choc » est déjà un « retour » de ce « refoulé » ( « forclos » ). Ce combat constant, qui aboutira au schisme (Juda/ Israël), est une manifestation « projective » (pré-réflexive) de ce « refoulé », extériorisée alors en lutte vraiment fratricide entre Juda et Israël.,. A l'instar du pasteur Abel et de l'agriculteur Caïn. .

II Le baalisme et le jahwisme : La forcluslon du Nom-de-la-Mère et de son Fils-amant par le Nom-du-Père

LE MYTHE D'ANAT -BAAL

.
L'on comprend donc la réaction violente des Hébreux, déjà si avancés dans l'actualisation de l' « archétype du Père- culture », devant ce déferlement de la toute-puissance de elui de la Mère, « Nature », sauvage, celui-là même qu'ils contenaient en eux à grand-peine.

ELOHISME, JAHWISME ET JUDAiSME : LA LETTRE CONTRE L'IMAGE

. le premier Dieu- père des Hébreux se nommait El, Elohim. . YHWH. Il bannira tout ce qui, de près ou de loin, pourra renvoyer à cette déesse Mère Anat et à son Fils amant Baal - voire.. leur Fils divin, le Veau, d'or paré. . les idoles les représentant seront bannies. L'iconoclastie chasse l'image au profit de l'idée abstraite, du mot et de la lettre. Le judaïsme .. sombrera .. dans un légalisme pointilleux, un ritualisme obsédant et un « lettrisme » aride qui hâteront le fameux « retour du forclos » de l' « image », de l'idole, de la déesse Mère et de son Fils amant : ils se nommeront, un bon millénaire plus tard .. Marie- Jésus. tout en conservant la toute-puissance du Dieu- Père Yahvé, si différent, à ce point de vue, du vieil El fatigué.
. en tout juif aujourd'hui, cette trinité demeure, en ombre ; ayant pris, entre-temps, la forme de la trinité chrétienne des origines : Marie- Yahvé (par son « Saint Esprit » ) - Jésus. L'ombre chrétienne est une lourde croix. . P203

« REFOULEMENT » ET « FORCLUSION»

III Les dossiers du forclos à travers les textes et leur esprit

GRECS ET HEBREUX

. Chez les Grecs existe une archè (origine) et un eschatos (fin). La pensée des Grecs est .. totalement dans l'histoire linéaire ; quand celle des Hébreux, héritiers de toutes les Grandes Déesses Mères du Proche Orient, même si tout à coup ils les dénient .. conserve l'histoire sacrée ( cyclique et éternelle) .
.. la dialectique de l'Un et du Multiple, ce sont les Grecs qui la négocient au mieux, en conservant.. leur polythéisme et les « images » de celui-ci..
(Dans la diaspora, nous assistons à un « passage dans le Réel » ( « à l'acte » ) du Multiple forclos par l'Un.).
YHWH garde, pour sa lutte contre Anat - Baal, une personnalité baalienne : jalouse, vindicative, cruelle et sadique à l'occasion. Et il ne manque aucune occasion de punir et humilier son peuple, sa nouvelle Epouse, Israël, soumise comme la prêtresse « consacrée » (prostituée sacrée) de Baal. . P.209
. Le Cosmos grec (l'Ordre, le Dharma indien) devient une pensée objectivée, une science de la nature. Et même une science .
Le jahwisme demeure une science de l'homme. Le monde, pour lui, n'est pas rationnellement intelligible. Il est admiré comme un Grand-Ouvre de Dieu .
Le mythe cosmogonique - puis cosmologique - grec, qui fonde la science, est ici chassé. . Par la foi ! .. en l'Eternel qui exige tout de nous. .
. le Grec espère atteindre à une connaissance rationnelle de Dieu - ou de son dieu « préféré » - et sinon rationnelle, en tout cas initiatique et mystique. . chez les Hébreux. .. Au contraire. « Nous mourrons certainement car nous avons vu Dieu ».

QUAND LE MASCULIN REGNE AU CIEL ET LE FEMININ SUR LA TERRE

. En revanche, Dieu hébreu parle. . Il est Logos. Et connaître Dieu, c'est avant tout connaître sa Volonté. Il est discours, « discours du maître ».
Lui obéir et le craindre. La « sagesse » ici est de craindre Dieu, contrastant avec la sophrosuné (juste milieu) grecque. Le craindre et l'aimer, à l'instar de l'épouse pour l'époux, du a fille pour le père. . P.211
. Sacrifice humain, sacrifice animal, mutilation partielle ( « castration » ), tel est le trajet sacrificiel de l'Alliance..
Par ce contrat, l'on peut avoir confiance en son Dieu. Mais c'est aussi devoir à tout instant mériter celle-ci. On gagne la grâce de ce Dieu, on n'en dispose pas.
YHWH règne seul au Ciel, sans mère ni épouse. ni fils. Sur Terre, il soumet sa Terre promise et son « peuple élu ». . P.213

LE RETOUR DU « FORCLOS » EN LA MERE ET LE FILS : L'ANNONCIATION

. La Mère et son enfant parthénogenétique des vieilles religions à mystères..
Cette « forclusion » (éradication) du Nom-de-la-Mère et de son Fils-amant conduit ses sum-bolès ( Sum-bolès : représentants archétypo-pulsionnels de la Mère et du Fils ; sum-bolon : représentants nommés de ces sum-bolès.) à s'imposer dans le Réel, sous la forme de Marie et de Jésus.
Marie, « élue » .. est grosse directement du « Saint-Esprit » du Père céleste. Elle va donc enfanter d'un Fils divin qui ne sera « pas de ce monde ». . la «forclusion » porte ici.. sur le père terrestre qui, en régime patriarcal, renvoyant à tous les patriarches, notamment à Abraham, peut seule donner existence terrestre au Fils-du-Père.
La forclusion du père terrestre qu' « opère » Marie exprime, en elle, la ré-« apparition » d' Anat, « forclose » par le système monothéiste patriarcal radical. . (Cf. rêve de la vierge de M. D. et association sur le père qui ne sert à rien)

TEMPLE ET SYNAGOGUE : SACRIFICE ET ECRITURE

. P.215
. Fait unique à l'époque, ce nouveau centre où l'on ne célébrait plus de sacrifices, c'est la synagogue. C'est là, que la Loi était lue, apprise, interprétée, expliquée, commentée et prêchée. .
La voix des Prophètes s'est tue. . D'un Logos hystéricos, dialoguant sans cesse avec un Logos spermaticos, il ne reste que ce dernier, figé dans la lettre de la Loi pour la Loi. Dieu est devenu le Magistrat universel. . Il se mure en sa Loi pure. En rites secs que l'on répète, sans enthousiasme. Plus de sacrifices, plus de vie. .
La Loi s'insinue dans les moindres gestes quotidiens. Elle dévore ! (Freud définit les religions comme une névrose obsessionnelle collective. .. derrière tout tableau obsessionnel se dissimulent, tant bien que mal, cannibalisme et esclavagisme, actifs ou/et passifs, que la ritualisation et 1'« isolation» tentent péniblement de contenir. parfois jusqu'à ce que mort s'ensuive. La Loi aussi tue !)

LES SECTES PORTEUSES DU « FORCLOS » DE LA LOI

C'est en ces sectes.. que s'expriment le « refoulé » et le « forclos » du légalisme judaïque. Le Logos hystéricos y reprend droit de cité, contre le Logos spermaticos. .P.217
. En un millénaire passé, ce peuple ne parvint à garder son unité et son indépendance que pendant soixante-treize ans, Pour le peuple champion du monothéisme, de l'Un s'opposant au Multiple, c'est un record, un comble !
Si l'on songe que cette unité ne se soutint que de la diaspora (du Multiple donc), la dialectique, si chère aux présocratiques, de l'Un et du Multiple, est donc aussi réalisée chez les Hébreux.., Mais.. au prix d'un « passage à l'acte » : la dispersion, la diaspora généralisée.
. en ce peuple l'espérance .. renforce en lui le messianisme . Dieu est celui qui sans cesse vient et fait l'histoire : le Messie. (Messias.., Meschikâ.., Khristos.., Christ.. signifie : oint sacré par Dieu ; envoyé par lui pour le salut des hommes. Tous les Fils amants des Grandes Déesses étaient nommés ainsi.) Il y a des siècles que ce peuple l'attend. Toute femme juive en est potentiellement la mère.

LES ECRITS APOCRYPHES

. on désire ardemment, de plus en plus, voir advenir la Fin : « Que l'Eternel édifie son royaume en hâte et dans le plus bref délai. »
Depuis des siècles l'espérance est déçue. .
.. des prophètes apocalyptiques et messianiques, des prétendants à la couronne du peuple élu, ne cessent de parcourir les routes. forment des disciples, des sectes, des mouvements violents que les Romains ne cessent de réprimer dans le sang.
. Jean- Baptiste se retira dans le désert de Judée ( « renonçant » à la façon de Shiva), où il vécut dans le jeûne, l'abstinence et la prière. En 27.. il vint sur les bords du Jourdain annoncer que le Royaume de Dieu était enfin proche.
.. Quelque deux ans après son baptême dans les eaux claires du Jourdain, 1'« Agneau de Dieu » de Jean-Baptiste commençait sa prédication messianique. .. P.219 avec une hubris toute particulière.
.. l'espérance juive générale.. était celle du rétablissement du grand royaume terrestre de David.
Le Roi-Messie est donc conçu, dans cette espérance, comme un guerrier, roi de Jérusalem, rassemblant en Terre sainte les douze tribus d'Israël dispersées, comme au beau temps de Josué, et établissant sa domination sur le monde.
Mais au sein même de cette espérance, toute matérielle, une autre espérance, surnaturelle, d'un « royaume qui n'était pas de ce monde », se faisait jour . la Parole d'un Messie qui anéantirait les adversaires du « peuple élu » et imposerait ainsi la Loi de son Dieu. .
.. dans les Apocalypses, influencées par les eschatologies cosmologiques babyloniennes et iraniennes, que s'est développée une espérance d'une tout autre nature. En elles, la foi en la « création continue» demeure. Dieu est toujours celui qui sans cesse vient. Mais, en cette Parole, un dualisme pessimiste se fait jour, qui fait de la Terre et de notre corps le lieu de la déréliction, de l'hubris, du péché, de la maladie, de la misère, de la mort enfin. Des esprits malins dominent ce monde malheureux, dont le chef est Satan. La Ténèbre s'affronte à la Lumière.
L'homme, jouet de ces puissances cosmiques, n'a qu'un moyen d'y échapper : la libération intérieure, individuelle, par l'ascèse, le sacrifice intérieur, le renoncement à ce monde mauvais (sous entendu, sacrificiel de l' « autre », exo-sacrificiel) ; et par là, en réalisation de l'union de l'être intime individuel avec la puissance de Lumière. Il est nécessaire que l'âme abandonne peu à peu sa chair corrompue et mortelle, pour que, au jour de la mort de ce corps malheureux, elle puisse s'établir définitivement dans l'Ether. éternel. ..
Et cette libération individuelle sera donnée à tous, vivants et morts, à la fin des temps (eschatologie). .
. reconnaître les signes avant -coureurs car « dans les douleurs du Messie », les maléfices de Satan atteindront leur point culminant : l'Antéchrist. . P.221
Ce sera là la Fin, enfin ! Qui avec elle amènera la résurrection des morts et le Jugement dernier.
Thème « dépressif » s'il en est. Contenant son antithèse « maniaque ». « Position dépressive » et « maniaque » dont.. l'existence, ultérieurement à la « position schizo-paranoïde », tant dans l'évolution collective de la psyché que dans la récapitulation individuelle de celle-ci. ( La « position schizo-paranoïde » est exosacrificielle. La « position dépressive et maniaque» tend vers l'endosacrifice - et y parvient dans le suicide mélancolique..)
L'ennemi, le persécuteur. n'est plus l' « autre », mais l' « autre » en nous : nous-même ! L'objet persécuteur imaginaire est pris en compte par le sujet lui-même, c'est-à-dire déjà imaginalisé.
.essence de ce qui va devenir le christianisme.
. à l' « obsession » de la Loi juive, s'opposera toujours, au long des siècles, l' « hystérie » de sa mystique. ( Il en est ainsi dans toute grande religion. Les docteurs de la Loi n'y apprécient généralement pas les mystiques du Désir : ils les redoutent.) A la fin de cette période apocalyptique.. au sein même de la diaspora universalisée, le dialogue des deux Logoï (spermaticos et hystéricos) reprendra au cour même de la nation ainsi universalisée du « peuple élu ». .P.223

IV La réincarnation du forclos ou le retour de Baal et Anat en Jésus et Marie

. La relation de l'homme à Dieu ne peut consister en un pur rapport juridique. Elle réclame l'Homme total. .
Le prochain, l'autre, le grand Autre, devient la mesure de toute chose ( la Caritas ). Le commandement d'Amour s'inscrit contre la Loi ; .. il la transcende. Jusqu'à l'amour des ennemis.
Aucune « loi » dans cet « amour » que celle d'un « Je » et d'un « Toi » en réciprocité : « comme toi-même » ; c'est-à-dire, illimité. ou limité à ce que l'on peut soi-même s'accorder.
Dieu est incarné dans le prochain ; l'Autre en l'autre - et l'âtman (l'être-soi-même) en le Brahman (le Soi-même absolu). Dialogue permanent du Soi absolu avec l'Autre absolu en moi et toi. P.225
. Dieu est à nouveau proche... Il est bien Celui qui vient sans cesse et nous habite. Pas besoin de Loi - et de ses exosacrifices - pour passer « contrat ». Il faut l'éprouver et le vivre dans l'Amour ( Le « grand Amour» est un noyau sacrificiel « maniaco-dépressif». ) (Cf. rêve du 04-04-01 avec Sandrine et l'empereur.)
. Jésus .. est lui-même le signe du temps, (le nouvel aiôn).. il désigne le Roi-Messie céleste « comme Celui qui vient » : l'Homme !
Ecce Homo ! L'Homme futur !
La « mutation » de civilisation.
. « Si quelqu'un vient à moi, et ne hait pas son père et sa mère, sa femme et ses enfants, ses frères et ses sours, et même ne se hait pas lui-même, il ne peut être mon disciple» .
Quelle violence, quelle hubris imprègnent ces paroles ! C'est là le « renonçant » absolu. Hors de cette haine, point de salut ! L'amour sans la conscience de la haine qu'il véhicule n'est que « roman à l'eau de rose ».
Le « renonçant » absolu, tel Shiva, est condamné à se ré-« ensauvager » : le sacrifice humain ! « Quiconque ne porte sa croix et ne me suit pas, ne peut être mon disciple»
La croix, entre autres souffrances, mais au fond de toute souffrance, c'est la haine qui, sans cesse, fonde l'amour : le cannibalisme qui fonde Agapè, l'esclavagisme qui fonde Caritas ; la possessivité qui fonde Eros. . Dis-nous qui tu hais, je te dirai qui tu es - et qui tuer : en toi !
. « Qui aura trouvé sa vie la perdra et qui aura perdu sa vie à cause de moi la trouvera » . P.227

FINAL

Sacrifions, puisque autrement on ne peut faire, pour vivre et survivre ( « consommer » c'est sacrifier ). Sacrifions mais sachons que nous le faisons. .
Sacrifions même le sacrifice, mais sachons que ce faisant nous sacrifions encore, par définition. S'autosacrifier pour éviter le sacrifice des autres ( exosacrifice ) est sans doute le seul moyen de diminuer la charge sacrificielle qui accable notre humanité. Mais ne sacrifions pas de la sorte le sacrifice à n'importe quel prix, notamment sur le dos de nos frères ; ce qui revient à un exosacrifice se dissimulant derrière le masque tragique de l'endosacrifice, autosacrificiel. hypocrite !
. le sacrifice, commémorant la mutation Homo, sapiens-sapiens en particulier, est toujours transmutation d'un destin : collectif et/ou individuel. .
Le sacrifice est une initiation et une différenciation-individuation collectives et individuelles.
Il peut se définir .. comme le résultat des « essais et erreurs » nécessaires à une mutation ( transformation radicale) d'un individu et du groupe qui l'entoure, afin de créer un nouvel individu au sein d'une nouvelle collectivité. . P.231
. toute mutation de civilisation se fonde sur un sacrifice : un sacrifice humain - et divin - pour la nôtre, judéo-chrétienne.
On peut déplorer.. que ce sacrifice fondateur n'ait pas été compris comme « une fois pour toutes » et « tous contre un » .
C'est depuis que le sacrifice humain et divin de l' « Imaginaire Jésus » n'est plus viscéralement vécu comme tel par une multitude de chrétiens, qu'il n'a plus sa fonction de « bouc émissaire » et que de ce fait, il libère la violence qu'il canalisait et la laisse sourdre en ce monde déchristianisé. Dès lors la voie est ouverte aux Satans : Hitler, Staline. depuis que Jésus n'assume plus sa fonction sacrificielle de « bouc émissaire ».. il n'y a plus de bi-réflexivité de 1'« Imaginaire Jésus » (préréflexif) vers l' « Imaginal Christ Dieu » ( trans-réflexif). . En ce monde, l'homme idéal sans violence.. n'existe pas. pas encore !
. L' « Imaginaire Jésus » consiste à confondre Jésus avec Baal et son taureau sacrificiel et, donc, à lui faire subir Passion .. en laquelle s'épuiseront toutes nos « pulsions partielles » (Sadisme et masochisme, exhibitionnisme et voyeurisme, fétichisme, homosexualité, nécessaires à la constitution d'un Moi-sujet et ne devenant « perversions» ou « perversité » que s'ils se fixent et se généralisent, au point de remplacer plus ou moins totalement l'acte sexuel « normal » qui les englobe tous sans jamais les abolir. Le Multiple demeure dans l'Un (comme le Devenir dans l'être).) sadomasochistes notamment. Le mythe de résurrection de Jésus en Christ-Dieu .. traduit le passage de l'Imaginaire pré-sacrificiel (pré-passionnel) à l'Imaginal post-sacrificiel (post-passionnel). ..
. cet Imaginaire fusionné à l'objet physique Jésus (homme). reste le pôle dialectique nécessaire de l'Imaginal conjugué à l'objet psychique Christ Dieu .. c'est le Sujet Symbolique issu du sacrifice lui-même qui constitue le « troisième terme » ...
. sacrifices du taureau.. L'Imaginaire me fait « voir» - et vivre viscéralement - en cet animal sacrificiel, mon ancêtre totem, mon héros civilisateur, mon esprit tribal préféré, mon dieu unique même, Baal par exemple, voire Jahvé - et leurs corrélats infernaux : c'est là une perception « projective » ou « pré-réflexive » ou, plus simplement, « réflexive ».
Le Symbolique, par le sacrifice de cet animal ainsi vécu, m'apprend à séparer l'ancêtre, le héros, l'esprit, le dieu, voire Dieu - et leur corrélats infernaux ( « réalité psychique objective»), du taureau-animal tel qu'en lui-même il est ( dans sa « réalité physique objective ») (Le danger, à peu près inévitable, lorsque le sacrifice ne fonctionne plus rituellement, comme c'est le cas aujourd'hui, c'est de nous prendre pour ces ancêtres, ces héros, ces esprits, ces dieux, voire. Dieu ou/et le Diable. Nous entrons en inflation, en mégalomanie, qu'elles soient paranoïaques ou maniaques - ou mélancoliques : ce qui fut le cas de Joël ... C'est ce qui se passe généralement dans la simple différenciation. C'est l'individuation qui, plus tard, nous séparera véritablement de la « réalité psychique objective », pour nous y relier, sans nous confondre avec elle (sum-bolaïon -è -on). La différenciation est l'ouvre de la première partie de la vie. L'individuation celle de la deuxième.) P.233
.
Sacrifier le taureau revient donc à sacrifier la fusion- confusion sujet- objet.. Imaginaire- Imagilal, réalité physique objective- réalité psychique objective. Sacrifier revient à séparer, en un Sujet, ce qui revient à ce sujet donné, ce qui revient à César et ce qui revient à Dieu.
. ce que l'on nomme l'Autre, l'altérité se trouve des deux côtés du schéma, tant du côté de la réalité psychique objective que du côté de la réalité physique objective. Et que moi-même, pour tout ce qui vit - ou existe autour de moi, je suis un autre. Un « petit autre » - quelquefois confondu avec le « grand Autre », dans le phénomène amoureux par exemple, qui recrée l'Un orgasmiquement - et orgiasmiquement.
C'est ce qui arrive au taureau sacrificiel - à tout objet sacrificiel - pris dans le phénomène de possession orgiasmique et orgasmique.. C'est là la fusion- confusion : le retour au Chaos, à l'Eden, à l'Age d'or ; à l'orgie, à l'indifférencié, où tout est possible, et, notamment, la séparation symbolique, qui réengendrera, à travers les registres séparés de l'Imaginaire et de l'Imaginal une nouvelle vision du monde.. C'est de la sorte, par l'orgie et la fête que, tous les peuples de l'Antiquité régénéraient le monde. Mais il fallait que meure l'ancien monde, sacrificiellement !
. Pauvres humains condamnés à faire du divin par, et dans le sacrifice de la « Bête humaine », de la bête animale, de la « bête » végétale, de la « bête » minérale leur « apparaissant» en démons et en dieux, en dragons et archanges à la recherche sans fin de l'Un perdu et qui, retrouvé, devra encore et encore être sacrifié pour qu'advienne le Nouvel Homme fondant une nouvelle humanité dans une Alliance (sum-bolaïon) sans cesse renouvelée. .
.. l'acte est bien plus beau quand il est fait pour. rien ! P. 235